27 mars 2010
Amour et solitude
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« La solitude n'est pas l'isolement : certains vivent en ermite, certes, dans une grotte ou un désert, mais d'autres - les plus nombreux - dans la famille ou la foule... Être isolé c'est être sans contacts, sans relations, sans amis, sans amours, et bien sûr c'est un malheur. Être seul, c'est être soi, sans recours, et c'est la vérité de l'existence humaine. Comment serait-on quelqu'un d'autre ? Comment quelqu'un pourrait nous décharger du poids d'être soi ? [...] L'isolement, dans une vie humaine, est l'exception. La solitude est la règle. Personne ne peut vivre à notre place ni mourir à notre place... Si l'on peut parfois s'entraider (et bien sûr qu'on le peut !) cela suppose l'effort solitaire de chacun. La solitude n'est donc pas refus de l'autre, au contraire : accepter l'autre c'est l'accepter comme autre (et non comme un appendice, un instrument ou un objet de soi !), et c'est en quoi l'amour, dans sa vérité, est solitude. [...] L'amour n'est pas le contraire de la solitude : c'est la solitude partagée, habitée, illuminée - et assombrie parfois - par la solitude de l'autre. L'amour est solitude parce que tout amour est solitaire. Personne ne peut aimer à notre place, ni en nous, ni comme nous. Ce désert, autour de soi ou de l'objet aimé, c'est l'amour même. [...] Ce que vous vivez avec votre meilleur ami, vous le vivez seul : lui vit autre chose. Et deux orgasmes, même simultanés, n'en sont pas moins deux. Comment vivre ce que l'autre a vécu ? Comment sentir ce qu'il sent, éprouver ce qu'il éprouve ? Cela n'empêche pas de s'aimer, ni d'être ensemble, mais dissuade de rêver d'un amour qui mettrait fin (par quel miracle ?) à la séparation ou à la solitude. Il faut être deux pour s'aimer, au moins deux, et l'amour ne saurait abolir cette pluralité qu'il suppose. Cela vaut dans tous les domaines de l'existence» André Comte-Sponville, dans "L'amour, la solitude" |
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