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Alter et ego (Carnet)
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11 février 2007

Un peu de dureté dans ce monde de tendres

Un dimanche tranquille s'annonce. Tiens, j'ai envie d'écrire. Surprenant, n'est-il pas ? Et dans un genre un peu plus léger que ces derniers jours, de préférence [pfff, qu'est-ce que je me trouve sérieux avec mes développements détaillés sur les grandes questions de la vie...]

Hop, un coup d'oeil sur mes boites à mails. Rien. Normal, peu de gens écrivent en pleine nuit et mes quelques connaissances de l'autre bout du monde ne me racontent pas leur vie tous les jours. Hmmouais... il y a quelques années je me réjouissais de trouver régulièrement, au réveil, un message enjoué d'une correspondante tout à fait privilégiée. C'était un réel bonheur et un sourire pour la journée. Mais la roue tourne, le temps passe, et tout peut changer... That's life !

Zioup, je vais faire un tour du côté des éventuelles mises à jour dans mon cercle bloguien. En ce moment ça crépite du côté des "Ricochets des blogueurs". Avec une quarantaine de participants l'heureuse initiative montre son succès. J'aime lire ces fragments de vies tellement différents et pourtant tissés de ressemblances. Je me marre en lisant l'exercice audacieux qui consiste à parler de l'année de sa naissance. Phrase rituelle « Évidemment je n'ai pas de souvenirs de cette année-là ». Ben tiens... tu m'étonnes !

Une fois lu le dernier arrivage, je me mets devant mon clavier...

Allez, quelques nouvelles du front:


Depuis que mon épouse Charlotte a quitté la maison les dimanches ont nettement changé. Jusqu'à cet automne la maison retrouvait son plein remplissage avec le retour de nos deux grands étudiants. J'étais souvent invité à sortir de ma masure pour partager un ou deux repas. La famille était alors réunie presque comme avant.

Charlotte n'étant plus là, les enfants ont bien perçu qu'il manquait la vie qu'elle apportait. Hé... une femme à la maison ça s'agite, ça s'occupe de tout le monde, ça parle avec chacun. Son absence change beaucoup de choses. Et de la même façon, lorsqu'ils vont chez elle, c'est leur papa qui manque. Un papa ça plaisante, ça parle de sujets sérieux, ça bricole. Et puis un couple uni ça papote, ça se taquine, ça se dispute... Désormais nos rencontres se font différemment, par petits groupes à géométrie variable. Parfois j'ai un, ou deux enfants chez moi. Rarement les trois. Aujourd'hui c'est un seul. De temps en temps on se retrouve au complet pour un repas chez Charlotte ou chez moi, mais c'est finalement assez rare.

Tout cela se produit à un âge où, de toutes façons, les enfants prennent une indépendance croissante. Parfois je ne vois pas les aînés pendant deux ou trois semaines. J'ai l'impression que ces périodes se sont accentuées avec la scission du couple. Les enfants ne le cachent pas, d'ailleurs : « c'est plus pareil ».

En apparence ils ont bien accepté notre séparation, mais en profondeur ils ont tous fini par reconnaître que ça les avait déstabilisés. Et comment ne pas les comprendre ?

Pour autant je ne ressens pas cela comme une situation vraiment dommageable. Eux ne s'en plaignent pas non plus. C'est aussi une saine façon de s'émanciper, à un âge où il devient temps de le faire. Les deux aînés ont des tas d'activités avec leurs multiples copains et copines et semblent heureux de cette liberté. Quant au benjamin, qui vit essentiellement avec moi, s'il regrette un peu cet isolement il semble aussi trouver son équilibre à l'extérieur. Peut-être que cette séparation parentale est aussi un coup de pouce involontaire qui les aide à grandir ?

Oui... je regarde les bons côtés, parce que je crois qu'il y en a.

Plus inattendu, mais tout à fait rassurant, ces trois grands ados s'entendent pour se retrouver et faire des choses ensemble. Une fratrie qui s'entend bien, ayant des activités autonomes, que vouloir de plus ? Nos enfants vont bien, ont des projets, des relations, du dialogue... finalement tout va bien !

Ah ben oui, hein, une séparation ce n'est pas forcément une catastrophe ! Qui sait si ce n'est pas, parfois, une chance ?

Charlotte, de son côté, à aussi une vie de plus en plus indépendante. On ne se voit guère qu'une fois par semaine, au mieux pour une heure ou deux. On s'entend bien, évitant toutefois de trop parler de "nous". C'est du "moi-je" du "famille", ou tout autre sujet extérieur au "nous". De temps en temps elle me regarde avec un sourire gêné et vaguement coupable lorsqu'elle me dit qu'elle s'éclate en ayant beaucoup d'activités. Elle découvre la liberté d'être femme, maintenant que son rôle de mère s'amenuise. Elle pense d'abord à elle et ne veut plus se laisser envahir par les autres. Elle ne veut pas être gentille et dévouée. Elle semble tout à fait heureuse de sa nouvelle situation de célibataire. Tant mieux, cela a effacé la culpabilité que je ressentais d'avoir été à l'origine de notre séparation.

D'ailleurs, avec le temps, je la soupçonne aimablement d'avoir saisi cette occasion pour franchir un pas qui semblait la démanger plus qu'elle n'en avait conscience. En tout cas elle a su optimiser la situation et en tirer des avantages ! Et elle a eu raison.

Bon... j'ai parfois un léger pincement au coeur en la sentant de plus en plus distante. Toujours accueillante et chaleureuse, certes... mais différemment. Elle a pris ses distances et entend bien les conserver. Quitte à en marquer les limites sans concessions. Elle est amie et seulement amie. Un peu surprenant quand on a passé un quart de siècle ensemble, dormi dans les bras l'un de l'autre, s'être soutenus dans les difficultés.

Ceci dit le pincement ne dure qu'un instant. Dès que je ne suis plus en sa présence "j'oublie". Je n'ai pas de regrets et trouve bien des avantages dans la liberté de mouvement. D'ailleurs, n'est-ce pas ce que je cherchais ?

J'ai accepté cet éloignement progressif, que j'appelle désintimité, bien que je ne vive pas les choses de la même façon. Je ne ressens pas ce besoin de se couper d'une relation intime, quelle que soit son évolution. Mais je me suis adapté. Accepter, là est la libération des tourments ! Je m'abstiens donc de tout geste de tendresse autre qu'un effleurement rapide, ou une main furtivement posée sur son épaule. Je garde spontanément une attention, une prévenance, une gentillesse... qui auraient vite tendance à l'agacer. Elle ne veut plus de ce genre de rapports entre nous. Elle a besoin de se sentir au-to-nome, même si, vaincue par son manque de pratique, elle finit de temps en temps par me téléphoner pour que je lui rende un service de bricolage. Je me fais alors un plaisir de répondre à sa demande, mais pas dupe de cette entorse qu'elle fait à ses principes.

Parfois je me dis que si j'avais à son égard l'attitude qu'elle à envers moi elle comprendrait que ce n'est pas toujours très tendre. Je crois qu'elle le sait... A moi aussi d'apprendre à ne pas être trop attentionné si je ne veux pas que ma sensibilité soit atteinte. J'apprends à être moins généreux en affection, pour ne pas souffrir de la non-réciprocité. Donner, avec plaisir... mais sans me fragiliser.

Ouais... j'ai souvent trop donné... Ou mal donné.

Finalement j'apprends à être un peu dur, et c'est probablement une bonne chose. Ça me sera certainement utile pour la suite de mon existence. J'aurais sans aucun doute moins de craintes de me faire blesser et pourrais plus facilement m'ouvrir aux autres...

Aimer les autres, oui, mais pas au delà de mes limites.

Commentaires
P
Forestine, cette attention aux autres est à double tranchant. Avec les fragiles elle peut être aidante, avec les "forts" elle peut se retourner contre celui qui l'émet. En de multiples circonstances je m'en suis pris plein la gueule avec mon attention aux autres...<br /> <br /> Ouais, je m'endurcis ;o)<br /> Mais je pense garder le discernement nécessaire pour rester tendre avec ceux ou celles qui apprécient ce genre de rapport.
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F
On te sent toujours très attentif dans ton rapport aux autres et ton billet dégage un certain soulagement et une sérénité qui se gagne au jour le jour (la paix intérieure;-?).<br /> Je n'ai pas pu réprimer un sourire en lisant que tu apprends la dureté... toi qui sembles toujours si tendre même quand tu te surveilles :)<br /> Mais bon, c'est juste un sourire que je t'envoie, et mon soutien avec. En effet il faut se protéger...
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