Croire aux possibles
Suite de ma réflexion sur l'auto-limitation
Entreprendre une action d'envergure nécessite d'être porté par une motivation forte. Une envie d'agir, impérieuse et nécessaire, venue des profondeurs de soi. Une forme d'énergie dont on ignore l'origine mais qui nous propulse au delà des limites habituelles. Parvenir à se surpasser ainsi, mû par l'audace, peut donner l'impression d'avoir des ailes. C'est aussi, me semble t-il, une prise de risque car cette puissance vitale n'est pas illimitée. Tôt ou tard elle devra être alimentée par la satisfaction de voir les efforts récompensés. L'on s'épuiserait à se consumer sans nouvelles ressources.
Quel que soit l'objectif et le projet, qu'il soit professionnel, sportif, amoureux, intellectuel ou manuel, fixe ou itinérant, continu ou intemittent, à court ou long terme, vient un moment où, passé l'élan initial, l'épuisement guette. Et avec lui la remise en question : en suis-je capable ? Ai-je encore envie de poursuivre ? Jusqu'où ? Jusqu'à quand ? C'est pourquoi celles et ceux qui ont l'endurance de garder le cap malgré les difficultés, malgré la solitude, malgré les déconvenues, forcent l'admiration.
Doser son effort, respecter son corps et son mental, s'accorder du temps... autant d'élements à prendre en compte pour perséverer. Et, toujours, s'assurer que la gratification est là ou à venir. Même si elle est minime, qu'au moins elle surpasse l'effort consenti. Car je ne crois pas que l'on puisse se surpasser soi-même longtemps sans compensation.
Si j'écris cela c'est parce que je mesure la difficulté qu'y à a s'engager seul dans une démarche de mise en mouvement collectif. L'énonciation de cette phrase m'apparaît dans toute son absurdité : par définition un collectif ne saurait être mû seul ! C'est pourtant ce que j'essaie de faire, sans grand résultat, dans le secteur dans lequel je vis. M'appuyant sur l'énergie collective née durant les élections municipales j'essaie de continuer à impulser la mienne... sans me sentir accompagné ni soutenu. Quelle que soit ma motivation, je vais m'épuiser si je poursuis ainsi.
Cela me rappelle une relation de grande intensité dans laquelle je me suis épuisé en voulant maintenir un flux d'échange que je sentais, à tort ou à raison, se tarir. Bien mal m'en a pris...
Je pense aussi à divers projets entrepris à deux ou à plusieurs, très motivants, gratifiants... mais plus ou moins rapidement abandonnés par mes partenaires.
Je pense enfin à mon implication dans l'écriture en partage pour laquelle, manifestement, les retours ne me nourissent plus suffisamment. Je veux d'ailleurs remercier ici les quelques personnes qui, par leurs réactions et commentaires, stimulent encore mes sporadiques velléités d'écriture. Là ce n'est pas moi qui m'épuise mais mon inspiration qui s'amenuise.
Inéluctablement, semble t-il, ces diverses expériences d'interactions avec autrui me ramènent vers un mode de relation principalement solitaire. Mes ressources intérieures ne me permettent pas, sans soutien, d'apporter une énergie de... leader [c'est le mot qui me vient]. Je pourrais sans doute fédérer un groupe mais j'ai besoin de sentir la force du collectif derrière moi. C'est un peu la même chose dans une relation, ayant besoin de me sentir... attendu ? désiré ? pour entreprendre.
Je trouve cela un peu triste de savoir que quelque chose me bride dans mes élans de spontanéité contrariée. Et désolant de constater qu'un manque de confiance en soi puisse durer ainsi toute une vie, malgré de constantes améliorations. J'ai encore à travailler là dessus, à l'évidence. Parce que, vraiment, j'aime beaucoup quand ce que je veux devient possible parce que j'y crois...
Queyras, septembre 2020