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Alter et ego (Carnet)
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9 janvier 2011

Être soi en couple

La tonalité un peu péremptoire de mon précédent billet m'a surpris. Serais-je finalement plus sûr de mes idées que je ne le crois ?

À partir de la situation que je décrivais (le renoncement d'une part de soi à la demande du conjoint) est monté en moi une colère - plus précisément une révolte - dont j'ai immédiatement senti qu'elle provenait de tout autre chose que ce que j'observais. Il ne m'a pas fallu longtemps pour remonter aux origines : le couple de mes parents. Un rapport complexe de soumission et d'emprise croisées dans laquelle chacun avait sa part de responsabilité. Modèle plus ou moins reproduit, quoique de façon très adoucie, dans mon propre couple. Modèle rejeté, enfin, après qu'il fût fatal à une éphémère relation de couple qui méritait bien mieux qu'une fin précipitée.

Une révolte, donc. Or, dans le cadre de ma formation à l'accompagnement des couples sur le plan affectivo-relationnel, j'ai appris à faire preuve de la plus grande neutralité. Si j'avais été dans ce cadre il est évident que j'aurais dû réagir de façon adéquate, c'est à dire sans aucune trace de colère issue de mes projections. Il m'aurait donc fallu avoir l'esprit disponible pour être pleinement attentif à ce qui se joue dans une décision impliquant le fonctionnement d'un couple. Afin de ne pas être encombré par une colère qui monterait en moi je dois avoir appris à détecter ce qui peut la déclencher. Visiblement j'ai donc encore du travail à faire de ce côté-là ! Ce petit évènement réactionnel m'y pousse et m'aide à en prendre conscience.

Par ailleurs, sur le plan personnel, je sens bien que ma représentation du couple est devenue assez critique. J'y associe, probablement avec excès, un modèle de domination-soumission plus ou moins subtile. J'ai désormais quelques difficultés à croire qu'un fonctionnement harmonieux, équilibré et pleinement épanouissant pour chacun puisse exister sans un solide travail sur soi. Dans la plupart des couples je vois surtout le renoncement à soi, dans des proportions variables. Peut-être parce que je ne connais pas de couples que je sens à la fois pleinement "vivants" et équilibrés par rapport aux aspirations de chacun ? J'ai l'impression que ceux qui parviennent à un équilibre ont quelque chose de "mort", de figé, d'éteint. Tout simplement parce qu'à force de compromis les individualités se sont éteintes.

J'ai conscience que ma vision est certainement faussée et je suppose que des couples équilibrés et vivants existent ! Je les imagine alors ouverts, créatifs, partageurs, laissant à chacun une part de liberté correspondant à l'essentiel de ses besoins et aspirations. Autrement dit, sans que l'un exerce de pressions abusives sur l'autre. Des couples où l'un ne considère pas que l'autre lui "appartienne". Des couples où l'ingérence dans la vie de l'autre n'existe pas. Des couples où, plutôt que la peur de perdre l'autre, ou de ce qu'il a de différent de soi, règnent confiance réelle et respect.

Mais où sont-ils ?

Oh bien sûr, beaucoup de couples donnent l'impression de fonctionner de façon équilibrée. Et le fait qu'ils durent tend à prouver que l'équilibre est suffisamment satisfaisant. Il l'est d'ailleurs... tant qu'il n'est pas déstabilisé. On ne reste pas en couple si on n'y trouve pas satisfaction. Cette affirmation peut sembler bizarre quand les dysfonctionnements sautent aux yeux, mais le fait est là : on est toujours libre d'accepter ou de refuser. Cela a bien évidemment un coût. Reste donc à savoir à quoi chacun renonce pour conserver certains avantages, et ce qu'il en coûte. Les situations les plus flagrantes, avec violence conjugale avérée et réel risque de grave dérapage, montrent à quel point le système d'emprise-soumission peut "fonctionner" longtemps...

Alors que penser des situations où l'emprise est infiniment plus subtile que les coups, les insultes, les paroles dénigrantes ? Dans quelle mesure est-elle perçue par les protagonistes ? Si la grande violence est minimisée par les personnes qui en sont victimes, qui vont parfois jusqu'à protéger leur bourreau, que penser des systèmes où l'emprise s'exerce sans le moindre haussement de ton ? Est-il possible de percevoir la violence à dose homéopathique ?

Le terme de violence, lui-même, paraît largement excessif. On l'associe à brutalité, coups, agression. Quel terme employer pour des incitations à agir selon les désirs de l'un au détriment des besoins de l'autre ? Qu'est-ce qui se joue quand l'un renonce à ses aspirations pour satisfaire celles de l'autre ? Pour « lui faire plaisir ». On peut y voir de l'amour, quand ce renoncement est "offert" de bonne grâce. Ou un arrangement amiable quand il y a des contreparties librement acceptés. Mais c'est de la soumission dans tous les autres cas.

Soumission qui renvoie à la responsabilité de chacun, et en particulier à celle de celui qui se soumet. Dans un rapport égalitaire la "victime" consent toujours à l'être, aussi dérangeante que puisse être cette idée. Or un couple est un système égalitaire, du moins à notre époque et dans notre société. Et si nous n'avons pas tous les mêmes capacité à réagir face aux demandes de l'autre, en fonction de notre histoire personnelle, nous en avons tous le pouvoir. Celui de dire non. Celui de se positionner, de s'affirmer. Celui de s'indigner, pour reprendre une idée dans l'air du temps.

Commentaires
P
Delphine, je n'ai aucune raison de hurler :o)<br /> <br /> Tu décris très bien à quel point le conditionnement est accepté, source de culpabilité et de craintes quand il y a tentative d'émancipation d'un rôle prédéterminé. C'est bien là le piège...
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D
bon Pierre, il faut que j'avoue :<br /> <br /> quand j'assumais pleinement le rôle féminin qu'on m'avait octroyé , je me sentais heureuse et satisfaite de ce que que j'assumais pleinement. non ne hurles pas d'indignation !<br /> <br /> Quand il m'a fallu assumer mon rôle que je qualifirais de masculin (non ne hurles pas)donc ramener un salaire pour subvenir au besoin de ma famille, j'ai été très perturbé et je me sentais coupable d'abandon envers mes enfants.<br /> <br /> Aujourd'hui je vais mieux mais mon éducation avait une incidence sur ce que je pensais devoir assumer.<br /> <br /> Non ne hurles pas. lol merci de ta compréhension.
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D
non je parlais bien d'hommes au sens sexué mais au final ta correction me semble tout à fait adéquat et bien plus prêt de la réalité. la femme a aussi des difficultés à changer parce qu'elle sais ce qu'elle espère mais pas ce qu'elle va en obtenir.
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P
Delphine, l'erreur serait précisément de partir d'un constat pour en tirer des règles générales : ce n'est pas parce que nous en sommes là que nous sommes condamnés à y rester. Ce n'est pas parce que les petites filles imitent leur mère et d'autres modèles féminins qu'il est dans leur "nature" d'avoir des comportements spécifiques. Leur "nature" est de reproduire ce qu'elles constatent et ça s'appelle une "culture". Autrement dit, la plupart de nox comportements dits "féminins" ou "masculins" sont culturels.<br /> <br /> Bien sûr nous sommes marqués par ces modèles, mais nous sommes aussi doté d'intelligence, c'est à dire de capacité d'analyse, d'esprit critique, et nous pouvons remettre en questions les modèles culturels.<br /> <br /> Tu utilises le mot "naturel" pour parler du mimétisme et c'est exact : il l'est. Sauf qu'il est tout aussi "naturel" à l'humain se chercher inlassablement à inventer de nouvelles façons d'être, de faire, d'utiliser, de se comporter. Et je préfère privilégier cette naturalité-là à celle du... conservatisme.<br /> <br /> Inventons nos vies ! Inventons des comportements, qui peuvent améliorer collectivement nos conditions d'existence. Il y aura bien assez de résistances "naturelles" au changement pour ne pas hésiter à forcer un peu les choses. C'est pour cette raison que je n'hésite pas à être assez affirmatif ;o)<br /> <br /> Pour ta dernière phrase je pense que tu voulais parler d'humains, en parlant d'"hommes"... parce que les femmes (en généralisant), ou tout autant de difficultés à changer que les hommes (mâles). La capacité au changement est individuelle, et pas attribuable à un genre plutôt qu'à un autre.
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D
Pierre, je ne veux pas dire que je suis d'accord avec cette vision,mais que ce systéme a régit nos fonctionnement depuis tant d'années que nous avons du mal à nous en défaire.<br /> J'ai été éduqué par un système patriarcal, mon grand père dirigeait et ma grand mère était à la maison donc par la force des choses nous sommes marqués par ce que nous avons connu même si nos idéos y sont opposés<br /> <br /> Euh... ce serait donc patriarcat ou matriarcat ? L'idée de se répartir les tâches, les responsabilités, les décisions, quand elles ne peuvent pas (?) être prises en commun, te semblerait-elle impossible ?<br /> <br /> Pas impossible dans l'absolu, mais impossible encore aujourd'hui.Les hommes et les femmes sont trop préoccupés aujourd'hui à vouloir diriger (nous sommes encore dans le besoin de reconnaissance) plutôt qu'à diriger en commun(ce que nous seront capable de faire quand nous nous sentirons tous reconnus) c'est pas pareil.<br /> Et une décision qui n'est pas prise en commun est une décision imposée. <br /> <br /> "Par contre je te rejoins quand tu parles de difficulté à faire évoluer les mentalités. Mais il ne faudrait pas confondre habitudes socio-culturelles héritées du patriarcat et rôles soit-disant "naturels" au masculin et au féminin."<br /> <br /> il est devenu naturel parce que c'est l'exemple que nous avons de nos parents, il est difficile de s'amender de l'éducation que nous avons reçue(mimétisme).<br /> <br /> Les petites filles jouent naturellement à la poupées et les petits garçons font comme papa, commande une boite à outils pour Noel.<br /> <br /> Il est rare de voir une petite fille commander au père noel un camion de pompier et par un petit garçon un aspirateur, il y a encore du travail pour faire réellement changer les mentalités même si la petite fille joue aussi au voiture et le petit garçon prend le balai de maman.<br /> <br /> et même si celles-ci changent de là à appliquer dans notre vie ces changements .<br /> <br /> Il y a ce qu'on voudrait qu'il soit et ce qui est réellement.<br /> La majorité des couples même si aujourd'hui la place de la femme a évolué, fonctionnent encore comme ça.<br /> <br /> Trop d'hommes sont aujourd'hui encore opposés à un réel changement par peur de perdre cette place qu'il connaissent contre une place dont ils ne connaissent pas le fonctionnement. Malheureusement.<br /> <br /> Ce n'est qu'une constatation.
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P
Ouille, Delphine, tu me fais réagir là ! Qu'est-ce que c'est que ce discours qui fige chacun dans des rôles prédéterminés ?<br /> <br /> D'abord l'idée d'un "système égalitaire" ne réfute absolument pas l'existence de différences, mais seulement que l'un n'est pas supérieur à l'autre, ni n'a davantage de droits.<br /> <br /> Notre héritage culturel cro-magnonesque n'est pas vraiment attesté et je crois qu'on ignore encore largement comment étaient réparties les tâches entre hommes et femmes dans ces temps reculés. Cette légende de l'homme chasseur et de la femme confinée à son rôle maternel a surtout été une façon de ne rien changer.<br /> <br /> « La femme est faite pour faire régner l'harmonie » me fait bondir ! Tout comme l'idée d'immuabilité des rôles. Autant dire tout de suite que la place des femmes est dans la cuisine et à la lessive ! Un homme aurait écrit ça je lui aurai volé dans les plumes pour son machisme rétrograde. Venant d'une femme... ça me sidère toujours :o)<br /> <br /> Par contre je te rejoins quand tu parles de difficulté à faire évoluer les mentalités. Mais il ne faudrait pas confondre habitudes socio-culturelles héritées du patriarcat et rôles soit-disant "naturels" au masculin et au féminin.<br /> <br /> Ce n'est pas tant la « reconnaisance du moi » par les femmes qui a fait changer les choses, que la lente émergence d'une prise de conscience des inégalités flagrantes auquelles les destinait leur genre.<br /> <br /> « Le couple et la famille sont une micro société, il ne peut y avoir qu'une personne qui préside. »<br /> Euh... ce serait donc patriarcat ou matriarcat ? L'idée de se répartir les tâches, les responsabilités, les décisions, quand elles ne peuvent pas (?) être prises en commun, te semblerait-elle impossible ?<br /> <br /> L'homme capitalise et la femme socialise... oups, là je déclare forfait.<br /> <br /> Honnêtement, je suis très surpris de lire ce genre de choses. Ou alors c'est une blague ??
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D
un couple peut difficilement fonctionner dans un système égalitaire, puisque déjà à l'origine les deux êtres qui le constituent sont différents dans leur fonctionnement. L'homme chassait pour nourrir sa famille, la protégeait contre les dangers extérieurs, lui donnait un toit, il décidait ce qui était le mieux pour les siens. la femme, elle enfantait, nourrissait, soignait, éduquait. on peut difficilement changer ce qui est depuis des millémaires. D'ailleurs notre façon de communiqué est empreinte de ces rôles. l'homme a une communication direct tandis que la femme a une communication indirect, elle utilise plus souvent la diplomatie, elle demande sans ordonner, elle ménage les suceptibilités, elle est faite pour faire régner l'harmonie. Donc il ne peut y avoir égalité. Même si à notre époque nous essayons de changer ce point,nous avons d'abord du mal à nous y retrouver puisque ce que nous essayons de devenir est différent de ce qui nous a construit. Nous avons eu une éducation patriarcale. Dans les générations précédentes, la place du "soi" n'avait pas autant d'importance et pourtant les couples perduraient. Etait-ce la femme qui faisait perdurer son couple ? Ces mêmes femmes qui aujourd'hui bien souvent prennent la décisions du divorce.Je crois que la reconnaissance du "moi" par la gente féminine a déstabilisée le fonctionnement du couple et que nous n'avons pas encore pris nos repères dans ce nouveau fonctionnement. Au lieu de nous unifier dans le couple, aujourd'hui nous nous opposons.<br /> Un couple ne peut pas marché sans concessions donc sans soumissions mais il en est de même de la société, nous sommes obligés de nous soumettre au loi qui ont été établies pour le respect de tous. Le couple et la famille sont une micro société, il ne peut y avoir qu'une personne qui préside. La femme ou l'homme ? là est la question. L'homme représente la droite (capitaliser, investir) et la femme la gauche (Le social, faire en somme ce qu'il faut pour que chacun reçoive au minimum ce dont il a besoin). Nous n'avons pas encore franchi l'idée de mettre une femme à la présidence, même si dans les esprit nous reconnaissons aujourd'hui qu'une femme a les compétences d'un homme ? mais l'a-t-on vraiment accepté ?
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P
Julie M, je comprends que ça t'aie ait penser à moi ;o) Cela m'a permis d'approfondir un peu cette idée dans le billet que je viens de mettre en ligne...<br /> <br /> Léon, tu pourras constater que j'ai probablement la même peur que JJ Goldman. Et j'approuve entièrement ta dernière remarque !
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L
Oui Julie M c'est joliment trouvé et assez juste ce parallèle entre JJ Goldman et Pierre dans ce qu'ils disent sur l'amour ! <br /> maintenant ce que dit JJ Goldman n'est que sa vérité à lui car la notion de temps qu'il y introduit ne me semble que le reflet de sa peur..<br /> pourtant je retiens une chose que je partage: quand quelqu'un qui ne dit jamais "je t'aime" vous le dit c'est un cadeau encore plus précieux que la plus pure des perles de pluie
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J
... de mes promenades sur le net, j'ai trouvé ça :<br /> <br /> http://www.youtube.com/watch?v=DhNVVfF_Dfo&feature=related<br /> <br /> pas forcément de lien direct avec ton billet, mais j'ai pensé à toi ;) Dis comme ça j'ai trouvé que ça sonnait juste et léger! :) Bonne journée ;)
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