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Alter et ego (Carnet)
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14 janvier 2011

Aimer dans l'instant

La sinuosité des parcours de vie me fascine. Par quels détours devons nous passer pour aller vers ce qui, en nous, se cherche ? Je suis convaincu que ce que nous faisons de nos vies, consécutivement aux évènements qui les parsèment, a un sens révélateur qui éclaire nos motivations profondes. Nos choix mettent alors en lumière des désirs inconscients qui nous sont difficilement perceptibles quand rien ne perturbe l'écoulement d'une vie sans heurts...

Ainsi, lorsque je regarde où j'en suis aujourd'hui après quelques turbulences, je me demande vers quoi je vais. En même temps j'ai confiance et je sens bien que saurai toujours tirer quelque chose de constructif de ce qui adviendra. Parce que, par évidence, j'ai fait le choix de me construire avec tout ce que je trouverai sur mon chemin.

Il n'empêche que je peux être surpris par ce qui se présente. C'est régulièrement le cas quand m'apparaîssent, dans ce que j'exprime, des idées, des ressentis, des évolutions, que j'ignorais être en moi. Il arrive souvent que cela survienne lors d'échanges oraux, quand je livre mes ressentis. Je peux alors être étonné de ce qui m'échappe dans le jaillissement spontané de mes paroles. Dans le registre des écrits publics c'est autre chose : rien ne m'échappe sans que j'ai pris le temps d'y réfléchir et de laisser mûrir. Ce que je donne à lire a été suffisamment pesé pour que je décide de le publier. Le choix de mes mots, leur assemblage et le sens qu'il veut induire, sont le fruit de tout un travail. Spécialement quand il s'agit d'idées fortes, signifiantes, importantes à mes yeux.

Quand, par exemple, je me vois étaler publiquement mon scepticisme à l'égard du couple, alors que j'en ai été un ardent défenseur pendant plus de vingt ans de vie conjugale, je m'interroge : qu'est-ce que je cherche à (me) dire ? En voilà un changement de cap ! Vers quoi vais-je ? Où en suis-je de mon parcours ? Quel est mon objectif ? Qu'est-ce qui reste immuable et qu'est-ce qui change, évolue, se transforme ? Que deviennent mes convictions anciennes, apparemment révolues ? Moi qui étais persuadé que par le dialogue on pouvait venir à bout de toutes les difficultés relationnelles, j'admet aujourd'hui que parfois il n'a même pas la place d'exister. Moi qui vantais les avantages des compromis, j'en viens à en redouter les dérives vers la négation de soi. Moi qui me réjouissais de m'épanouir dans un couple, voila que j'y vois surtout une co-dépendance aliénante. Moi qui parlais de bonheur et de chance extraordinaire d'avoir rencontré celles avec qui je m'ouvrais à la vie... voila que j'ai découvert une façon de vivre heureux dans la liberté que procure la vie en solo.

Avais-je besoin d'en passer par là ? Sans doute...

Il m'a fallu faire ce détour pour découvrir une aspiration longtemps masquée par des moments de bonheur. Car j'ignorais que je n'avais pas l'esprit en paix.

Aujourd'hui je parviens à vivre dans cette paix en m'épargnant des conflits affectifs avec autrui. Je me protège. J'évite ainsi ce qui pourrait trop souvent réveiller des sensibilités indomptées, chez moi et chez l'autre. Je n'investis pas trop les relations en sachant que l'ouverture en confiance peut cesser d'un jour à l'autre, suite à une blessure involontairement réactivée. Ne surtout pas m'attacher au delà du présent, pour ne pas craindre que la perte à venir ne m'atteigne trop fort, pour ne pas ressentir la morsure du manque, la tristesse de la rupture, le désastre de l'incommunication. Et cependant je veux rester ouvert, toujours, en apprenant à me détacher dès les premiers signes d'attaque. Ne pas me laisser atteindre par le mal-être de l'autre, qui pourrait me contaminer et déclencher le mien.

Difficile de trouver la proximité qui convient. C'est pourquoi les rencontres où s'invitent le désir et l'affectif, et plus encore le besoin d'amour, sont devenues pour moi le terrain de tous les dangers.

Pas étonnant qu'aujourd'hui me voila critique, incrédule, presque virulent envers le mythe du couple, ce lieu de rencontre le plus chargé d'attentes profondes et largement inconscientes. J'ai cependant conscience que ma réaction de méfiance est un peu trop exacerbée pour être juste, équitable, équilibrée. Ma virulence est à la hauteur de ma désillusion : excessive. J'ai encore à me questionner sur mes attentes et mes désirs, à me situer par rapport à mes besoins.

Pour autant je n'ai pas déserté le registre relationnel-affectif puisque tout ce qui tourne autour de l'amour constitue la trame de fond de mes réflexions. Beaucoup de mes billets s'en nourissent, d'ailleurs. C'est que, malgré ma mise en retrait prudente, je n'ai jamais totalement déserté les relations teintées de séduction. Je n'ai renoncé à rien et, tout en vivant ce qui est accessible, j'observe ce qui se joue dans mon rapport aux femmes. J'apprends de ce qui se vit de part et d'autre, de ce qui s'échange, de ce qui s'installe ou se délite.

Le plus significatif c'est que, bien que résolument anti-couple dans ma vie actuelle, j'ai choisi de rédiger un mémoire qui cherche à mieux connaître les représentations du couple ! Bizarre, non ?

D'ailleurs... je patine sur mon sujet depuis plusieurs mois. Ce qui me pose problème concerne les raisons inconscientes du choix amoureux et sa pérénnisation dans la durée...

La durée ? C'est probablement le point sur lequel j'ai le plus à m'interroger. Car en fin de compte c'est toujours au coeur de ma propre problématique. Soit que je redoute par anticipation la fin de ce qui me rend heureux au présent, soit que je craigne de devoir frustrer celle avec qui je n'aurais éventuellement plus envie de poursuivre. Inquiet de l'attachement de l'autre sur le court terme, du mien à plus long terme.

C'est pourquoi, depuis plusieurs années, je m'efforce de ne rien prévoir et de vivre les relations au présent. Je dois bien constater que, depuis, je n'ai pas "aimé" au sens où on l'entend. Serait-ce lié ? C'est un peu comme si, dans mon esprit, amour et durée avaient quelque chose d'indissociable. D'indiscernable. Amour = durée. Au point que je me demande si je saurai un jour aimer au présent, dans l'instant, sans me projeter vers ce qu'il pourra en advenir.

Commentaires
J
Je ne veux plus vivre un tel amour désormais...Etre fusionnels dans un couple, fait tellement souffrir, je n'existais que par lui et je me suis oubliée. Sortir de cette emprise fut long et douloureux mais j'y suis parvenue. Aujourd'hui, je suis plus sereine et j'aborde différemment les choses de la vie et de l'amour. Bonne soirée à vous.
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P
Josee, je vous souhaite de trouver le bonheur auquel vous aspirez. Je vous souhaite surtout de ne pas revivre un amour "fou", car il vous conduirait une nouvelle fois vers la souffrance...
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J
Au hasard de la toile, je découvre votre univers et ce texte tellement bien écrit, tellement que je m'y suis retrouvée complètement...Je comprends chaque mot que vous y'avez déposé. <br /> <br /> <br /> <br /> J'ai souffert aussi une fois,d'amour d'un amour fou, déraisonnable et aliénant. La difficulté de vivre cette vie de couple tout en gardant sa place, tout en étant l'amour, l'amante, l'amie, la confidente...Tout en gardant la complicité du début...Moi aussi je pensais que le dialogue était primordial, au sein du couple et qu'il permettait de régler bien des conflits avant que ceux-ci prenne trop d'ampleur...<br /> <br /> <br /> <br /> Je pensais qu'on pouvait s'aimer longtemps, avec un peu de compréhension, d'écoute et de pardon. Mais au final quand l'un des deux, est le seul à essayer d'avancer dans la même direction que l'autre, il arrive un moment ou on ne peut plus progresser. J'ai vécu l'enfer, après ma dernière rupture, me retrouvant à terre le coeur ensanglanté...<br /> <br /> <br /> <br /> Jurant par tous les dieux que plus jamais, je n'aimerai, que plus jamais je ne m'investirais dans une relation de couple. Mais une fois la tempête passée, je sais que je ne pourrais pas vivre sans amour, mais aussi sans cette vie de couple, sans ce partage d'amour. <br /> <br /> <br /> <br /> Juste ne plus recommencer les mêmes erreurs, prendre leçon de ce qui fut et continuer d'y croire coûte que coûte.<br /> <br /> <br /> <br /> Un jour je serais de nouveau prête à refaire le merveilleux voyage de l'amour et j'ose encore l’espérer pour un très grand voyage. Merci pour ce très beau texte. Au plaisir de vous relire.
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D
la maladresse est souvent dans ce que l'on ne dit pas ou dans ce qu'on ose dire. ce qui devient tabou est gênant, et empêche le dialogue de s'instaurer. Bizarrement c'est plus dur à supporter.
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L
Simplement une pensée pour toi Delphine. Le bonheur est en soi et tu nous montres que beaucoup de choses qui nous font souffrir ne sont que de très petits soucis... Vivre chaque jour, comme s'il allait être le dernier, c'est un précepte bouddhiste, qu'il est bien difficile d'appliquer, mais si on y arrivait, je crois que l'on vivrait mieux et plus intensément chaque instant.
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D
Josiane, pas plus de maladresse dans ton message qui me fait aussi du bien. Merci. Mais tout le monde sait aimer suffit juste de vouloir se mettre à la place de l'autre pour essayer de comprendre ce qu'il vit, et de reconnaître ce qui est important à notre vie, reconnaître l'essentiel. l'essentiel c'est d'aimer, aimer les choses que l'on a, la nature qui nous entoure, les gens qui sont là, aimer les instants, le silence comme les bruits de ce qui sont vivants, aimer les frissons que nous procure une musique, aimer son chien, son chat qui viennent se froter contre nous pour venir chercher notre main, aimer rentrer frigorifié du dehors et sentir la chaleur nous réinvestir, aimer le contact de l'eau sous la douche le matin en se réveillant ou après un travail éreintant , aimer être satisfait de soi après avoir rendu un travail qui nous a été confié... LE BONHEUR EST PARTOUT.
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J
Je viens de lire le commentaire de Delphine et je pourrais repartir sans laisser un mot...mais je ne peux parce je veux simplement lui dire qu'il me donne une leçon de courage mais aussi de grand amour. J'ai moi aussi peur d'être maladroite mais je me dis que si maladresse il y a elle viendra du fait que je ne suis pas malade je ne saurais pas trouver les bons mots...mais quand je vois combien tu sais aimer les autres, tes enfants, ta famille je me dis que tu mérites bien ce que tu désires, je comprends ce désir et le temps de cette lecture j'aurais bien voulu être cet homme qui te prendrait dans ses bras et qui te murmurerais "je t'aime" tout en comprenant tout le bien que ça pourrait te faire. Merci Delphine pour ce merveilleux témoignage! Il est beau, il est bon, il fait mal, il fait du bien, il me fait relativiser mes petits problèmes..il est tout ça à la fois...
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P
Aaah, cette tonalité me plaît, Delphine :o)
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D
mieux vaut vivre un peu de maladresse par la sincérité (et si peu) que de vivre l'hypocrisie et même si mon désir ne trouve pas satisfaction j'aurais continué à espérer... Et comment mieux avancer que de croire en la vie (même quand on vous en raccourcit le temps).<br /> Et l'amour partagé n'en ait qu'une partie, même si celle ci me paraît importante, mais je sais qu'il y a tous le reste dont trois enfants qu'il faut préparer, des parents qui vieillissent, des frères et soeur que l'on fait forcément souffrir en annonçant sa maladie (on se sent coupable que envers ceux qu'on aime sans aucune prétention), et puis il y a les oiseaux, les papillons, le soleil, avoir froid et se réchauffer avec un chocolat chaud, se sentir vivant, parler à un cheval, voir les fleurs s'épanouir, la neige retomber, la pluie nou pénéter tant de chose... et savoir dire je t4aime à ceux qui sont important et qui sont là, qui n'osent parler de la douleur qu'on leur impose quand on leur annonce la maladie... tant de chose. veux bien être un instant insousciante dans les bras d'un homme important à ma vie pour faire le poids face à tant de responsabilités
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P
La sincérité peut être maladroite ;o)<br /> <br /> Je me réjouis de savoir que vous "vivez", même si votre désir n'a pas encore obtenu satisfaction.
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