Écrire pour de vrai
Il y a quelques jours m'a été posée la question suivante: « pourquoi n'écris tu pas un livre, un roman, une autobiographie, une tranche de la vie d'un homme ? ».
Ce n'est pas la première fois que cela m'est suggéré. Je ne dirais pas que je n'y ai jamais pensé, mais de façon superficielle, un peu comme un fantasme [vous savez, ce rêve d'être un génie ignoré...]. Bon... en y réfléchissant bien, ce pourrait être une excellente idée: les recettes générées par un best-seller me délivreraient peut-être de mes préoccupations financières... Ecrire, oui, mais avec succès ! C'est un minimum...
Non, honnêtement je ne suis jamais allé plus loin qu'une idée diffuse. Ça me tente, mais je ne me sens pas prêt. Et puis écrire quoi ? J'ai écrit une vague autobiographie sur un moment particulier de mon parcours, il y a près d'une dizaine d'années. J'avais pris beaucoup de plaisir dans cette écriture travaillée, mais il faut bien avouer que ça n'avait qu'une valeur personnelle, et essentiellement thérapique. Je ne me sens absolument pas un talent d'écriture digne d'une édition, fût-elle confidentielle. Si je recevais quinze mails par jour me suppliant de publier, je me poserais peut-être la question avec un peu plus d'acuité, mais nous n'en sommes pas là.
Remarquez... peut-être que je me trompe et que je pourrais être lu avec intérêt ?
Encore faudrait-il que je croie suffisamment en moi pour entreprendre ce genre de travail. Ça viendra peut-être un jour, mais pas sans avoir quelque peu fréquenté des ateliers d'écriture. Pour le moment ce n'est pas d'actualité.
Par ailleurs je ne suis pas naïf et les tentatives littéraires d'Eva, bien mieux placée que moi pour cela, montrent qu'il y a davantage de désillusions que de joyeuses surprises. Un récent article du magazine Télérama explique l'avalanche de manuscrits que reçoivent les maisons d'édition depuis quelques années. Le ministère de la culture, selon ce magazine, estime que « deux millions de français griffonnent des essais, de la poésie, des romans ou des nouvelles ». Gallimard a reçu 7000 manuscrits en 2005. Un français sur quatre aurait déjà écrit ou pensé à écrire un livre. Remarquez... j'apprends en même temps que vous que je fais donc partie de ces 25%... Vous aussi ? Ah bon...
Un éditeur avance que « huit manuscrits sur dix qui n'ont aucune valeur littéraire », tandis qu'un autre parle d'une « nécessité névrotique d'être découvert, publié, glorifié ». Tout cela ramène d'hypothétiques rêves de succès à un peu de réalité.
Si j'écrivais, ce ne serait pas pour ce genre de raisons [quoique mon égo, vile motivation, n'y serait sans doute pas totalement insensible], mais toujours dans l'objectif d'un partage, avec le souci d'aider des personnes à mieux se comprendre, chemin vers davantage de sérénité [c'est mon leitmotiv, ça...].
La question serait donc plutôt: ai-je quelque chose d'intéressant à écrire ? Quelque chose qui puisse mériter d'avoir davantage de portée que les 5.000 lecteurs quotidiens de ce carnet [hi hi, vous y avez crû ?].
Euh... honnêtement, je ne pense pas. Ma p'tite vie a beau être grande, faut quand même relativiser.
La seule chose qui, d'après mes constats, pourrait éventuellement intéresser un public spécifique, c'est ce qui peut faire qu'un homme "sérieux et fidèle" se mette à aimer aussi une autre femme que son épouse. Le cas n'est pas rare, on le sait, mais au delà des clichés faciles et des explications à la hache il peut exister des raisons un peu moins simplistes. J'en ai défrichées quelques unes. C'est actuellement le seul sujet sur lequel je pourrais avoir envie d'écrire. Ayant abondamment pu échanger avec des épouses ayant vécu la situation, il semble que j'ai parfois pu donner un peu de sens, atténuant peut-être sensiblement la souffrance ressentie face au mutisme fuyant de leur homme. Le spécimen humain mâle étant considéré comme peu disert sur ses ressentis émotionnels et sentiments, peut-être que ma prolixité en la matière à quelque chose de singulier ? Franchement je n'en sais absolument rien...
Il semble aussi que la façon dont ça s'est passé (non pulsionnelle et ouvertement) n'est pas fréquente. Les conditions de distance de ma relation parallèle m'ont donné un temps de réflexion et d'analyse qui n'est sans doute pas courant. En cela mon expérience présente quelque singularité. D'ici à prendre la plume...
Je crois qu'on a facilement tendance à s'imaginer avoir des tas de choses passionnantes à raconter. Encore faut-il que ce soit passionnant à lire.
A lire en parallèle:
- "Avalanche de plumes" (Télérama)
- "Inspiration - Expiration" (J'en rêve encore)