Mon temps était ce tout
Deux mois se sont écoulés sans que je n'écrive une ligne, ni même n'en ressente l'envie. L'écriture et moi, nous nous sommes éloignés. C'est un peu comme une séparation : peu à peu les liens s'étiolent et un jour on se surprend à ne plus y penser. J'écrivais tant, jadis...
Je pourrais me demander ce qui fait que cette relation de moi à moi, dont le témoignage écrit engendrait de surcroît une "relation" avec vous qui me lisiez, s'est atténuée au point de presque disparaître. Je pourrais, certes... mais cela me demanderait un temps d'introspection qui, finalement, ne m'intéresse plus vraiment. Mon temps, je le consacre à moult occupations desquelles l'égocentrage a quasiment disparu. Peut-être cela reviendra t-il un jour, mais pour l'heure ce n'est plus là. D'autres réflexions ont pris la place. D'autres relations aussi.
Oh, il suffirait de pas grand chose, de presque rien, pour que je reprenne langue avec le dialogue intérieur. Ce "presque rien" ce serait seulement du temps libre en abondance. D'un autre côté une telle abondance pourrait bien être consécutive d'une forme de vide existentiel et relationnel. Le temps disponible, quand il est abondant, quand il n'est pas compté, ne confine t-il pas à l'ennui ? N'est-ce pas la rareté du temps libre et choisi qui en fait toute la valeur ?
Hier je suis allé prendre des photos d'automne. J'avais la journée devant moi et aucun programme. J'ai laissé ma curiosité et mes pieds me porter. Aller un peu plus loin sur le chemin, monter un peu plus haut pour avoir une vue plus dégagée. Me rapprocher de la longue falaise abrupte, pas après pas. J'aurais pu redescendre et aller ailleurs mais je subodorais que le spectacle était à son apogée. Au pied des éboulis, alors que le panorama était déjà superbe, j'ai choisi d'aller à droite, au delà d'une arête. Le spectacle était splendide, tout d'or et de roux sous le pur bleu du ciel. J'ai pris le temps de contempler, de m'assoir, de respirer à plein poumons et d'écouter le silence. Au moment de revenir sur mes pas, j'ai été tenter de monter encore, vers la gauche cette fois. Suivant la sente, de plus en plus escarpée, je suis entré dans le raide couloir qui montait vers le plateau. Tant et si bien que j'ai fini par atteindre ce vaste territoire d'altitude, où la vue porte si loin vers l'ouest. Je me suis assis, béat d'admiration. Le son de quelques cailloux dégringolant la falaise attira mon attention vers des bouquetins insensibles au vide au dessus duquel ils se prélassaient. Dans le ciel, quelques vautours fauves planaient.
J'ai pris tout mon temps. Mon temps était ce tout.
En écho avec les écrits de Célestine
Une envie de grimper la haut...
Balcon Est du Vercors avec, au fond, le Mont Aiguille
Haut plateau du Vercors
La brêche qui permet d'atteindre le plateau