Je ne t'aime plus...
Il y a quelques jours, j'ai lu chez Kyrann un texte où elle parle de son mari « demandant que je lui dise que je ne l’aime plus ». Cette phrase m'a replongé quatre ans en arrière, dans le vécu d'expériences qui ne furent ni simples, ni agréables.
Dans la première je me suis trouvé devant cette nécessité de dire une vérité qui, je le savais, aller faire très mal. Je ne pouvais plus éviter de dire les vrais mots, chargés de tout leur sens et sans échapatoire. « Je ne t'aime plus », avais-je asséné, en pleurs, tellement désolé de faire autant de mal à celle que... j'aimais encore. Je ne l'aimais plus comme avant, je n'étais plus "amoureux", mais je l'aimais trop pour lui cacher cette réalité. En fait j'avais pris un tassement sentimental comme la fin de l'amour que j'avais pour elle, ce en quoi je me trompais. J'étais encore trop soumis à des définitions étriquées de l'amour....
J'avais voulu que mes mots soient clairs et ne la laissent pas dans l'espoir d'un changement. Il y avait quelque chose d'irréversible dans mon cheminement. C'est à partir de là qu'elle a pu se déterminer en toute connaissance des faits et s'orienter vers un nouvel avenir. Pas sans difficultés, ni pour l'un ni pour l'autre, c'est évident.
Dans la seconde expérience celle dont j'étais amoureux ne m'a jamais dit « je ne t'aime plus ». Cette absence des mots nécessaires m'a privé de la délivrance dont j'aurais eu besoin pour saisir la réalité de son éloignement sentimental. Je ne comprenais pas ce qui se passait et, m'accrochant au moindre fragment de flou, j'ai espéré très longtemps qu'il s'agissait d'autre chose que la fin de son amour. Il m'a fallu des années pour remonter la pente, déduire ce qui n'avait pas été dit, et construire une nouvelle réalité à coup d'explications plausibles.
Le manque de mots, me laissant dans une incertitude douloureuse, faisait que je ne pouvais pas me déterminer. J'aurais bien évidemment eu besoin entendre ce « je ne t'aime plus » qui, me déchirant, n'aurait fait [très] mal qu'une bonne fois pour toutes. Je reconnais que je ne l'ai pas demandé, redoutant trop de l'entendre... Cependant il y a eu un indéniable avantage à ce silence : son non-sens m'a poussé à explorer en tous sens pour en trouver. J'ai beaucoup appris de cette exploration. D'un manque j'ai tiré un avantage.
Fort de ces expériences croisées, je sais maintenant quelle est ma préférence : la vérité brute. Sans qu'elle soit forcément brutale puisqu'elle peut être adoucie, accompagnante, écoutante. Ça peut paraître contradictoire, mais ça ne l'est pas tant que ça : il faut encore aimer pour dire « je ne t'aime plus ». Pour délivrer l'autre de ce lien unique qui s'est noué avec des « je t'aime ». Ne serait-ce que parce qu'en disant « je ne t'aime plus », il y a reconnaissance implicite de l'amour qui a été. Comme un dernier souffle.
Pour la petite histoire la première relation s'est muée en amitié, la seconde s'est enfoncée dans un silence absolu qui, à ce jour, dure encore...
Détachement