L'effet téflon
Ma vie est plutôt calme, sans que je m'y ennuie jamais. Je dispose d'une très grande liberté pour faire ce qui me plaît et j'utilise cet avantage sans retenue. Je vis au milieu de la nature, dans un lieu tranquille qui me permet d'exercer diverses activités qui me plaisent. J'alterne moments de solitude, propices au ressourcement, et temps passé avec d'autres. Et...
... et bla bla bla...
... et je ne me dispute avec personne...
Ah ben ça, en vivant seul, ça ne risque pas...
C'est un des grands avantages !
Bon, trève d'autosatisfaction, tu veux dire que tout va bien ?
C'est ça ! Je dois quand même aller travailler, ce qui n'est pas toujours passionnant mais bon, rien de très pénible non plus.
C'est plutôt cool d'être souvent en pleine nature !
Euh... faut pas oublier l'hiver qui arrive ! Et puis j'ai quand même la vague impression de sous-employer mes compétences. La contrepartie positive c'est que, du coup, ça me laisse du temps pour faire autre chose.
Écrire, par exemple ?
Pas que ça, mais oui, écrire, réfléchir, analyser... ça m'occupe pas mal.
Pourtant tu dis que tout va bien !
Ah mais l'un n'empêche pas l'autre ! C'est parce que je prends le temps d'observer et de penser que je vais bien. J'en ai besoin. Quand je n'ai pas le temps de prendre ce temps j'ai l'impression de ne pas vivre !
Mais les questionnements alambiqués que tu poses sur ton blog ne sont pas des plus légers...
Oh, pas vraiment lourds non plus ! Mais c'est vrai : quand je me relis j'ai parfois l'impression de paraître excessivement sérieux et passablement tourmenté.
On pourrait même dire austère. Voire chiant...
Il y a un décalage entre ce que je me sens être et ce que j'expose de moi. J'aime pas trop ça...
Mais qu'est-ce tu cherches en écrivant ? qu'est-ce qui te manque ?
Hum... pas besoin de chercher très loin : ce qui me manque dans ma vie de solitaire ce sont des échanges. De vrais échanges, en présence. Du partage de temps, d'idées, de rires et de tout ce qui fait du bien.
Et tu trouves ça sur internet ?!
Ben non ! Enfin si, en partie, pour ce qui est de l'échange d'idées. C'est cet aspect que j'aime bien.
Ça manque un peu de présence, quand même...
Exact ! D'ailleurs lorsque je partage des moments de présence je n'écris plus ici !
Ouais, sauf que c'est assez rare, dans ta vie d'homme des bois reclus au fond de sa campagne.
Il est vrai qu'en dehors de mes enfants occasionnellement de passage il est rare que quelqu'un séjourne chez moi...
Et toi tu ne prends guère le temps de quitter ton lieu de vie.
Pour le moment cette situation me convient. Elle offre l'avantage de la tranquillité...
... et l'inconvénient d'un immobilisme certain.
Il faut croire que c'est dont j'ai besoin en ce moment. Ou dont j'ai eu besoin ces derniers temps...
Solitaire et célibataire... ouais... ça manque un peu de vie tout ça ! Et les femmes ? ♫ Où sont les feeeeemmes ♪ !?
Euh... ben ça fait peut-être partie des manques... En tout cas ça fait partie de ce qui pose question ! Pas les femmes en tant que telles, mais tout ce qui peut s'assimiler à du rapprochement avec celles-ci.
Y'a bien des femmes dans ta vie, quand même !
Boah... il y en a bien quelques unes avec qui des échanges approfondis existent ponctuellement... sporadiquement. Des jeux de rapprochement... des effleurement... mais c'est le maintien à distance qui en serait la caractéristique commune. Pas d'approche sans avoir sécurisé et balisé la zone ! J'ai tendance à être hypervigilant, superprudent et mégaprotecteur. Attention danger ! Fragile !
Euh... à ce point ?
La séduction est un élément sensible et instable, avec un risque de débordement affectif non négligeable. Quant aux sentiments, c'est une substance potentiellement bien trop adhérente pour la laisser approcher sans précautions. Faut pas que je sente que ça puisse accrocher. Je suis devenu comme une poële en téflon.
Eh ben... charmant programme ! De quoi décourager toutes les initiatives...
Disons que, n'ayant pas croisé de compatibilités aveuglantes, les approches n'ont pu être que prudentes, donc extrêmement lentes...
Quasi immobiles !
Je ne suis pas pressé. Ni demandeur.
Ce peu d'empressement qui a occasionné pas mal d'abandons en cours de route...
Et a renforcé l'effet téflon !
Alors c'est pas prêt de changer...
Je ne suis pas en manque.
Que tu dis !
Si c'est le cas je n'en ai pas conscience.
Pardi... et tout le temps que tu passes à réfléchir aux relations, au réel et à l'imaginaire, ça serait pas un peu lié à ça ?
Euh... je reconnais que c'est autour de ça que les cogitations qui transparaissent dans mes écrits prennent leur source. Mais j'évite d'aborder le sujet de front.
Tu ferais bien de regarder les choses en face, plutôt que de tourner autour du pot !
Rien ne presse...
Pfff... désespérant...