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Alter et ego (Carnet)
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21 novembre 2015

En réflexion

Une semaine après le choc je demeure un peu perturbé. Calme mais préoccupé. Concentré. Disons... absorbé. Ce n'est un état ni de tristesse, ni d'abattement : je suis en réflexion. Ça travaille en dedans. Et ça bouge...

Les attentats du 13 novembre ont été l'élément déclencheur, ravivant l'effroi du 7 janvier et autres évènements antérieurs à forte portée symbolique. Cette fois encore la perturbation s'est étendue en moi bien au delà des faits, remettant en mouvement des idées restées latentes. D'abord il y a eu ce sentiment de fragilité de nos vies face à la violence aveugle. Ressenti moindre, par habituation. Et puis, parce que j'ai la chance de vivre en un lieu où les risques sont infimes, c'est resté assez abstrait pour moi. Je ne me suis pas dit que « ça aurait pu être moi ou un de mes proches ». J'ai évité de m'identifier. Garder l'émotionnel à distance, lorsque c'est possible, me semble préférable.

Un second effet, presque simultanément, m'a atteint : constater une nouvelle fois que notre mode de vie ancré dans un principe de liberté est, sur un plan moral, à ce point intolérable à quelques intransigeants extrêmistes qu'ils sont prêts à tuer à l'aveugle pour cela. L'intolérance absolue. Par contrecoup ce qui m'a perturbé c'est que l'origine des tueurs, nés parmi nous, nous renvoie aux défaillances de notre capacité à accueillir et intégrer l'étranger. À notre propre (in)tolérance, en quelque sorte...

Oui, je sais que c'est plus complexe que ça, mais l'idée est là, quand même : globalement le "différent de nous" n'est que toléré. Egalité et fraternité font trop souvent défaut.

La troisième phase de ma réflexion, dans laquelle je suis entré depuis peu, résulte de ce que j'ai entendu sans vraiment réagir sur le moment : « nous sommes en guerre ». Ces mots seraient venus de quelque éditorialiste prompt à l'outrance, j'aurais trouvé ça stupide mais pas vraiment étonnant. Or ils ont été prononcés par les plus hauts personnages de l'état et je vois là une grave irresponsabilité sémantique. J'attends d'eux davantage de sang-froid et de discernement, de mesure, de justesse. Non, nous ne sommes pas dans un pays en guerre ! L'usage de termes aussi forts ne peut qu'inquiéter, éveiller des réflexes défensifs, faire fuir ceux qui apprécient notre art de vivre, fut-il un peu usurpé. Nous avons subi une attaque (que d'aucuns pourraient considérer comme une riposte...), mais nous ne sommes pas en guerre. Ces derniers jours j'ai vu circuler une phrase d'un ministre norvégien après l'attentat d'Oslo et la tuerie d'Uttoya : « Nous allons répondre à la terreur par plus de démocratie, d’ouverture et de tolérance ». J'ignore quelles suite il y a eu mais j'aurais aimé entendre cela de la part de nos chers gouvernants. J'aurais aimé les voir prendre le temps d'apporter des réponses réfléchies, constructives, autocritiques. Intelligentes, quoi, à la hauteur de leurs fonctions...

Une partie de la population a peur ? C'est bien légitime, juste après un tel choc. Faut-il pour autant agiter des "solutions" immédiates, simplistes et totalement illusoires ? Pour satisfaire qui ? Aucun état n'a la capacité de se protéger au niveau du risque zéro. Laisser croire que c'est possible est mensonger ; le croire est naïf. La meilleure riposte c'est de continuer à vivre, à rire, à s'aimer. Être vigilants, certes, mais vivre. D'ailleurs c'est la bonne surprise qui nous est apparue, une nouvelle fois : des élans de solidarité, de compassion et de bienveillance, mais aussi une belle énergie gourmande de vie. Le mieux que nous puissions faire c'est de nous saisir de telles situations pour nous ouvrir aux autres, à leurs idées et à leur part d'inconnu. Apprendre à se connaître.

Je l'énonce de façon générale mais c'est bien évidemment à mon égard que je le formule : on est jamais trop ouvert à l'autre ni trop curieux. J'ai tellement à apprendre, encore, et la chance d'avoir accès à internet, source inépuisable de découvertes, de connaissance, d'information, de savoir et de satisfaction pour qui veut s'instruire et mieux comprendre l'actualité...

 

 

Commentaires
K
Je n'ai eu le temps que de survoler les commentaires, mais j'y reviendrai, ça m'intéresse beaucoup de comprendre le point de vue de chacun.<br /> <br /> Moi aussi il m'a fait un drôle d'effet le précipité « nous sommes en guerre », <br /> <br /> comme s'il s'agissait d'une occasion qu'on attendait pour enfin mettre notre plan en marche. Et le plan, je pense que c'est de changer la constitution. C'est cousu de fil blanc.<br /> <br /> "Pour le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon, la messe est dite: "Cette volonté d'inscrire l’état d’urgence dans la Constitution, sans aucune implication du peuple, tout en le renouvelant immédiatement pour 3 mois, instaure un état d’urgence permanent contraire aux libertés fondamentales."
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A
"« nous sommes en guerre ». disent des politiques....<br /> <br /> Je vois pas ce qu'il y a là de nouveau.<br /> <br /> La France est en guerre sur bien des terrains et bien des pays, depuis toujours... soit directement, soit par le biais d'alliances. Les soldas français y meurent régulièrement, mas ça ne nous faisait globalement jusque là ni chaud, ni froid.... Apres tout ce sont des "professionnels" qui se font tuer pour nous.... sont payés pour ça !! <br /> <br /> <br /> <br /> La différence c'est que nous venons de sortir de la "parenthèse enchantée" du quasi-demi siècle précédent où le combat était sur des terres lointaines.<br /> <br /> La différence c'est que désormais c'est sur le territoire français que les morts s'accumulent. et que l'EI est bel et bien un "état guerrier" disposant de moyens, de richesses, de terres conquises, d'une armée où de gentils français vont s'enrôler... On peut discuter à l'infini sur leurs raisons et sur leur endoctrinement, le fait est qu'ils sont grosso-modo 7000 identifiés en France et désirant en découdre contre nous et sans doute au moins la moitié d'entre eux (estimation personnelle...) est à désirer notre mort.... l'EI leur en fournit les moyens effectifs...<br /> <br /> La différence c'est que la guerre dite "conventionnelle" a vécue. Elle a adoptée des formes nouvelles, plus aveugles et horribles que jamais....<br /> <br /> <br /> <br /> "en guerre".... oui, nous y sommes !<br /> <br /> faut ouvrir les yeux sur le réel...<br /> <br /> Il est cruel mais il est....<br /> <br /> Hélas !!
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G
Bonjour Pierre, je suis une lectrice assidue mais restée anonyme jusque là. Je ne suis encore jamais intervenue alors que j'ai quelques points communs notamment autonomie &liberté mais pas celui de les exprimer de manière aussi élaborée ;)<br /> <br /> Concernant l'actualité cela m'est plus facile même si j'ai laissé passer les événements de janvier. Cette fois je ne peux m'empêcher de mettre les pieds dans le plat tellement je suis étonnée par certaines remarques. Avant d'y répondre je veux dire que je suis parisienne et que j'ai voyagé un peu partout dans le monde sans jamais avoir peur ni me dire que cela aurait pu être moi. Je ne l'explique pas. Par ailleurs j'ai énormément cherché à comprendre ce qui se passe avec l'EI grâce aux livres, à internet et certaines émissions comme "C dans l'air". <br /> <br /> <br /> <br /> Comparer ce qui s'est passé en Norvège avec les attentats du 13.11 me sidère complètement. En Norvège il s'est agi d'un loup solitaire ayant sa propre doctrine à la limite comparable aux tueurs de Columbine aux USA.<br /> <br /> En ce qui nous concerne tout a été orchestré par une organisation terroriste bien connue et installée . J'ai longtemps refusé d'admettre que l'EI puisse se dénommer comme un état mais force est de constater que ça y ressemble avec un territoire, des ressources et une organisation très structurée. Il n'est donc pas inconcevable de se dire en guerre contre un état alors que cela le serait contre un psychopathe ou même une organisation terroriste autre. Par contre certains pensent que se déclarer « en guerre » contre l'EI donne une forme de légitimité à ses actions. Le débat est plutôt à ce niveau là je trouve. De ce point de vue j'arrive à être d'accord avec tout et son contraire. En fait plus ça va et plus je me dis qu'il est difficile d'appréhender ce système avec notre culture occidentale.<br /> <br /> <br /> <br /> C'est alors que je rebondis sur le deuxième effet évoquant liberté et intégration. A la première notion j'entends les spécialistes rétorquer que le but de ces attaques est avant tout de créer le chaos. Monter les communautés les unes contre les autres. Provoquer une guerre civile. Et au final prendre le pouvoir. Quant à l'intégration il est montré que la plupart de ces jeunes ne sont plus "sans père ni repères". Certains experts essaient de dire qu'il faut se défaire des idées qu'on avait jusque là concernant les candidats au jihad.<br /> <br /> <br /> <br /> Concernant le territoire national je ne vois pas comment l’exécutif aurait pu ne pas prendre certaines mesures d'urgence d'autant plus que l'un des hommes du commando terroriste a disparu dans la nature. Les français ne veulent pas attendre le temps de la réflexion. Je ne pense pas qu'ils soient dupes pour autant. Ce ne sont pas 1500 militaires de plus ou de moins qui vont empêcher un autre attaque mais en attendant cela en rassure beaucoup et peut empêcher des personnes moins organisées d'avoir l'occasion de passer à l'acte. Cela ne doit pas interdire de penser à de meilleures mesures pour le long terme.<br /> <br /> Quant à l’intervention extérieure je suis beaucoup plus circonspecte d'autant que je place GW Bush et Bachar el-Assad au même rang niveau atrocités.<br /> <br /> <br /> <br /> Oui internet est un formidable moyen pour s'informer et échanger mais que penser du fait que ces jihadistes puissent y propager leurs horreurs et enrôler massivement... Je n'arrive pas à négliger la responsabilité de réseaux et sites qui laisse diffuser des discours de haine et d'aliénation ou autres abominations parce que la constitution américaine le permet et que le ménage volontaire coûterait cher à ces entreprises pourtant milliardaires. On arrive à la limite de l'ultra libéralisme.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour les liens dont je n'avais pas eu connaissance et qui sont très instructifs. J'en ai lu d'autres dans le genre mais je n'arrive plus à réaliser un tri dans la masse de tout ce qui a été écrit cette semaine. De ce point de vue là je suis loin de pouvoir synthétiser quoi que ce soit. Merci donc de donner une possibilité de le faire :)
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L
Tu me pardonneras de ne pas commenter sur ce sujet en ce moment, besoin de recueillement, de beauté et de douceur...<br /> <br /> <br /> <br /> https://www.youtube.com/watch?v=8U4jxWU2cYU
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N
Bonjour,<br /> <br /> <br /> <br /> Tout d'abord merci pour ces références que je vais aller lire. Les paroles de Cloudy me semblent fort justes . <br /> <br /> Je ne suis pas entièrement d'accord avec : " notre mode de vie ancré dans un principe de liberté", n'ayant jamais vécu à l'étranger ni vraiment voyagé, je ne peux pas établir de comparaison mais il me semble que notre mode de vie est davantage ancré sur le libéralisme que sur la liberté qui est respect de la personne Lorsque pour me faire changer de voiture, ce qui est préjudiciable à mon budget, nuisible à la planète mais crée des emplois (ici ou ailleurs) et enrichit quelques actionnaires, on me propose une jeune femme dénudée en premier plan de l'affiche, j'y vois davantage une atteinte à ma liberté (et à la sienne). Et je ne veux pas oublier que ce mode de vie est loin d'être accessible à tous. <br /> <br /> <br /> <br /> Je me permets de suggérer un autre angle d'approche, je pense que nous touchons là les limites d'un mode de pensée (et d'éducation) dominant qui consiste à évacuer toute spiritualité, toute éducation à l'intériorité, toute référence à la transcendance (je ne suis certainement pas assez précise dans mon vocabulaire) du domaine de l'éducation nationale et même de l'expression admise en public. Si je voulais être provocatrice je dirais que cela dérive d'une laïcité mal comprise ou plus précisément qu'à force de vouloir effacer de l'éducation et donc des concepts accessibles tout ce qui a trait au spirituel, d'une part nous nous sommes coupés d'une partie des hommes (et des femmes) et surtout que nous avons laissé le champ libre à de dangereux manipulateurs. J'ai l'impression que nous sommes dans la position de nos missionnaires ( ;-) ) qui découvraient les contrées lointaines et n'avaient pas les éléments pour comprendre les civilisations qu'ils découvraient. Ils découvraient, nous avons refusé de voir.<br /> <br /> Pour autant je reconnais que les "autres " ont aussi leur part entière de responsabilité.<br /> <br /> <br /> <br /> Je reviens aussi sur un article qui affirme que la France a été attaquée du fait de son art de vivre : sortir, écouter de la musique, aller au stade, les bons repas, des relations amoureuses libérées .... Cela me semble un peu court, j'aurais pensé(aussi) à nos scientifiques, nos écrivains, nos commissaires d'expositions etc... et pas nécessairement aux créateurs de mode (même si la passionnée d'art textile sait apprécier la coupe d'une robe et le tombé d'un tissu). <br /> <br /> <br /> <br /> Merci de m'avoir donné ce espace d'expression libre mais comme c'est le tien tu peux supprimer ce commentaire.<br /> <br /> Bon dimanche
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C
Comme je te rejoins Pierre et sur la plupart des propos énoncés ici.<br /> <br /> La nécessaire mise à distance, le questionnement (encore) face des politiques alarmistes, agissant à court terme plutôt que sur le long terme, notamment en cette période proche d'élections.<br /> <br /> Nous avons tous à faire notre auto critique. Sur notre façon de considérer l'autre, de l'accueillir, de vivre avec lui en bonne intelligence et dans le partage.<br /> <br /> Pourtant, je dois le dire, mon expérience de terrain (petite) et néanmoins très concrète, me fait dire que "l'autre" doit aussi accepté d'être accueilli, se donne les moyens d'accepter certains codes, pour tendre vers une unité dans la différence.
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