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Alter et ego (Carnet)
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11 janvier 2010

Choisir la sérénité

J'ai reçu un courrier de voeux de la part d'une de mes cousines. Une de ces lettres communes envoyées à tous et qui sont l'occasion de faire un bilan annuel des évolutions familiales. Cette cousine passe en revue chacun de ses enfants et conjoints, ainsi que chacun de ses petits-enfants. Bonheurs et malheurs, difficultés de la vie et belles satisfactions. Le tout agrémenté de nombreuses photos de chacun d'eux...

À la fin du courrier cette cousine, qui a perdu son mari il y a deux ans, encourage les destinataires à profiter de chaque instant et nous souhaite « d'aborder cette année avec sérénité ». Louable intention, évidemment.

Le mot "sérénité" a retenu mon attention parce que je l'utilise fréquemment. Je me dis "serein". D'ailleurs on me renvoie régulièrement cette image, ce qui tendrait à montrer que je le suis effectivement.

Alors j'ai associé les deux idées : perte du conjoint et sérénité. Cette cousine écrit avoir été très entourée depuis le décès de son conjoint et « n'avoir jamais passé un week-end seule ».

J'ai pensé à ma situation et à la sienne, aux analogies et aux différences. Entre séparation définitive due à la mort et celle due à des choix de vie. Les réactions différentes de l'entourage. D'un côté la mort qui est ritualisée, officialisée, cathartisée dans un grand rassemblement qui s'appelle "funérailles". De l'autre la séparation, lent délitement des liens tissés avec l'entourage et où tout se fait un peu en catimini.

J'ai pensé aux réactions de celui/celle qui se retrouve "seul(e)". On m'a parfois proposé de rompre ma solitude, en m'invitant de façon informelle. La plupart du temps j'ai décliné l'invitation : je préférais rester seul. Alors je passe la plupart de mes week-end en solitaire. Enfin... avec quand même internet à disposition ! Seul mais relié.

Sérénité, donc...

Oui, je suis globalement serein. Par rapports aux tourments vécus il y a quelques années et aux profondeurs que j'ai cotoyées, je suis serein. J'ai "remonté la pente" et me suis fixé comme objectif de revenir à la vie de façon encore plus consciente qu'avant. Je crois que ma chance est d'avoir senti dans tout mon être, quelques temps avant la chute, la puissance de l'élan vital. Cet incroyable sentiment du bien-être accessible à qui le veut, ce souffle qui m'avait donné des ailes pour oser suivre mes désirs ! J'avais la certitude de cette force au fond de moi. Je dis que c'est une chance... et en même temps c'est parce que j'ai entendu et suivi cet appel de la vie que ma mienne a basculé.

C'est peut-être ça la différence avec un décès : moi j'ai, en quelque sorte, choisi ce qui allait mener au divorce. J'ai voulu vivre plus entièrement... et cela a eu des conséquences. Ben oui, on me l'a assez répété : « tu ne peux pas avoir le beurre et l'argent du beurre ».

Avec maintenant quelques années de recul je peux regarder ma vie d'avant et me rendre compte que mon bonheur dépendait beaucoup du regard que Charlotte (ma conjointe) portait sur moi. Quand tout allait bien c'était idéal, mais dès que quelque chose clochait entre nous ça devenait douloureux. Et surtout très lourd à porter. Notre alliance était celle de deux personnes qui se soutenaient et s'enfonçaient mutuellement. Nous dépendions étroitement l'un de l'autre.

Pourtant dans cette vie d'avant je me sentais souvent serein ! J'avais la sérénité de l'inconscience. J'ignorais beaucoup de choses de l'existence. J'ignorais aussi que... je n'étais pas profondément serein. Ma sérénité pouvait être remise en cause à tout instant, sur une simple remarque de Charlotte. En fait j'étais plutôt insouciant. Cette insouciance, cette légèreté, agaçait Charlotte, comme la sienne, en d'autres domaines, m'agaçait. Notre sérénité ne s'exerçait pas toujours dans les mêmes registres, pas de la même façon. Tout allait bien quand nous étions dans le même état d'esprit, mais dégénérait quand l'un était prêt au bien être et que l'autre était dans un mal-être. Que d'énergie dépensée pour tenter d'accorder des natures différentes ! Évidemment nous manquions d'autonomie l'un par rapport à l'autre...

Maintenant que Charlotte est partie je la vois avec un regard un peu perplexe : d'une certaine façon elle est toujours celle que j'ai aimée et appréciée. De l'autre elle devient ce qu'elle n'avait pas pu épanouir avec moi. De la première je me sens toujours très proche, de la seconde je me demande ce qui, en elle, pourrait m'attirer aujourd'hui. Et pourtant ce n'est, évidemment, qu'une seule et même personne... Une connue et une inconnue.

C'est pourquoi je la vois peu. Il y a ce mélange de proximité impossible et de distance constatée qui, globalement, me fait plus de mal que de bien. Nous restons, je crois, très proches affectivement. Un peu comme si nous étions frère et soeur, de très vieux amis, mais avec quelque chose qui nous a fortement éloignés. Restent nos enfants et "l'esprit de famille" lorsque, occasionnellement, nous nous retrouvons tous ou en partie. La famille est dispersée, mais reste intacte.

Sérénité, donc... si je ne me mets pas trop au contact de celle avec qui je me sentais, autrefois, souvent serein. Et heureux ! Mais ce bonheur avait un prix : j'étais souvent malheureux avec elle. Mais je ne le savais pas. J'y étais habitué. Nous avions quelques incompatibilités, solidement étayées par nos blessures d'enfance, qui nous autodétruisaient en continu. Et en même temps nous nous épaulions et nous construisions mutuellement ! Le bilan a longtemps été suffisamment positif, même s'il fallait, pour qu'il le reste, insuffler beaucoup d'énergie.

Je crois que c'est le souvenir des moments de mal-être vécus dans cette relation qui fait que je n'ai plus envie de m'allier trop fortement avec une femme. Je préfère ma vie en solitaire qui présente le grand avantage de me permettre une sérénité quasi continue. Une sérénité dont, en tout cas, je me sens être le seul responsable. Je n'ai plus envie de dépendre des états intérieur d'une autre personne.

Plus tard, peut-être...
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IMGP7729
Commentaires
G
mon journal est plein de mots comme silence,solitude,serenite,sagesse.il me faut les cultiver et etre jardinier est le travail dune vie et le tout se termine lorsque je ferme la swich.bonne culture antoine.
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J
Merci Pierre pour cet échange si enrichissant entre toi et Martine! Chacun à votre manière vous décrivez l'amour tel que je le conçois! Vous créez ainsi un lien avec ce que j'expérimente, ce que je pratique dans ma vie de tous les jours...l'amour ne se résume ni à un péché, ni à un moyen de procréer...il n'est pas réduit non plus à un plaisir passager...il n'est pas non plus soumis à un assentiment social ou religieux...pas de dogmes, pas de préjugés, pas de contrat...l'Amour est là..tout simplement!
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M
Sans rien enlever à la justesse ou à la beauté de vos écrits disons que votre façon de dire est plus construite et plus structurée que la mienne...je dirai plus "Masculine " peut être ?<br /> <br /> la mienne est plus dans les courbes, les pleins et les déliés...plus "Féminine" en quelque sorte ?<br /> <br /> deux visions identiques mais des plumes différentes pour l'écrire .<br /> <br /> en résumé nous sommes dans l' écriture comme nous pourrions l'être la vie :un Homme et une Femme qui nous parlons<br /> <br /> rien de plus, peut être... <br /> mais en tout cas,<br /> rien de moins!<br /> <br /> <br /> et je pense que la richesse de cet échange vient de là<br /> <br /> alors permettez moi de vous dire le plus sincèrement du monde <br /> Merci d'Être...<br /> tout simplement .
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P
Martine, personne n'est "trop long" en prenant le temps et l'espace nécessaire pour se dire. C'est parfois le lecteur qui est pressé... mais ça le regarde :o)<br /> <br /> Je me sens en accord avec ce que vous dites de l'amour. Vous avez une façon de vous exprimer différente de la mienne mais je la trouve à la fois fluide, légère et éloquente. Intuitive et poétique.
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M
Vivre une histoire c'est ne rien préméditer sur ce qu'il en adviendra <br /> oui vous avez raison,<br /> Aimer au présent c'est accepter l'idée que la joie pure vienne de là,<br /> du présent et seulement de lui .<br /> <br /> Nous ne devons pas avoir l'idée du chemin, c'est ainsi que nous le dessinons et l'inventons...<br /> Sans but, ni route tracée, on imagine alors la craie et la marelle pour mieux dessiner l'aurore .<br /> <br /> De nos doigts nous caressons alors la perpétuité de l'instant et la grâce du tant sans temps...<br /> <br /> Le galet se pose là sur le ciel,<br /> Dernière étape avant le paradis <br /> Dans le pouls lent d'un cœur qui bat au rythme des rêves,<br /> Et qui va,<br /> <br /> De l'uni..<br /> vers...<br /> L'unisson ...<br /> <br /> la seule croyance a avoir c'est que tout ce construit sur ce que l'on ignore.<br /> <br /> Hélas, c'’est notre nature d’humain qui nous pousse toujours à vouloir nous fixer, <br /> Mais la vie, elle, ne l’est pas.<br /> <br /> Elle trace un chemin, habite un voyage, un mouvement, mais n’est jamais fixée, figée, immobile. le chemin de l’amour n’a ni age ni époque,<br /> Il ne demande, ni n’attend, ni n’inscrit, ni ne prévoit rien.<br /> L’amour, n’a peur de rien, ni du passé, ni du présent et encore moins de l’avenir, la crainte vient avec les promesses les projets, les mots pour les dire et les envisager.<br /> <br /> La crainte vient avec les contrats écrits ou tacites, avec tous ces futurs frileux qui ne veulent qu’une seule chose :<br /> Fixer l’amour au clou d’un contrat pour s’assurer qu’il ne parte pas.<br /> <br /> Mais c’est une erreur.<br /> <br /> Parce que l’amour ne fixe rien d’autre qu’un temps suspendu, Il n’est porté que par le souffle de l’instant, et n’est ancré, que dans l’éternité du moment, il ne se soumet à aucune logique, à aucun contrat .<br /> <br /> L’amour ne connaît pas de tacite reconduction avec accord préalable des deux parties.<br /> <br /> Le temps d’aimer ne connaît ni naissance ni vieillissement ni mort, il est un temps suspendu et mobile qui naît du cœur, au ventre même de l’émotion c’est ça le temps d’aimer.<br /> ... <br /> Aimer c'est dire à l'autre <br /> je te sais toi <br /> mais après, <br /> je ne sais rien <br /> <br /> et Si Aimer, c’est naître à l’autre, <br /> Et se donner à lui<br /> Alors, <br /> C’est admettre de s’y rendre <br /> Mais aussi,<br /> Peut être,<br /> De s’y perdre.<br /> <br /> Parce que l’amour c’est un chèque en blanc à porter au crédit du rêve.<br /> Et nous ne saurons jamais, de combien est faite la générosité du donneur, avant que de le déposer....<br /> <br /> voilà ce que je pouvais rajouter sans prendre le risque d'être trop longue ..<br /> j'espère d'ailleurs que ce n'est pas déjà le cas ..
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M
désolée pour la lecture trop rapide de votre réponse.<br /> pas facile l'interprétation à distance parfois l'on se trompe et il est bon que l'autre alors nous remette élégamment sur la bonne voie .<br /> merci à vous d'avoir pris ce temps pour le faire.
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P
Petit malentendu, il me semble, Martine : quand je dis que « j'ignore comment ça peut durer » je veux parler de l'alliance amour-liberté. Comment peut-on rester durablement dans l'amour ET libre ?<br /> <br /> Je fais partie de ceux qui considèrent que l'amour n'a pas de fin... mais je sais que d'autres considèrent qu'il peut se terminer (ou du moins que la relation peut se terminer). Dans ma vie amoureuse ce désaccord fondamental m'a beaucoup inquiété, autrefois. Maintenant je me suis adapté à cette incertitude, je l'ai adoptée, et j'aime autrement : au présent, en sachant que ça ne durera peut-être pas. Changement qui peut paraitre minime mais qui modifie profondément la dynamique amoureuse, du fait de l'absence de perspectives.<br /> <br /> C'est avec plaisir que je lirai votre développement :o)
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M
je crois que si l'on se pose la question de la durée , c'est que l'on a déjà accepté l'idée que tout amour doit forcément avoir une fin ... <br /> <br /> en se posant de telles questions,on appréhende le sentiment amoureux comme étant figé dans le temps et tributaire de lui . <br /> et voilà qu'avant même de débuter une histoire on envisage alors déjà le pire: sa fin <br /> <br /> je pense au contraire que rien n'est figé sur l'immobile, tout évolue nous, lui, et, si possible, nous avec lui<br /> ...permettez moi d'y revenir plus tard pour développer
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P
Merci Martine, de faire part de ce regard sur l'amour.<br /> <br /> Pour ma part je suis convaincu qu'il n'y a pas d'amour sans liberté mais j'ignore comment cela peut durer...
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L
Belle ode à l'amour et à la signification du mot aimer... mais la chute est plutôt décevante !!<br /> L'amour, même sans barrières sociales, demande un minimum d'exigence, de respect, de don de soi, d'honnêteté... ou alors c'est de la fiction ! de l'amour opportuniste et consommateur.<br /> ... et l'unique application en est la solitude.
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