À l'improviste
Cette nuit je me suis vu mourir.
Réveillé subitement à 1h30 du matin, sans raison apparente, je me tourne dans mon lit pour changer de position. Une poignée de secondes plus tard je sens un point de douleur ventral, en bas de l'abdomen. Quelque chose de bizarre, jamais ressenti auparavant, et qui, selon sa localisation, me fait immédiatement penser à une crise d'appendicite. Le temps que je me demande si cette étrange douleur allait passer, elle redouble d'intensité. Puis encore, encore, encore. Une péritonite ? Moins de deux minutes après mon réveil intempestif la douleur est devenue intense et je suis pris de nausée. Presque aussitôt une sensation de fièvre me saisit, tandis que je tente de me lever en titubant, étourdi de vertige. Téléphone en main, j'envisage déjà un appel aux urgences, me demandant si je serais en capacité de m'exprimer au vu de la rapidité avec laquelle mes capacités physiques se dégradent. Me demandant surtout si je tiendrais le coup durant les trente minutes, minimum, que mettraient les secours à arriver. Vacillant, je tente péniblement de m'habiller pour me préparer à un départ en ambulance. Souffle court, je me dis que je vais peut-être mourir là, bêtement, sans aucun signe anonciateur. Que faire ? Qui prévenir ? En pleine nuit, je n'allais quand même pas déranger ma fille. Vite écrire quelque chose à mes enfants ? Trop tard pour tout le reste... Zut, j'ai une réunion importante lundi. Est-ce que j'appelle les urgences ? Les hôpitaux sont en surcharge Covid. Je ne veux pas les déranger pour rien. Puis-je mourir comme ça, d'un coup, dans un corps qui perd rapidement ses facultés opérationnelles ? Ma volonté n'a plus prise sur ce corps qui se dérobe, répond mal. Sensation de totale impuissance. Mon corps me lâche. Comment font les gens là où un système de santé n'existe pas ? Mes pensées fusent en tout sens...
Dans un état cotoneux, vacillant et évasif, transpirant et grelottant, je réussis quand même à descendre l'escalier, m'affale sur ma chaise et allume l'ordinateur pour tenter de confirmer mon "diagnostic" de péritonite. Je sais bien que, dans ce cas, il s'agit d'une situation d'urgence absolue - ce que me confirme internet - mais y a t-il des attitudes à avoir ou ne pas avoir ? Ne pas boire, ne pas manger, en vue d'une anesthésie générale...
Et puis la douleur se stabilise, mon état général s'améliore. Vais-je appeler le numéro d'urgence ? Il s'est écoulé une trentaine de minutes depuis le début de la crise. Profitant de cette décrue je m'affaire... à remettre un peu d'ordre dans ma maison. Si des ambulanciers viennent, je ne veux ne pas être trop gêné de mon ménage aléatoire. Finalement la douleur s'estompe jusqu'à disparaître totalement. Mon état général redevient normal... et une heure après cette alerte je retourne me coucher.
Nuit excellente, aucune douleur résiduelle.
Rien.
Juste cette sensation de vulnérabilité face à l'imprévu qui peut survenir à l'improviste. Et ce corps qui me lâche...
Il faudra quand même que je consulte un médecin...
Un jour de plus