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Alter et ego (Carnet)
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22 janvier 2009

Liens d'indépendance

Lorsque je regarde ma façon d'être avec les autres, aujourd'hui, je songe souvent au parcours qui m'y a mené. Comme si je n'avais pas encore vraiment endossé cet habit neuf, tellement différent de celui que je pensais devoir porter jusqu'à la fin de mes jours...

C'est dans la peau d'un ours taciturne [j'exagère à peine...] que je suis entré dans le fabuleux monde d'internet, il y a une dizaine d'années. Une révélation pour l'handicapé social que j'étais, plutôt introverti et silencieux. Je fus immédiatement fasciné par la facilité avec laquelle je pouvais entrer en relation avec des inconnus [en l'occurence il s'agissait surtout d'inconnuEs...] et me suis engoufré dans cette brèche insoupçonnée. C'était le temps de la découverte, de l'exploration de diverses formes de communication, avant que l'écriture en ligne ne devienne mon accaparante compagne.

Il s'en est formé, en ces espaces virtuels, des "relations" ! Autant de personnes avec qui il y eut des échanges privés qui semblaient s'installer, des ouvertures de la bulle intime de chacun durant parfois des mois. Combien y a t-il eu de ces sympathisations à distance ? Plusieurs dizaines. Peut-être une cinquantaine. Oui... mais aujourd'hui combien existent encore ? À vue de nez : une bonne quinzaine. Peut-être une vingtaine. Avec quelques véritables liens qui, se révélant fiables, sont devenus amitiés précieuses. La plupart avec des personnes rencontrées en vrai de vrai. Mais d'autres relations restées jusque là virtuelles pourraient probablement atteindre ce statut si le passage au réel se réalise un jour.

En entrant dans ce monde de communication exacerbée j'étais naïf et idéaliste. J'ai donc vécu quelques déceptions. Normal...

Surprenantes et déstabilisantes au début, leur répétition a fini par m'y rendre moins sensible. J'ai appris, au fil des ans, à vivre les échanges au jour le jour. Dans l'ici et maintenant, selon la formule consacrée. Et c'est très bien ainsi ! L'intégrant dans mon mode de fonctionnement j'ai pu transférer cette façon de vivre les relations au monde réel et, progressivement, aller plus au devant des rencontres. Je ne me considère plus comme un ours associal, quoique je reste, comme le pointait mon billet précédent, d'un tempérament volontiers solitaire. Je m'épanouis bien davantage dans les rapports intimistes qu'en groupe.

C'est en lisant un billet de Christine autour des ruptures, qui laisse transparaître son amertume, que je me suis rendu compte que j'avais quitté le domaine des déceptions relationnelles. Je me souviens très bien de ce sentiment de désappointement, tristesse et rage mêlées, en voyant disparaître, parfois sans la moindre explication, des personnes avec qui s'était établi un début de relation amicale, une sympathie, une affinité. Bon... en écrivant cela je me souviens avoir perçu que certains de ces échanges n'étaient pas dénués de sentimentalité. La non-réciprocité à probablement tué dans l'oeuf ce qui ne trouvait pas les conditions favorables à une éclosion. Il semble que j'ai parfois séduit sans vraiment m'en rendre compte [bien que ce soit généralement resté non élucidé]. Moi même j'ai été séduit par des écrits, des idées, des ressemblances, des apparences d'attirance. Mais je sais à quel point le média internet favorise l'imaginaire, au détriment du réel...

Je n'aurais pas la prétention d'affirmer que je n'ai jamais laissé s'effilocher des liens. Il m'est arrivé de laisser le silence prendre une place croissante sans rien faire pour le contrer. Je sais maintenant que les rencontres ne sont parfois que conjoncturelles. D'ici à penser qu'elle ne sont que temporaires et que viendra le moment où elles ne seront plus suffisamment stimulantes, il n'y a qu'un pas. Je me demande cependant si cette conception des choses ne pousse pas à le franchir un peu trop facilement, ce pas...

Quoi qu'il en soit, fort de mon bagage expérienciel, je me vois vivre aujourd'hui chacune de mes relations au jour le jour. J'ai été transformé en traversant mes désillusions. Apre et cruel, tel une épreuve initiatique, ce rite de passage m'a été nécessaire pour acquérir une certaine consistance. Illusions perdues qui font que je n'ai désormais plus à m'en protéger : j'ai cessé d'y croire. Je me sais pourtant avoir conservé une certaine candeur sentimentale et affective, que je pourrais qualifier de militante, mais que je m'efforce de débarasser de toute trace d'infantilisme (dépendance). Je crois toujours en la volonté de tenir, qui crée les liens véritables. J'y crois fondamentalement, sans faille. C'est ma façon d'être. Mais je suis devenu prudent... Je sais que tout le monde ne partage pas mes conceptions. Je reconnais que j'ai appris à me protéger un peu. D'abord avec quelques regrets et une certaine tristesse, puis en acceptant que le monde se révéle être différent de ce que mes idéaux et rêves imaginaient. Alors puisque je ne pouvais pas changer le monde, c'est mon regard sur lui devait changer... Je me suis adapté. A tel point que je ne sais plus vraiment ce que je suis...

La question des relations et des liens, qu'ils soient de nature amicale ou sentimentale, est une des trames principales de mon "oeuvre" [wow !] diaristique. Sujet dont l'importance s'estompe à force de passer et repasser sur les chemins qui s'y croisent. D'autres pistes devraient trouver la place d'émerger, probablement plus diversifiées, moins chargés émotivement. Je continue néanmoins à tourner encore autour de ce pôle, autour duquel s'est infléchi mon parcours. Fortement marqué par mon vécu j'ai choisi de faire des relations sentimentales, et plus spécifiquement de celles du couple (au sens large), l'axe majeur de ma réorientation professionnelle.

Si dans ce billet je reviens une fois de plus sur le sujet c'est parce qu'au cours d'une récente session de formation, un homme au délicieux accent québecois nous présenta la distinction qu'il fait entre des termes plus ou moins confondus: communication, écoute, relation, lien.

J'ai bien aimé ce qu'il disait du lien : il ne peut naître que s'il y a relation mais n'a pas besoin de relation pour perdurer. Et de nous parler des liens qui demeurent entre des personnes qui ne sont plus en relation : séparations, fâcheries, décès. Le lien n'existe que lorsque l'affectif est convié, ce qui n'est pas le cas des relations. Je suis en relation avec mon banquier, par exemple...

Si je me fie à cette acception des termes, je devrais plus souvent parler de liens lorsque j'évoque certaines relations d'amitié, qu'elles aient pris naissance sur internet ou dans le monde réel. Peu importe le lieu et les circonstances : les disparitions qui m'ont le plus affecté sont évidemment celles qui étaient le plus chargées d'affectif. Ce qui explique pourquoi aujourd'hui je me tiens très à distance de l'affectif, tout en cherchant des échanges qui se dérouleraient avec une intimité comparable. La proximité sans risque de fusion, en quelque sorte. Le lien sans la dépendance.

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220_2048

Sable et blocs de lave

Commentaires
P
Ah mais non Christine, c'est un cercle vertueux :o)<br /> Cette souffrance de la part de ceux qui s'attachent est la seule façon de ne plus en souffrir... s'ils veulent bien s'interroger sur ce qu'elle exprime. C'est le trop d'attachement qui est souffrance et duquel il faudrait apprendre à se détacher.<br /> <br /> Quand tu parles de « relations dont ont sait par avance qu'elles ne dureront pas », je me demande si on peut avoir cette assurance... <br /> D'une part je crois que souvent on ne sait pas ce qui peut durer ou pas, et d'autre part si on est vraiment sûr que ça ne durera pas, alors je ne crois pas qu'on puisse investir le lien de la même façon. Partir avec l'idée qu'une relation ne durera pas c'est aussi la programmer en fonction de ça, donc la priver d'accéder à certaines dimensions, il me semble.<br /> <br /> 'fin j'sais pas trop... j'me demande...
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C
Pierre, c'est un cercle vicieux que tu décris. Tu te détaches pendant que d'autres s'attachent qui se détacheront plus tard et feront souffrir les nouveaux qui s'attachent... ;)<br /> Il est pourtant évident qu'il y a aussi une forme d'habitude mais aussi de sérénité par expérience lorsqu'on sait que certains liens ne cesseront jamais d'exister quel que soit la durée du silence... L'expérience c'est peut-être aussi prendre du recul par rapport à certaines relations dont on sait par avance qu'elles ne dureront pas.
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P
Il paraît que la suprême sagesse, Christine, serait de ne s'attacher à rien... En tout cas ne pas s'attacher à des signes de contact c'est certain ! Encore faut-il avoir atteint ce stade de confiance en soi qui le permet.<br /> <br /> Coumarine, je me souviens de ton texte. Moi-même j'ai a plusieurs reprises évoqué ce sujet au fil des ans et si je prenais le temps de me relire je pense que je percevrais une évolution notable dans mes idées. Vers un détachement croissant, précisément, qui me mène vers une sérénité face aux situations que je décris.
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C
Pierre, j'ai évoqué sur mon blog ce que tu dis au sujet des "disparitions" inexpliquées sur la blogosphère...et des déceptions pour le blogueur qui y sont liées..
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C
"il ne peut naître que s'il y a relation mais n'a pas besoin de relation pour perdurer" j'aime bien aussi cette phrase et au final, elle est tellement vraie. Il m'est arrivée de ne plus avoir de contact avec une de mes connaissances virtuelles sans réellement comprendre pourquoi et ce durant de long mois. Et puis un jour, le lien a repris comme si on s'était quittés la veille. Et puis le lien est reparti jusqu'à ce qu'il réapparaisse un jour au détour d'une envie, d'une idée, d'un mot, d'un rien... Je crois que dans le virtuel comme dans la vie réelle, il ne faut pas s'attacher au nombre ni à la périodicité des contacts mais simplement aux fondements de la relation, à sa qualité et surtout, ne pas passer son temps à faire des scènes parce que l'autre n'a pas répondu à nos mails ou à nos messages. L'important n'est-il pas de profiter du moment ? <br /> Merci Pierre, pour la pub ;o).
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