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Alter et ego (Carnet)
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23 avril 2009

Le temps de la liberté

A chaque fois que j'ai rencontré le désir de rapprochement d'une femme cela m'a permis de prendre conscience de mécanismes relationnels que j'ignorais. J'aime cette découverte et, pour tout dire, elle motive ma curiosité. J'explore. J'expérimente. J'apprends. Je pourrais garder cela pour moi mais, parce que j'en garde encore l'habitude, je partage ici, de temps en temps, ce que cela m'inspire. J'ose espèrer votre indulgence pour l'égocentrage éhonté de ces interventions, portées ici à titre de témoignage. Un cheminement personnel comme un autre...

[hop, me voila débarassé de l'autojustification]

Aujourd'hui : le besoin de liberté.

Le besoin de me sentir libre, que j'appelle improprement "liberté", est devenu prépondérant depuis que j'ai découvert les plaisirs de la vie en solo. Je n'imagine plus de renoncer à cette précieuse conquête et c'est un des premiers éléments que je pose dès que j'entre dans une dimension relationnelle qui pourrait, à plus ou moins long terme, mettre en péril cette prérogative. C'est un peu : « Touche pas à ma liberté ! »

Je n'envisage désormais une relation que pour ce qu'elles devraient toutes rester : libres !

Autant vous dire que si le principe en est aisément accepté la réalité se montre fort différente. Essayez de vous lier sentimentalement avec quelqu'un en lui exprimant un désir de liberté et vous verrez le résultat : inquiétude garantie, si ce n'est incompréhension ! Avec risque notable de rejet et/ou éloignement. Je peux comprendre ces réactions...

Mais en quoi consiste cette liberté, me demandent en choeur celles qui aimeraient bien, si ce n'est mon coeur, du moins me voir passer davantage de temps avec elles ?

Jusqu'à récemment je n'avais pas de réponse bien claire. Je pensais surtout à mon besoin de me sentir libre de rencontrer qui je voulais et de continuer à pouvoir faire des rencontres. Mais je sentais que c'était un peu court. J'ai laissé infuser l'idée afin de préciser ce que je plaçais derrière ce terme. C'est longtemps resté flou jusqu'à ce que se fasse un lien avec à la notion de temps. En effet j'ai remarqué que, dans la plupart des rencontres que j'ai faites, si ce n'est toutes, je me suis trouvé confronté à une demande pressante d'aller rapidement vers un assouvissement du désir de présence. Je ne sais pas si c'est parce que la frustration était pénible ou s'il y avait crainte que le désir de partage s'estompe avec le temps, mais il est certain que j'ai senti une pression. Je l'ai attribuée à un besoin de réassurance, mais il peut s'agir d'autres raisons. Par exemple ce peut être un désir de "vivre vite" ou, autrement dit, un désir de jouissance [par crainte de la mort ?]. Quelles qu'en soient les raisons ce genre de pression est inadapté. Par excès d'inquiétude j'ai moi-même procédé ainsi avec une précieuse amie, autrefois, et je sais maintenant que ça n'a contribué qu'à précipiter ce que je redoutais : l'éloignement. De fait personne ne pouvait calmer des angoisses qui m'étaient propres : c'était à moi de faire un travail sur moi-même. C'est ce que je me dis vis à vis des personnes pressées par le temps...

Cela m'a amené à répondre à une question que je ne m'étais même pas posée : quand j'entre en relation est-ce pour vivre au plus vite ce qu'il y a à vivre, quitte à me brûler les ailes, ou bien pour élaborer *quelque chose* ensemble, dans la confiance et le respect [concepts hautement subjectifs !], pour s'enrichir et s'épanouir mutuellement ? Clairement, pour moi, peu m'importe que les choses aillent vite ou pas... du moment qu'on s'en laisse le temps !

Mon besoin de me sentir libre est donc très lié à la dimension temporelle : j'ai besoin de temps. Temps pour construire la relation, d'une part, mais aussi temps pour continuer à vivre hors de celle-ci. Je me sais être plutôt contemplatif, j'aime observer, expérimenter, et en toute chose je souhaiterais prendre le temps qui m'est nécessaire. Je me sais être adepte d'une certaine lenteur, celle qui permet de ressentir l'instant présent sans systématiquement me projeter dans le moment qui va suivre. Être là au présent. Certes je pense à l'avenir lorsque ça me permet de faire des projets, d'envisager des bonheurs prévus et commencer à les vivre par anticipation... mais je me méfie des pensées lancées vers l'inconnu quand elles peuvent nourrir des craintes. Je me méfie du registre des peurs. Il m'arrive toutefois de me heurter à cet écueil projectif... notamment quand j'anticipe sur les complications relationnelles à venir du fait de mon besoin de liberté !

En fait, dans mon idée de liberté, tout est question de reliance : être relié aux autres, dans toute leur diversité, mais aussi être relié à moi-même et relié au temps. Mes relations aux autres sont professionnelles et familiales, amicales, internautiques... Presque toujours émotionnelles et parfois intimistes, désirantes, spirituelles. J'ai besoin de temps pour chacune de ces relations. J'ai aussi besoin de temps pour être en relation avec moi-même. Ce blog y contribue notablement, quoique de moins en moins proportionnellement. J'ai enfin besoin de temps pour... prendre le temps ! Prendre le temps de penser, de ressentir, d'analyser, d'observer mille choses. Prendre le temps de me promener, de photographier, de jardiner, de faire la sieste, de regarder dans le vague. Prendre le temps de me former, de m'informer, d'agir. Prendre le temps de lire, d'écouter, de humer, de goûter. Prendre le temps de le prendre ! Bref, j'ai besoin de beaaauucoup de temps pour me sentir vivre et ne peux envisager de le sacrifier pour le plaisir de partager une seule relation, aussi épanouissante et réjouissante soit-elle.

Puisque j'aime observer et expérimenter, que j'ai une certaine curiosité personnelle et relationnelle... j'aime rencontrer des personnalités diverses et entrer dans différents registres ce qui peut être partagé. Aimant les échanges approfondis et ne leur mettant pas de limites conventionnelles, peu m'importe de situer cela sur le continuum qui relie amitié et amour, sympathie et attirance. Et pas question d'exclure du champ du désir éventuel la sexualité ! Là encore j'ai besoin de me sentir libre de partager jusque là où peut exister un désir conjoint. Il ne m'est donc pas envisageable de me sentir coincé dans une relation exclusive. Je ne suis pas sorti de la conjugalité pour retrouver quoi que ce soit qui puisse y ressembler ! Ma partenaire la plus exigeante est probablement ma solitude.

Ce besoin farouche de liberté relationnelle allié au besoin de liberté temporelle fait que... ce peut être difficile à vivre pour celles qui voudraient partager davantage avec moi. Et ça me fait souci, parce que je n'aime pas induire de la souffrance [qui, certes, leur appartient...].  Entièrement présent à elles dans les moments de partage, je suis "absent" quand je suis occupé dans d'autres quartiers de mon existence, d'autres temps nécessaires. Je compartimente assez nettement mes vies, spontanément, sans pour autant les dissocier. Ma disponibilité dépend largement du présent que je vis. C'est le fameux "ici et maintenant"...

A moins que, de nouveau, j'aie à vivre une relation essentielle et "vitale", révolutionnaire parce que structurante et constructive au point de devenir prioritaire ? Mais j'en doute fort maintenant, au point où j'en suis parvenu...

Commentaires
P
En te lisant, Léon, j'ai envie de dire que ma vision du couple est celle que j'ai MAINTENANT. Je ne sais absolument pas quelle sera ma vision dans l'avenir... même si je peux supposer, avec une forte probabilité, ce qu'un couple ne sera plus pour moi. Mais il reste tant à inventer, ou du moins à expérimenter !<br /> <br /> Quant à "l'engagement", je pense qu'il peut revêtir bien des formes, en dehors de l'engagement "classique" du couple cohabitant. J'ai beau clamer que j'ai besoin de me sentir libre, ça n'exclut pas une forme d'engagement, et même de fidélité. C'est tout en nuances ces choses là, et pas facile à expliciter avec des mots. Là encore c'est une question de temps, de patience, d'élaboration lente.
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É
C'est très beau ce que tu écris Léon !...<br /> Je voudrais bien être l'herbe !
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L
et ben..j'avais mis la barre trop haut : deux c'était démesuré ! il y a toi Kyrann qui espère (ça fait donc la moitié d'une..) moi qui y travaille avec mon amourange (ça fait l'autre moitié..) et après..<br /> toi Pierre tu as inventé la multiplication unicellulaire humaine..d'autres sans doute inventent leur propre rapport au couple..mais l'aboutissement de notre travail intérieur c'est bien de trouver que l'autre est dehors pas dedans ? <br /> "nul, sans ailes, n'a le pouvoir de saisir ce qui est proche" (Hölderlin) <br /> j’aimerai aimer comme le vent comme la pluie comme le soleil..aimer comme l’eau de la rivière qui éclabousse de lumière l’herbe qui se penche vers elle !
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K
Trop facile ! ;-)<br /> Mais en retard ! :-p
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P
Merci Kyrann. Et bon anniversaire à toi aussi ;o)
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K
Euh oui, avec tout ça... j'ai failli oublier : bon anniversaire, Pierre ! ;-))))
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K
Léon... je n'ai pas pris ce "risque"... mais ce n'est que parce que la possibilité ne se présente pas... parce que sincèrement, j'en aurais bien l'envie. <br /> Mais je suppose que ça n'accrédite pas l'idée que cette recherche n'est pas vaine... puisque je ne le vis pas ?
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L
ce qu'évoque avec tant de finesse et d'intelligence humaine Claire-Lise à propos des échelles du temps de chacun de nous me fait m'interroger sur notre réel désir de vivre avec l'autre..<br /> combien parmi nous qui après avoir travaillé et interrogé notre rapport à la relation, approfondi notre manière d'être au monde nos envies et nos désirs profonds, éclairci nos blessures et notre place dans notre famille..combien on "pris le risque" et se sont engagés de nouveau en couple, vivent ensemble dans le même lieu et peuvent dire : "c'est bien !" ?<br /> si parmi nous il n'y en avait ne serait ce que deux..cela pourrait accréditer l'idée que cette recherche n'est pas vaine !
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P
Très intéressante approche, Claire-Lise ! Oui, il y a probablement une perception différente du temps, notamment parce que je vois les choses de façon globale, à longue échéance... tout en vivant le moment présent. Je me sens bien dans "l'ici et maintenant"... mais sans jamais oublier qu'il y aura un après ! Je vois les choses à l'échelle d'une vie sachant que tout ce que je traverse constitue cette vie. Non pas que je veuille garantir les choses, mais plutôt parce que j'ai envie de les vivre *bien*. Pour ne pas avoir à les regretter, à rejeter un passé, à me couper de ce que je ne voudrais plus voir. Je n'aime pas du tout les marche-arrière et j'ai envie d'aller toujours en avant... quel que soit le temps qu'il faille. Quand je me lie avec quelqu'un c'est effectivement... "pour la vie", dans le sens que je ne veux pas renier ce lien. Pour moi ce serait trahir. Je mesure donc bien chaque pas que je fais vers l'autre sachant que je ne souhaite pas avoir à les faire en sens inverse un jour. Précipiter les choses si je n'y suis pas suffisamment prêt pourrait me mettre dans une situation délicate. Cela dit je ne refuse pas d'être un peu bousculé, tant que les secousses restent "absorbables".<br /> <br /> Et s'il est question de vivre dans une certaine urgence... alors j'investis le lien d'une autre façon. Si je sais qu'il sera probablement éphémère alors je le vis comme tel. Ça fait partie de ce que j'appelle "liberté" puisqu'il n'y a aucun engagement et que les partenaires sont d'accord pour ces modalités.<br /> <br /> Pour moi désir de durabilité ou pas changent complètement la donne et c'est sur cette base que je construis un certain type de relation ou un autre : construire du lien ou vivre du plaisir. <br /> <br /> Honnêtement, je n'ai plus aucune envie de me « jeter à corps perdu » dans une relation. J'y ai suffisamment perdu ;o)<br /> <br /> Maintenant que je me suis "retrouvé", je fais gaffe.<br /> <br /> Je me sens plus libre que je n'ai jamais été ! Peut-être que je changerai de posture un jour mais actuellement celle que j'ai est celle qui me convient le mieux. Ce soir un ami me demandait si je trouvais mon équilibre dans ma vie. Je lui ai répondu que je m'y sentais bien actuellement et je ne désire rien y changer pour le moment :o)
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K
Alors là... Chapeau bas Claire-Lise ! :-))
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