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Alter et ego (Carnet)
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26 août 2005

Mots donnés

Eva fait partie des rares diaristes qui écrivent en continu depuis des années. Six ans pour elle, en ayant débuté avec un journal à quatre mains. Je la lis fidèlement et apprécie la tonalité de ses textes. Depuis quelques années elle a beaucoup espacé ses entrées, comme la plupart des diaristes qui durent. Il semble que ce soit une tendance naturelle, et je préfère lire des textes de loin en loin que de constater un jour qu'un journal a totalement cessé d'exister, faisant disparaître du même coup son auteur.

S'étant souvent intéressée à son rapport à l'écriture, elle énoncait il y a quelques jours: «Écrire est le don de soi le plus égoïste qui puisse exister. J'écris pour me donner, pour m'échapper, pour offrir à d'autres mes émotions. Mais en offrant mes démons et mes peurs, je ne veux pas faire autre chose que m'en débarrasser : les donner aux autres pour ne plus que tout ce qui me ronge soit un poids pour moi. Au fond, en écrivant, c'est comme si je mettais des ordures à la poubelle. Voilà ce que je prétends offrir à des lecteurs : mes épluchures !»

Moi-même je m'interroge souvent sur le sens de mon écriture publique, quoique elle soit largement différente de l'écriture d'un roman. Qu'est-ce qui me pousse à raconter ma vie aussi intimement à des inconnus, puis à des gens que je connais de plus en plus ?
J'ai souvent écrit que je témoignais de quelque chose qui me semblait important, donc avec une idée de "don". Mais à l'évidence je trouve aussi une satisfaction dans ce "don". Peut-être que je cherche à "partager", dans le sens de fractionner, diviser. Cela devient moins lourd en moi lorsque je sais que d'autres l'ont lu et on pu trouver des résonnances dans leur propre existence. Une façon de me sentir moins seul à porter mes soucis, parce que s'ils sont lus c'est qu'ils touchent forcément quelque chose chez les autres. Sans cela... il y a longtemps que plus personne ne me lirait [arghh... la solitude abyssale de l'écriture publique sans lecteurs !].


D'ailleurs... ce lien avec le lecteur existe bien: je consulte régulièrement les statistiques de ce carnet et je vois que les hasards des premiers jours ne se reproduisent pas. Ce site reste assez peu fréquenté. Alors j'ai le choix de le garder relativement secret, avec des regards connus et identifiés, ou d'établir un lien sur mon journal afin d'informer mon lectorat de l'existence de ce site parallèle.
En fait j'ai toujours pensé que j'établirais ce lien...
Si je m'interroge sur l'opportunité de le faire maintenant, c'est parce que je crains de paraître silencieux sur mon journal qui, en ne conservant que sa part la plus intime, risque fort de voir ses entrées s'espacer avec le temps. En fait, je me rends compte que j'agis comme si je devais quelque chose à ceux qui me lisent ailleurs... Mais devoir quoi ?
Probablement l'envie d'apporter des pistes de réflexion. J'aime me sentir, même de façon aussi minime que par des mots laissés sur le net, utile dans la vie de certaines personnes. Tout comme je me nourris des réflexions de ceux qui écrivent et stimulent mes pensées. Je me sens faire partie d'un vaste espace de communication interpersonnelle et ma place et de donner ce que je peux. Il paraît... qu'on me lit aisément, voire que mes mots accrochent l'attention et donnent envie de les suivre. Je suis touché lorsqu'on me le dit, et cela me donne envie de poursuivre. Si j'ai cette capacité de procurer une satisfaction et d'aider les gens à vivre quelques instants agréable en ma compagnie... alors je m'en réjouis.

J'avoue qu'écrire cela me demande un certain effort. Je ne me crois pas adepte de complaisance à mon égard... mais il faut aussi que j'accepte d'entendre que "j'existe" pour des gens qui ne me connaissent pas. Et... peut être encore plus difficile, accepter que j'existe pour des gens qui me connaissent.

Je ne peux nier que la confiance en moi, peu à peu regagnée, est largement confortée par ma vie sur internet. Que ce soit par le journal, les forums, et surtout les innombrables contacts et relations qui se sont établis, éphémères ou durables.

Et tout ce qui peut restaurer cette confiance est bon à prendre...

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