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Alter et ego (Carnet)
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22 décembre 2007

Les cadeaux obligatoires

Suite à mon précédent billet autour du non-exploit qui consiste à résister au conditionnement noëlien, le commentaire de Kyrann pose cette question : « comment faire pour éviter les cadeaux « obligatoires » ? »

Ben oui : qu'est-ce qui fait qu'on puisse se sentir "obligé" d'offrir quelque chose ?
Qu'est-ce que je risque si je ne me plie pas à l'obligation.
Finalement, de quoi ai-je peur ?

Mais d'abord, c'est quoi un cadeau ? Je crois qu'il y en a  de deux sortes : le don et l'échange. Les premiers sont un signe d'affection spontanée (je te le donne parce que j'en ai envie). Les seconds sont utilisés comme lubrifiants relationnels (je te le donne à titre d'échange de bons procédés). Les deux types de cadeau se confondent souvent, et c'est à mon avis ce parasitage qui peut rendre leur utilisation compliquée.

Si je donne "gratuitement", je ne calcule rien. Je n'attends rien en retour. Je ne risque donc pas d'être déçu. Ce sont des cadeaux dont la valeur réside dans l'acte de don, sans notion de valeur.

Si je donne en attente de réciprocité, il y a une question de valeur, d'équivalence. En fait je ne donne pas : j'échange. J'attends un retour. Et si je ne reçois pas autant que la "valeur" (affective, symbolique, ou pécunière) que j'ai mise dans le cadeau, je peux être déçu.

Les premiers donnent de l'amour, les seconds en attendent. Voire en demandent...

Pour ma part les "cadeaux" de la seconde catégorie me mettent mal à l'aise. Je ne me sens pas vraiment libre dans ces enjeux d'échange, parce que la valeur que chacun attribue n'est pas équivalente. Tant qu'on reste dans le symbolique, le non mesurable, ça reste simple. Dans l'affectif, ça devient déjà un peu plus compliqué. Mais la valeur qui me dérange le plus est celle qui est introduite par l'argent. Argent et amour ne font pas bon ménage.

Pour me simplifier la vie j'ai fait en sorte de ne plus me sentir obligé de faire des cadeaux. Ce qui implique, par réciprocité, que j'ai exprimé le souhait de ne plus en reçevoir. Je n'ai pas besoin de cadeau matériel pour savoir l'affection que l'on me porte, et j'espère que celle que je donne est suffisamment éloquente.

Bon... dans la famille élargie ma sortie du cercle des cadeaux mutuels à fait grincer quelques dents, au départ, mais je constate que finalement tout le monde à cessé de s'en faire ! Sauf ma mère, qui ne peut s'empêcher d'offrir un petit quelque chose à tous...

Avec mes enfants je procède de même. Je n'imagine pas de ne pas leur offrir quelque chose "en plus". Quelque chose qui est choisi, signifiant, et s'inscrit dans un esprit de transmission de valeurs personnelles (morales, intellectuelles, etc.). Mais je ne m'y sens pas du tout obligé. Par contre je n'offre rien à ma mère, et je n'en apprécie que davantage ses petits cadeaux, qui ne s'inscrivent pas dans une attente de réciprocité. Avec Charlotte la question s'est toutefois posée ces dernières années, par rapport au symbolisme de la séparation. Mais j'ai fait comme je le sentais...

Quel risque ai-je pris en me soustrayant de l'obligation des cadeaux ? Celui de contrarier les personnes qui ont besoin d'en recevoir pour se sentir aimées ! Le risque de susciter leur ressentiment à mon égard. Mais aussi la chance d'établir des rapports plus sains, fondés sur le fond plutôt que sur les apparences (songez au fait que les cadeaux sont souvent déballés en public...). J'ai choisi d'avoir des rapports plus authentiques. Jusqu'à ce jour, je ne crois pas avoir perdu l'affection de qui que ce soit à cause de ça...

Quelle peur ai-je affronté en agissant ainsi ? Celle d'être rejeté, celle de perdre l'affection de personnes que j'apprécie. En fait, je me suis libéré de ce qui peut pervertir les relations. Je crois y avoir trouvé quelque chose de plus vrai.

Cependant tout cela me demande un réajustement constant car je reste soumis à la crainte de ne pas être apprécié (crainte du rejet, etc...). Les cadeaux de la vie quotidienne sont nombreux, qu'ils se situent dans un coup de main, une écoute, une attention, ou tout simplement un sourire. Ce peut être au travail, en relations d'amitié, ou à la maison (pour ceux qui vivent en couple ou en famille). Qu'ils soient du registre du don ou de l'échange demande parfois à être discerné pour ne pas entrer malgré soi dans des logiques de "dettes". Je pense aussi à des "cadeaux" un peu particuliers, qui nous intéressent tous ici : les commentaires sur les blogs. Dans quel mesure sont ils généreux et désintéressés ? Dans quel mesure ne trahissent-ils pas une attente de retour ? Ou un "affichage" de ce qu'on a envie de montrer de soi (n'oublions pas qu'eux aussi sont visibles "en public"...) ? Hmmmm, pas forcément évident de le savoir, hein ? À ce titre les relations via internet, avec leur proximité distante, sont une bonne école d'apprentissage de l'authenticité...

Commentaires
D
Bonjour Pierre,<br /> Savez-vous que je ne me suis permis ce commentaire singulier que parce que je tiens bien votre blog pour un espace de dialogue, vivant, le contraire (rare, je le crains) d'une réflexion figée et péremptoire ?<br /> L'ouverture et la générosité de votre réponse ne me surprend donc pas. <br /> Je vois que beaucoup a été écrit depuis mon dernier passage, alors je m'y plonge joyeusement, bonne manière de commencer heureusement cette année que je vous souhaite fervente, riche en belles rencontres et... ma foi... en tout ce que vous voulez !
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P
D&D, il est vrai que mes billets demandent souvent un développement et une objectivation. C'est pourquoi j'apprécie les commentaires, qui permettent une petite réflexion en commun, et qui m'est souvent profitable. Mes billets ne sont souvent qu'une amorce qui gagne à être complétée :o)<br /> <br /> Pour le reste... bigre, vous touchez juste !<br /> « accepter d'être aimé, au fond, tel que cela nous échappe et ne nous appartient pas précisément ». Voila qui fait écho à d'autres réflexions que j'ai en cours...<br /> Je ne pensais pas être atteint par ce qui est une crainte d'être ("trop") aimé, que je sais exister chez d'autres. « Tentative de maîtrise et de neutralisation de l'amour reçu », c'est tout à fait ça. Le problème est fort complexe, et se manifeste de diverses façons. Cela recoupe quelques idées de mon billet du 28/12.<br /> <br /> La légereté... Elle ne me semble possible que lorsque tout est clair. Or je suis souvent dans une certaine gêne vis à vis des cadeaux (en général, pas seulement ceux des rituels). Donc la légereté est rare, mais pas inexistante. Elle existe lorsque je ne sens pas d'enjeu de "pouvoir", ou de "possession", voire "d'achat" de mon affection. Voila pourquoi c'est assez simple avec mes enfants ou lorsque je sens un amour réciproque et équivalent (ma façon d'en parler montre que je place beaucoup d'enjeux derrière tout ça...).<br /> <br /> Pour la remarque de Marinet, que je n'ai pas trouvée très agréable, j'atendais d'en savoir plus...<br /> Effectivement ce que je propose avec mes réflexions n'est jamais quelque chose de figé. Je lance mes idées et suis prêt à les remettre en question s'il m'est opposé un complément, ou un argument contraire. Je n'ai aucune certitude dans ce que j'énonce, même si cela peut parfois en avoir l'air. Sans doute ma façon de m'exprimer...
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D
Pour shématiser, je préfère/comprends davantage cette fois vos réponses aux commentaires que le billet lui-même, que je trouve sans doute trop court. <br /> Je me sens très proche en revanche du commentaire de Coumarine. A l'exception de la question de l'orgueil, relevant à mes yeux de votre billet "comprendre au-delà des mots". <br /> Le perfectionnisme, oui, je vous suis. Mais la question du perfectionnisme me semble en poser deux autres qui manquent relativement à l'appel, particulièrement au coeur de votre billet.<br /> 1/ la difficulté à accepter d'être aimé, au fond, tel que cela nous échappe et ne nous appartient pas précisément... Comment dire : être perfectionniste c'est aussi tendre à créer des conditions d'acceptation rationnelle, et pour ainsi dire rationnées, de l'amour. Je me demande s'il n'y a pas une tentation de maîtrise, de neutralisation de l'amour reçu. J'accepte d'être aimé parce que je fais au mieux. Peut-être même quelque chose comme : je fais au mieux du mieux et c'est pour cela que l'on m'aime. Donc on ne m'aime pas. Vraiment. Plus de problème d'acceptation. <br /> 2/ la question de la légèreté. <br /> Sans même parler de comportement social, et certainement pas en versant dans la désinvolture (mais je crois que vous êtes assuré tout risque contre ça), la vraie légèreté... c'est un cadeau particulièrement précieux, aussi. <br /> Ou alors je butte là-dessus parce que le perfectionnisme je pratique, et l'absence de légèreté aussi :-)<br /> Enfin, il me semble que Marinet vous reproche d'ériger en "principe de morale" ce qui ne serait peut-être qu'un petit arrangement avec vous-même. Je ne suis pas vraiment d'accord, d'ailleurs je me trompe peut-être dans ma lecture, je n'aime pas le ton de son commentaire, mais votre réponse me semble... trop courte. <br /> Mais je vous promets que malgré mes travers, je ne trouve pas toujours tout trop court :-)<br /> Bon week-end à vous Pierre.
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P
Ah, je vois que vous avez bien commenté pendant mon absence :o)<br /> <br /> Kyrann : orgueil, narcissisme... c'est possible. Il est difficile de savoir ce qui, dans nos rapports à l'autre tient du narcissisme et de l'altruisme tant les deux s'imbriquent souvent (ne me sens-je pas "beau" quand je fais plaisir à l'autre ?).<br /> Par contre, le désir de bien faire (perfectionnisme, exigence...), est incontestablement présent. Tout dépend du juste dosage entre le trop et le pas assez.<br /> <br /> L'exigence pour les cadeaux que je reçois... c'est moins évident. Il y en a certainement une part, mais c'est surtout la gêne ressentie devant le cadeau qui tombe "à côté de la plaque". Je reste toujours sensible au geste, mais si le cadeau me laisse froid, voire me dérange... ben c'est gênant.<br /> <br /> Volonté de reste indépendant, oui, certainement. Comptes à régler avec les cadeaux et les marques d'amour, oui aussi. Peut-être tout simplement parce que je ne me sens pas correspondre au modèle d'authenticité vers lequel je voudrais tendre. En tout cas il m'est fort complexe de démêler les raisons profondes de ma gêne :o)<br /> <br /> Pour le non-dit, une piste envisageable : mon père m'a témoigné de son amour par des conditions matérielles agréables (vacances, cadeaux)... mais cela n'a jamais pallié au déficit d'amour exprimé par la tendresse. En même temps il pouvait être abusivement autoritaire, dénigrant, blessant, et conditionner sa "gentillesse" au fait d'être un enfant bien sage et bien obéissant. Or être sage pour faire plaisir (cadeau ?) n'encourage pas à devenir soi.<br /> <br /> Valclair, j'ai la même sensibilité aux cadeaux spontanés, offerts de façon inopinée.<br /> <br /> Christine, tu soulèves un aspect non négligeable du problème : avoir les moyens de faire des cadeaux, lorsqu'ils sont achetés. Or, qu'on le veuille ou non, la valeur compte quand même et peut indiquer de quelle cote d'amour on bénéficie...<br /> <br /> Pour ce qui est de la quantité de cadeaux offerte aux enfants, profusion et gaspillage, c'est un autre problème. Quant aux cadeaux tirés au sort entre adultes, c'est le système qui avait été institué dans ma famille et dont je me suis "sorti".<br /> <br /> Marinet, je ne comprends pas bien le sens de ta remarque...<br /> <br /> Merci pour les pensées de noël de chacun, et les miennes en retour :o)
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C
Je crois que ce qui choque le plus ne sont pas les cadeaux que les adultes se font mais la quantité de cadeaux faites aux enfants qui ne s'y intéressent finalement que le temps de les ouvrir...Certaines familles ont trouvé la solution, des noms sur des petits bouts de papier, chacun tire au sort un nom et ne fera de cadeau qu'à cette personne et ainsi de suite. Chacun ne fait donc qu'un seul cadeau et n'en reçoit qu'un seul... Bon ok, c'est pas terrible et on entre dans l'obligation totale mais pour des familles pas très riches c'est une bonne solution...
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M
Pour moi, c'est du bla-bla tout ça..<br /> Tu peux ne pas aimer faire de cadeaux, ou avoir peur de ne pas être à la hauteur des attentes de la personne à qui tu pourrais faire un cadeau,et du coup, plutot que d'être mal à l'aise d'être passé à coté, et bien, tu ne fais rien et tu ne reçois rien..<br /> C'est bien dommage car un cadeau n'est pas FORCEMENT obligé et fait souvent plaisir...<br /> Mais au moins comme ça, pas de casse-tête à trouver quelque chose, ni de deception...
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C
Je n'aime pas cette obligation de faire des cadeaux alors que j'en fait souvent simplement parce que j'en ai envie et lorsque j'ai les moyens... ;o)<br /> Je te souhaite un très JOYEUX NOEL ainsi qu'à tes lecteurs... parce que vous le valez bien et ce sera mon seul cadeau pour vous...quoique...il y en a un sur mon blog aussi ;o)
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V
Je suis pour ma part bien d'accord dans ma tête avec tes réflexions, Pierre. <br /> Mais dans ma pratique je suis loin de fonctionner comme ça.<br /> Je suis terriblement contradictoire là dessus, comme "fournisseur" de cadeaux mais aussi dans mes propres attentes de "récepteur". Et une part non négligeable de mes ressentis difficiles autour de Noël vient précisément de ma difficulté à gérer tout ça en accord profond avec moi-même.<br /> Par contre j'attache beaucoup de prix aux cadeaux non obligatoires, qui ne sont liés à aucune occasion particulière de type Noël ou anniversaire, ceux qui surgissent à l'improviste parce qu'on pense à la personne à ce moment là en se diant "tiens, ça c'est pour lui ou pour elle". Ces cadeaux là , j'aime les faire et les recevoir, ils valent par la pensée que l'on a eu de l'autre, par le signe d'une affection réelle, non obligatoire justement.<br /> Et je suis bien d'accord aussi qu'il y a une part de donner/recevoir dans la logique des commentaires chez beaucoup qui s'apparente à l'échange de cadeaux et peut prendre aussi pour certains ce caractère d'échange obligatoire. Mais là-dessus je me sens pour ma part plus à l'aise, là au moins je me sens dans ma pratique conforme à ma pensée, bien plus que pour les cadeaux de Noël.<br /> Et là dessus bon Noël Pierre à toi et à tous ceux de nos amis qui passent par ici.
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K
Je rejoins Coumarine dans son avis. C’est une part d’orgueil… et j’ajouterais peut-être de narcissisme. Quand tu dis que tu as peur de « tomber à côté »… c’est sans doute parce que tu veux trop bien faire. Est-ce que cela ne correspond pas à une envie de ne pas montrer tes défauts que de ne pas vouloir accepter que tu puisses se tromper en faisant un cadeau comme tu peux se tromper dans toute occasion ? Comme on dit : personne n’est parfait ! :-)<br /> C’est aussi être très exigeant que de vouloir des cadeaux qui nous correspondent bien, de la part des autres… Il y a déjà le geste qui compte… et le choix… même si je suis d’accord que la notion de valeur pécuniaire est malsaine dans les cadeaux…<br /> Je vois aussi une volonté d’indépendance dans le fait de ne rien devoir à personne.<br /> Mais si tu raisonnes vraiment de la façon dont tu le dis (que les cadeaux sont gratuits et que tu n’attends rien en retour), cela ne devrait pas te poser problème d’agir en fonction de ce que tu es. Ou alors c’est que tu as des doutes ou des comptes à régler avec les cadeaux et surtout les marques d’amour. Une affaire de non-dit que tu évoques en filigrane ?<br /> <br /> Il faut dire que moi qui apprends à « offrir » … que ce soit des cadeaux ou moi-même… je mène un peu toutes ces réflexions aussi. Donc merci à toi du cadeau ! ;-)
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P
Coumarine, tu me secoues et j'aime ça :o)<br /> <br /> Je ne crois pas qu'il s'agisse d'orgueil. Je crois que ça se situe davantage dans ce qui lie "cadeau" et "amour". Quoique... est-ce que ne pas vouloir de cadeaux, marques d'amour, ce ne serait pas assimilable à refusé d'être aimé ? Va savoir...<br /> <br /> Peut-être aussi un refus de devoir rendre un amour (cadeau) qui m'indisposerait ?<br /> <br /> Ce n'est pas que je refuse les cadeaux, c'est que je triuve plus simple de ne pas en recevoir. En revanche j'accepte les cadeaux de mes enfants, parce que me connaissant ils ne se sentent pas obligés et le font par plaisir. Je suis toujours touché par leurs cadeaux, et ne doute pas de leur sincérité ni de leur amour. Pour mla mère c'est un peu différent : si je ne doute pas de son amour... je ne sais pas forcément s'il n'est pas chargé d'attentes de retour. Or mon amour je le donne... mais je déteste le sentir demandé. En fait je recherche un amour qui tende vers la générosité gratuite, un amour inconditionnel, quoi...<br /> <br /> Tout cela va bien au delà du simple cadeau, qui n'est en fait qu'une symbolisation de l'amour. C'est aussi pour cela que je préfère le cadeau spontané d'une invitation au restaurant, d'un mot gentil, d'un sourire, d'une attention. Parce que je n'ai alors aucun doute sur l'authenticité de l'amour qui m'est témoigné.<br /> <br /> D'ailleurs je reste très touché par le geste de certains amis qui m'ont ainsi offert des cadeaux immatériels tels que des mots, des courriers, ou des repas au restaurant lorsque j'étais dans la dèche. Ces cadeaux-là me vont droit au coeur et je crois que je sais les accepter sans ambiguïté.<br /> <br /> Merci beaucoup de m'avoir permis de préciser tout cela (ben oui, tiens, tu m'a fait un cadeau, là...) ;o)<br /> <br /> Comme le sont la plupart des commentaires que je reçois ici.
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