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Alter et ego (Carnet)
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21 janvier 2006

Effets parasites

L'affaire garfieldd étant lancée, apparemment avec des effets notables, chaque blogueur qui s'était senti concerné va reprendre le fil de son monologue spécifique. Les plus engagés, et ses amis, continueront probablement la lutte. Pour ma part je vais observer les suites de loin, mais je n'ai plus grand chose à en dire. Enfin, pour le moment...

Cependant cette flambée de solidarité et de défense de la liberté d'expression me pousse à réfléchir à mon propre euh... "engagement" (le mot est fort...) dans l'affaire. J'ai répondu à une impulsion devant l'injustice de la sanction et la faiblesse de ses bases. J'ai réagi par empathie, en tant que blogueur d'une part, en tant qu'être sensible d'autre part. Car à la lecture des textes de Garfieldd j'ai découvert une personnalité attachante, de l'humour, une capacité à la réflexion. Bref, quelqu'un de sympathique.

Mais je m'interroge...

  • Aurais-je (aurions-nous...) réagi de la même façon si Garfieldd s'était révélé être un personnage antipathique, ou si, comme je l'ai lu quelque part, il avait exprimé des opinions ou valeurs peu appréciées ? Est-ce la défense de la liberté d'expression ou celle de Garfieldd qui m'a animé ?

  • La blogosphère se serait-elle mis en bourdonnement si une décision injuste avait été prise à l'encontre d'un non-bloggueur ? Je crains fort que non, vu le nombre d'injustices qui existent sans susciter un tel élan de solidarité.

  • Le soupçon d'homophobie, autre axe souvent mis en avant, n'a t-elle pas été un catalyseur ? Ce ne serait pas surprenant, ni injustifié puisque le droit à la différence est sans doute une cause supplémentaire de révolte.

  • Si Garfieldd n'avait pas été lu par des personnes qui me semblent faire partie d'une certaine part influente de la blogosphère, y aurait-il eu cet engouement ? S'il avait fait partie d'une autre administration que l'Éducation Nationale, aurait-il eu autant de "collègues" pour le soutenir et lancer le mouvement ?

    En gros, le cas Garfieldd était "idéal" pour susciter un tel élan. Tant mieux, mais il ne faut pas négliger cette concordance d'éléments. Un obscur blogueur, moins talentueux, moins attachant, n'aurait peut-être pas eu le même soutien...

Par ailleurs, je me suis interrogé sur ma participation après mon premier élan impulsionnel. Si j'ai bien écrit "avec mes tripes", en suivant un désir de communiquer autour de cette injustice... je ne peux nier que j'ai ressenti quelques effets parasites nettement moins altruistes. Et je n'aime pas trop ça... (du moins je préfère en être conscient)
Je veux dire que j'ai aussi senti des poussées d'ego. D'abord en ayant la bête impression satisfaite de "participer" à un mouvement pour une cause que j'estime juste. Ensuite en constatant, non sans un plaisir ambigü, que tout cela augmentait mon lectorat.
Mais j'ai aussi, je dois bien le reconnaître ressenti euh... le plaisir (assez pitoyable) de cotoyer une certaine "élite" de la blogosphère. Le terme élite n'a guère de sens, mais signifie ici "personnes influentes et reconnues". Et de fait, en les lisant, je comprends que certains aient du succès vu leut talent d'écriture et la hauteur de vue de leurs interventions. Donc mon petit égo s'est trouvé satisfait de se trouver sur la page "Ils parlent de Garfieldd" sur Embruns, site référentiel. Surtout quand il n'y avait que 30 noms... Ensuite, ça avait nettement moins d'impact. Oui, bon, je suis comme ça et je n'en suis pas particulièrement fier. Je me console en me disant que je ne suis certainement pas le seul...
Quand je vois le nombre de "trackback" chez des blogueurs ayant pignon sur net, je me dis que ce n'est peut-être pas tout à fait désintéressé. Avec pour corollaire une diminution de l'intérêt de ce genre de liens lorsqu'ils se multiplient. Deux ou trois ça va, mais quand il y en a trente !

Bref, en m'immiscant dans ce cercle d'influence, je me suis surpris à tenter de prendre une certaine hauteur de vue. Puisque je me trouvais en si bonne compagnie, parmi des blogueurs qui semblent tous plus ou moins se connaître, j'ai très timidement tenté de me faire une toute petite place parmi eux. Vaguement mal à l'aise de me savoir "profiter" de cette occasion, bien que porté par un élan compassionnel et idéologique. Un peu comme le gars qui s'inviterait dans un cadre qui ne lui est pas habituel, que personne ne regarde, qui dénote par son habillement, sa posture, et le fait qu'il ne connaisse personne à qui parler.

Non, c'est pas ma place. Je ne suis pas un grand orateur, je n'ai pas des idées originales, ni un humour séduisant. Et si le coté intime/public (extime) de l'écriture sur blog m'intéresse, le phénomène blog en général n'est pas dans mes préoccupations. Mon truc c'est l'intime et l'introspection, et la tentative de lucidité (à laquelle je me livre en ce moment...).


Pour ce qui est de l'audience, je réalise à quel point cela gomme ma spontanéité. Et je m'interroge alors sur l'absurdité de la prétention à l'authenticité dès qu'on entre en contact avec un public nombreux. Je pense qu'il faut avoir une sacrée confiance en soi pour rester authentique devant un public grandissant. S'adresser à 5 ou 10 personnes dans un blog confidentiel est bien moins impliquant que devant 100 ou 500. Et je ne parle même pas de ceux qui atteignent les 5000 visites par jour ! Une chose me semble évidente: ces blogs-là ne sont plus dans le "je" intime. Ils ont une tonalité généraliste ou le "je" devient vite surprenant.

Je crois qu'il y a deux pôle difficilement compatibles: audience et authenticité. Voila pourquoi il arrive que je me trouve mal à l'aise dès que je me sais "trop" lu. Par nature j'ai envie de tendre vers l'authenticité. Parce que... je crois que c'est là qu'on trouve l'humain, notre part commune, ce qui nous relie. Et c'est ça qui m'intéresse, c'est ça que j'ai envie d'exprimer. Dans cet objectif, je ne rechigne pas à voir augmenter le nombre de mes visiteurs. Mais je tends vers une impossibilité...
Ou alors il me faut avoir une grande assurance dans ce que je suis, pour ne pas risquer le malaise. Peut-être est-ce l'acquisition de cette assurance que je cherche, en fin de compte...

Honnêtement je me fous du succès en tant qu'objectif. Par contre je tiens à l'authenticité et à l'honnêteté. Et si cela peut m'apporter, par voie de conséquence, un relatif "succès", alors là je l'accepte entièrement. Mon véritable objectif, c'est la connaissance de soi. Avec une idée trèèèès idéaliste derrière: plus on se connaît, moins on fait porter sur les autres nos propres manquements. Apprends à te connaître, à t'écouter, à t'aimer... et tu pourras ainsi aimer, ecouter et connaître l'autre. Sans projections, sans attentes, sans parasites. C'est simplement une question de respect et de tolérance, mais à l'échelle du fonctionnement intime de l'individu.

Je vous avais prévenu: je suis un idéaliste...

Commentaires
I
Voixfunambule, c'est vrai, aller vers l'autre n'implique ni qu'il viendra vers nous, ni même qu'il sers réceptif à ce mouvement. Mais c'est quand même le minimum que je puisse faire. Si je ne le fais pas je suis attentiste, je compte sur l'autre pour qu'il commence à venir vers moi.<br /> <br /> Je sais bien que c'est une vision "idéalisée" et moi-même je ne vais pas suffisamment ai devant des autres. Mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même...<br /> <br /> Je sais aussi que chacun n'est pas "riche" de façon égale et que c'est une chance que j'ai de pouvoir me poser toutes ces questions, parce que mon parcours me l'a permis. C'est aussi pour ça que je tente de partager mes réflexions...
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V
Bonjour,<br /> Mon commentaire concerne la fin de votre entrée (comme le commentaire précédent). Je suis d'accord avec vous si ce qu'on dit ici concerne la base de notre attitude (ou le point central auquel on revient le plus souvent possible si on s'en est éloigné): se connaître, faire l'effort de ressentir vraiment ce qu'on ressent, faire le même effort envers ce qu'autrui ressent, etc. Et, pour les personnes d'un certain type (dont je suis), il est bon aussi de formuler ce qu'on ressent, de tenter de décrire ce qui a lieu (en nous et par rapport à l'extérieur) et même de décrire le degré d'inadéquation de notre formulation par rapport à ce qui est, et de l'exprimer lorsque c'est approprié. Le point que je veux soulever, c'est que cet effort de précision, de "centrement", de présence réelle et d'attention n'est pas suffisant. Que se connaître n'implique pas qu'autrui sera ouvert à nous. Et pour entrer en relation, il faut une démarche de l'autre côté aussi. Y compris dans les relations en général, même superficielles (si la caissière refuse mon "bonjour" ou refuse, par gestes et regards, de noter ma présence, qu'y puis-je?). On ne peut aller vers l'autre si l'autre ne le veut pas, même si on travaille sur soi, même si on est présent. La perception qu'autrui a de nous ne dépend pas TOUJOURS de ce qu'on est. Et cette perception est le premier guichet à passer pour atteindre le moindrement un autre. Cela dit, ce serait bien, un monde oû le travail d'introspection et d'authenticité dont vous parlez - travail déjà ardu - suffisait! Mais n'oubliez pas que l'injustice existe et que si quelqu'un se retrouve démuni - socialement, monétairement, ou d'autres façons, ce n'est pas automatiquement sa faute (c'est une vision des choses "capitaliste" oû le riche mérite sa richesse et le pauvre sa pauvreté - cela se transpose dans tous les domaines). Bien sûr, malgré l'injustice, il faut poursuivre les efforts - parfois sans savoir s'ils pourront être récompensés - mais c'que c'est injuste!!! Mais enfin...
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T
"plus on se connaît, moins on fait porter sur les autres nos propres manquements..." inutile de vous préciser à quel point cela fait écho en moi... merci d'être cet... idéaliste.
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