Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Alter et ego (Carnet)
Alter et ego (Carnet)
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
27 décembre 2005

Souvenirs à géométrie variable

Depuis un certain nombre d'années il y avait chez nous trois noëls. Celui que nous fêtons en comité restreint avec nos trois enfants, et les deux variantes auxquelles nous étions conviés dans chacune des familles d'origine. Le premier est intimiste, toujours agréable et détendu. Les seconds sont expansifs, chargés d'une empreinte du passé, et mêlent le plaisir de se retrouver à de vagues relents acrimonieux toujours susceptibles de déraper.
Cette année il n'y a eu les trois noëls que pour nos enfants. Chacun de leurs parents ne s'est rendu que dans sa famille d'origine... et pas dans la belle-famille. C'était davantage un choix de mon ex-partenaire conjugale que de ma part, mais ça ne m'a pas vraiment dérangé. Je ne me suis jamais senti bien à l'aise dans sa famille où, pour que les non-dits ne suintent pas, les conversations ne s'éloignent jamais trop loin de la superficialité. Il n'y a guère avec une de mes belles-soeur que je peux avoir une conversation.. Et pour tout dire... il est rare que je ne me sois pas ennuyé dans ce genre de retrouvailles. Il règne dans cette famille une pesanteur figée qui plombe tout désir d'initiative.

D'ailleurs... pour rester dans la continuité du "ce dont on ne parle pas", il n'y a eu aucune question relative à mon absence, alors que depuis un quart de siècle j'ai toujours été présent à ces mornes festivités... Seule la plus jeune de mes nièces à demandé à mon ex-compagne « Qu'est-ce qu'il a fait Tonton Idéaliste, pour que vous vous sépariez ? ». Lui aurait-on laissé entendre que j'avais "fait quelque chose" qui me rendrait seul responsable de la situation ?


Dans ma famille il y a d'autres particularités, d'autres non-dits... mais il me semble qu'on s'y amuse d'avantage. On va plus en profondeur dans les discussions, aussi. Plus librement, même si certains sujets sont évités pour éviter de faire remonter un passé pas toujours cicatrisé pour chacun. Hier tout s'est bien passé, malgré un échange ardent entre les tenants de l'inné et de l'acquis au sujet de certains comportements personnels. Assurément l'explication "génétique" présente l'avantage indéniable d'expliquer bien plus simplement les problèmes que l'option psychologique, qui ne fait qu'ouvrir des champs d'investigation complexes... Si c'est génétique, alors on n'y peut rien et on n'y changera rien. Logique et cartésien. Si c'est psychologique... alors on doit admettre l'intervention d'une part de responsabilité et de choix. On entre dans des zones floues. C'est moins confortable...

Je me suis retrouvé avec ma belle-soeur à défendre un point de vue commun, tandis que ma soeur en défendait un autre... qui était autrefois le mien. Les autres étaient peu diserts. Il était question de nos rapports familiaux à l'affectif, au toucher, au contact. Bref, à la part émotionnelle... Oh la la, pas très cartésien tout ça !


Un peu plus tard, ce qui aurait pu rester une anecdote m'a surpris: alors que nous parlions d'évènements passés, et après que chacun eut évoqué des souvenirs personnels pour étayer des affirmations, il fût question d'un fait très précis: le jour où l'homme a mis le pied sur la lune. Si tous se souvenaient du lever en pleine nuit pour assister à cet évènement mémorable, en revanche il y eut une divergences radicale sur un détail. J'étais persuadé depuis toujours de voir très précidément la scène en un lieu particulier. Lorsque j'ai cité le lieu, mon frère m'a dit: « ah mais non, ce n'était pas à X, mais à Y ! ». Ce à quoi ma mère rétorqua que nous nous trompions puisque c'était à Z, chez a... Ma soeur, quant à elle, voyait bien la scène à Z, mais chez b. Mon père, lui, ne se souvenait plus du lieu. Par recoupements il semble finalement que c'était ma mère qui avait raison...

Je suis resté perplexe devant cette variabilité des souvenirs, alors que plusieurs disaient "revoir la scène". Notre mémoire est-elle donc si peu fiable ? Et, par voie de conséquence, tout ce que je retrouve de mon passé, à quoi je donne un sens, a t-il vraiment existé comme je le perçois ?
Ce n'est pas la première fois que je constate cette différence subjective dans les souvenirs, mais je ne l'avais pas remarqué sur quelque chose d'aussi flagrant que l'objectivité d'un lieu précis. Bon... il est vrai que nous étions de jeunes enfants et que cela fait un peu plus de trois décennies que cela a eu lieu.

Commentaires
A
Ah ! Notre rapport aux souvenirs du passé !!<br /> <br /> L'expérience que tu rapportes est bien le signe que nous réécrivons sans cesse notre histoire personnelle selon nos nécessités du moment et avec la naivété de croire qu'il existe UNE Vérité !!... que de batailles familiales vaines à ce sujet !....<br /> Cette réécriture est nécessaire à la bonne santé mentale que nous essayons de maintenir....<br /> Les "historiens labellisés" ne font guère autrement d'ailleurs... pour "la bonne santé (supposée !)" de leur peuple à tel moment de son histoire...<br /> l'URSS était passée maitresse en ce domaine !!<br /> <br /> Nous somme tous une petite URSS avec notre histoire de vie !!!
Répondre