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Alter et ego (Carnet)
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26 octobre 2024

Préparer la suite

Depuis quelques mois je me sens glisser vers un nouvel état d'être-au-monde. La perspective d'une retraite dont je reporte l'échéance - mais qui forcément se rapproche - me pousse à penser l'avenir de ma vie solitaire. Comment vais-je continuer à interagir avec autrui lorsque plus rien ne m'y obligera ?

 

Il y a quelques mois j'envisageais cette liberté avec sérénité, étant persuadé que bénéficier d'un temps (presque) infini allait me permettre de réaliser moult projets sans cesse reportés. Insidieusement je sens cependant se mettre en place une sorte de crainte : ma solitude ne risque t-elle pas de devenir pesante ? Je mesure de plus en plus distinctement le plaisir que je ressens à être inséré dans un tissu professionnel agréable, enrichissant, sympathique. Les périodes de congés que je m'octroie m'ouvrent désormais à cette conscience, en songeant qu'un jour je serai en perpétuelles vacances. Que vais-je faire de tout ce temps seul avec moi-même ? Bien sûr je sais que je pourrais continuer à rencontrer des gens, m'investir dans diverses missions associatives, suivre la marche du monde comme je le fais depuis toujours. Je vais aussi pouvoir passer davantage de temps avec mes petits-enfants. Mais cela me suffira t-il ? Je connais ma tendance au repli, qui me protège de tout ce que je n'aime pas dans le relationnel superficiel. Aller au devant des autres, si ce n'est pas pour partager quelque chose de nourricier, ne réussit pas à m'intéresser. Je n'ai pas besoin de simplement voir des gens, mais d'échanger dans un registre de réflexion, de découverte, d'enrichissement mutuel. Je me sais exigeant sur ce point, et par ailleurs peu doté en énergie communicative ni capacité à "entrer en relation". Être intégré dans un milieu professionnel depuis longtemps m'offre donc encore, pour quelques temps, le plaisir d'interactions variées, fréquentes, stimulantes, affinitaires. Avec un parfait équilibre entre le temps passé au travail et le temps passé en dehors. En fait ma situation actuelle me convient très bien.

 

Mais le mécanisme de sortie est enclenché et déjà l'équilibre change. L'association qui m'emploie et au sein de laquelle j'ai un poste de responsable anticipe, en plein accord avec moi, la suite. C'est à dire le moment où je ne serai plus là. Il me revient donc de transmettre toute l'expérience acquise depuis quinze ans, pour faire en sorte que l'activité perdure sans accroc ni baisse de régime, afin que mes collaborateurs actuels, forces vives, puissent continuer à se sentir motivés, soutenus et encadrés. Bref, nous devons faire une transition (le mot est à la mode) entre maintenant et après. Et comme j'ai donné une échéance de départ,  quoique encore un peu vague, le compte à rebours est lancé : j'ai commencé à transférer une partie de mes attributions à celui qui, à terme, ajoutera mes fonctions aux siennes. Le processus est encore hésitant, en co-construction, et suscite déjà des inquiétudes chez mes plus proches collaborateurs, qui redoutent le changement des méthodes de management. Un peu par jeu, ils me demandent de surseoir à mon départ (signe qu'ils m'apprécient) mais m'expriment aussi ouvertement leur crainte de perdre l'autonomie responsable que je leur laissais. D'autres collègues, femmes, avec qui je ne suis pas en interaction directe mais avec qui des liens d'affinité de sont établis, manifestent par anticipation leur désappointement de me voir bientôt partir. Clairement il m'est demandé, avec sourire et charme, de reporter mon départ. C'est très gratifiant pour moi de me sentir ainsi apprécié, mais remet dans la balance l'allongement de l'échéance incertaine et requestionne ma solitude à venir.

 

Le temps long de l'indécision me convient bien : j'ai besoin de temps pour sentir les choses, capter mes envies, évaluer les avantages et inconvénients des différentes options. Mon employeur y trouve son compte, voyant son avantage à faire évoluer l'organisation des fonctions que j'occupe encore... mais plus pour longtemps. Les deux mois à venir vont être mis à profit pour organiser mon "débranchement" des fonction managériales et les "rebrancher" autrement en janvier en répartissant la charge sur plusieurs personnes, dont les fonctions vont elles aussi évoluer. Mon départ devient ainsi l'occasion d'une réorganisation en douceur (présentée comme telle...). Quant à moi, de nouvelles fonctions me sont attribuées, telles que l'accompagnement du changement, la transmission de mes compétences et la disponibilité pour les inévitables cas particuliers auxquelles l'expérience due à mon antériorité permettra de répondre. J'ai aussi une mission crée sur mesure, en accord avec une appétence souvent exprimée : accompagner la transition écologique du groupement associatif au sein duquel je ne pilotais qu'une seule des branches. C'est donc un nouveau défi qui s'ouvre pour les huit à quinze mois qui arrivent.

 

Ce compte à rebours au terme non fixé va aussi me permettre de me préparer à ma fin d'activité salariée et à me questionner, sans hâte, pour faire en sorte que je vive bien "la suite". De nouveaux univers à explorer s'offrent à moi. 

 

La photo de nature, un plaisir qui pourra se prolonger.

 

 

Commentaires
J
Coucou Pierre, <br /> Ma fuite en avant peut se traduire par prendre les devants 😊<br /> Allez, fuite réparée je te souhaite une douce soirée.<br /> Julie
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J
Préparer la suite, c'est préparer la fuite... En avant forcément, mon Commandant 😄<br /> Mon intervention ne t'apportera rien d'intéressant, mais je t'ai lu avec plaisir 😊 <br /> Bon weekend en solitaire, Pierre.<br /> Bises chaleureuses.<br /> Julie
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C
Ah non, suite mais pas fuite en avant ! Fuir quoi, d'ailleurs ?<br /> Merci pour l'appréciation et bon week-end, solitaire ou pas.
J
PS Joli haïku au précédent billet 😊