À l'insu du mari
Depuis deux ans j'ai de nouveaux voisins. Ils habitent, après l'avoir restaurée, une ancienne grange assez près de chez moi. Grange qui nous appartenait, à Charlotte et moi, avant que nous la vendions pour la répartition de nos biens. Nous avions été séduits par ce jeune couple qui semblait avoir des idées assez proches des nôtres quant à l'intérêt architectural du bâtiment, à préserver, ainsi qu'une sensibilité environnementale prononcée. Pour nous c'était important que "notre" grange ne soit pas attribuée à n'importe qui.
Charlotte n'est plus là et je suis donc seul avec ce sympathique voisinage.
De temps en temps j'ai été invité à suivre l'état d'avancement des travaux, ou pour un apéritif, un repas. Le soir je croise régulièrement la jeune maman, qui promène ses enfants, tandis que je chemine vers ma maison. De temps en temps nous discutons un peu, ayant trouvé des centres d'intérêt communs. Le hasard fait que que nous ayons tous les deux une approche psychologique et sociale des relations, tant par nos professions que nos formations en cours.
Récemment, après que le couple m'ait invité pour un apéritif, j'ai reçu un mail de remerciements pour ce temps passé ensemble, signé par la seule jeune femme [tiens tiens...]. Agréable sollicitude, à laquelle j'ai répondu. Il y a deux jours, alors que je rentrais d'une réunion municipale, j'ai eu la surprise de trouver un message de ma chère voisine me proposant inopinément de partager son repas du soir [ah ben ça alors !]. D'après le mail... elle était seule [hmmm.... surprenant]. Toujours partant pour une rencontre féminine [ben tiens !], j'ai accepté l'invitation sans hésitation. Après tout, pourquoi pas ? C'était si simplement proposé...
Repas très sympathique autour d'échanges divers sur nos sujets favoris, que nous découvrons assez nombreux. Assurément cela aurait été différent en présence d'un autre homme, qu'il fût le mari ou pas. Non seulement parce que je suis plutôt un homme de dialogues à tonalité confidentielle, mais aussi parce que, y'a rien à faire, je suis plus à l'aise dans le registre de l'intériorité et du féminin et que ça se partage pas trop avec la plupart des hommes !
À peine m'étais-je éclipsé et revenu chez moi, à quelques dizaines de mètres, que je recevais un mail de remerciements pour cette soirée [wooow!].
Et tout à l'heure, alors que je rentrais du travail et que je la croise de nouveau sur le chemin, elle m'a parlé de nuits difficiles, de fatigue, dont j'ai pressenti que ce n'était qu'un fragment de ce qu'elle portait. Le lieu n'étant pas propice à une conversation prolongée, j'ai repris mon chemin en la remerciant à mon tour pour la soirée passée ensemble. C'est alors qu'elle me dit : « je n'en ai pas parlé à [son mari]... j'espère que ça ne te dérange pas ? » [mais pourquoi qu'elle me dit ça ???!]. J'ai répondu en souriant par la négative [plutôt flatté], lâchant en complément une formule du genre « chacun sa vie ». Pendant ce temps j'entendais ledit mari qui jouait du piano à l'intérieur. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai eu l'impression qu'il y avait malaise entre eux... Simple intuition.
Tout ceci n'est peut-être que pure spéculation. Mes petits commentaires en gris ne seraient alors que les traces d'un imaginaire fantasmatique plutôt naïf et sans conséquences. Il me plaît cependant de constater que ma présence et mon écoute sont appréciées, voire recherchées, par un nombre croissant de femmes [je ne raconte pas tout, ici...]. Peut-être simplement parce que j'accepte désormais de me laisser approcher sans crainte...
Là est l'immense avantage de ma liberté de célibataire !