Suite des palpitantes aventures professionnelles qui me préoccupent quelques peu ces derniers temps. Billet "sérieux", donc...

Je me suis fixé un cap : agir pour que l'humain soit davantage pris en compte dans la structure - à finalité sociale - qui m'emploie. Depuis trop longtemps j'ai cédé devant des positions de principe qui, par blocage répété, m'ont découragé d'insister [c'était leur but...]. Aujourd'hui, face aux conséquences d'une inertie dont les effets démobilisateurs sont palpables, je veux voir réellement prise en compte la problématique laissée en deshérence. Je veux que les choses changent vraiment, qu'un authentique dialogue s'ouvre, et sans tarder. Même s'il faudra du temps, qu'au moins le mouvement s'enclenche.

Avec un certain plaisir je constate que mes récentes prises de position ont eu de l'effet puisque le sujet abordé la semaine dernière est revenu à l'ordre du jour, cette fois à l'initiative de mon directeur, en réunion de direction hebdomadaire. En a découlé un échange de points de vue plus poussé, élargi, et avec une inhabituelle franchise réciproque. De nouveau j'ai mis les pieds dans le plat, rappelant mes alertes répétées restées sans suite, pointant clairement les dysfonctionnement managériaux, les désaccords, les risques dûs au surmenage, quitte à paraître alarmiste ou dépassé. Clairement, j'ai lâché ce que j'avais sur le coeur. La posture est délicate : clamer son sentiment d'impuissance et son découragement pourrait laisser penser qu'on ne maîtrise pas son poste ! J'ai parlé avec fermeté, mais calmement, en alternant les faits et les ressentis. Je n'ai pas occulté l'aspect émotionnel qui, d'ailleurs, aparaissait certainement avec évidence dans ma détermination. Une de mes homologues, plus ancienne que moi dans la fonction, a surenchéri en évoquant son propre désinvestissement au fil des ans, faute d'avoir été entendue. La direction a encaissé, visiblement ébranlée par ce ralliement à mes propos. Ce "soutien" m'a fait grand bien.

Le mouvement s'amplifie, donc, voire s'emballe quelque peu : un vent de révolte collective s'est levé après qu'une grille des salaires soit opportunément apparue, révélant quelques inéquités flagrantes. Grosse colère de la part des lésés, nourrie par un sentiment d'injustice et une insatisfaction latente. 

Cette effervescence a quelque chose de réjouissant : on se prend à croire que les choses pourraient changer, par la force du groupe. D'un autre côté je reste lucide : ça ne sera pas simple. Je ne crois pas aux miracles, ni aux conversions instantanées, et la direction ne va pas changer subitement de politique en matière de ressources humaines. Quant aux déclarations les plus virulentes entendues dans le microcosme des salariés revendicatifs, je m'en méfie : face aux décideurs elles se dégonflent comme un soufflé.

L'important, maintenant, c'est de convertir colère et ressentiment en initiatives constructives, avant que le découragement ne reprenne le dessus. Cela tient de l'alchimie : transmuter du plomb en or. Il y a un potentiel à organiser, à fédérer, à orienter afin de ne pas le voir se dissiper en gesticulations stériles. Il y a des idées à organiser, une stratégie à mettre en place, un plan d'action à élaborer. Et comme toute transformation cela demande un apport d'énergie...

J'ai une force : croire que le changement est possible. J'ai des atouts : avoir envie d'impulser le mouvement et les capacités pour le faire. Mais j'ai une limite : le risque de découragement. J'ai aussi des freins : le syndrome de l'imposteur. Qui suis-je pour prendre la parole ? Quelle est ma légitimité ? Suis-je représentatif ? Ai-je raison ? Et si c'était moi qui étais inadapté en voulant que l'humain ait sa place dans l'économique ? Et si mes utopies étaient incompatibles avec le monde réel ? J'ai donc besoin de me sentir soutenu par mes collègues et entendu par les responsables. La conjonction actuelle semble favorable et j'en profite. Maintenant il me faut clarifier mes idées afin de proposer des axes de travail, une stratégie d'action. Bref, prendre un rôle de leader... quitte à empiéter sur les prérogatives de mes supérieurs.

Pas simple...

Tout ça pour dire que la démarche que j'entreprends et le mouvement qu'elle entraine m'occupent beaucoup l'esprit. Il ne reste guère de place pour le reste. Est-ce la raison pour laquelle je me sens... "vide" ? Sans désirs ? J'ai l'impression [sans doute fausse...] de n'avoir rien à offrir. C'est comme si mon énergie vitale avait disparue. D'ailleurs je privilégie la solitude, autant par besoin personnel que pour ne pas imposer aux autres ma présence anémiée. Mais du même coup je me prive d'éventuels apports extérieurs, qui pourraient m'être profitables...

Aaaarh, tout ça m'embête un peu [d'autant plus que ça dure !]. J'ai hâte de retrouver de la ressource ! Et même de la joie de vivre communicative, si ce n'est pas trop demander.

Heureusement, le moral tient bien le coup :)

[c'est quand même bizarre ces variations d'énergie vitale...]

 

 

IMGP9585

Printemps précoce