Garder trace

« En ce début d'année, je me suis attaquée à une véritable falaise : éditer en format livre papier l'ensemble de ce blog, qui fêtera ses quinze ans dans quelques semaines ».

Mon amie Célestine, grande écrivante et ciseleuse de mots, a décidé de garder une trace imprimée des textes de son blog. Elle a tout à fait raison, ses écrits aux accents poétiques se prètent bien au partage et à la relecture. Elle a d'ailleurs déjà publié un recueil de ses textes, issus d'un autre blog, ainsi qu'un roman.

De mon côté j'ai souvent pensé à l'éventualité de matérialiser sous forme papier les réflexions, cogitations et autres impressions déposées ici ou là. L'envie est discrète mais persistante, déjà ancienne, sans que je ne passe à l'action. C'est que, fidèle à mon besoin de sens autant qu'à ma nature exigeante, j'entrevois déjà les tergiversations qui vont m'animer : qu'est-ce que je garde, qu'est-ce que j'exclus ? Conservation chronologique ou par thème ? À destination du cercle familial ou plus ouvert ? Avec ou sans photos ? 

Je pressens qu'on ne lit pas un ouvrage papier de la même façon qu'un blog. On ne lit pas non plus de la même façon une suite de textes et ces mêmes textes s'ils sont accompagnés de photos. On ne lit pas un récit chronologique de la même façon qu'un assemblage thématique.

Qu'ai-je envie de donner à lire ?

Mais... s'agit-il de "donner à lire" (viser l'intérêt du lecteur) ou de "garder trace" (témoigner) ? Dans le premier cas cela tiendrait du "servez-vous", dans le second cela s'assimile à un "moi je" dont l'ambition est questionnable. Les deux options portent bien l'idée de partage, mais pas du même trésor. Suis-je immodeste si je pense que le "trésor" est cette pensée hésitante, sinueuse, incertaine qui émane de moi, ou bien suis-je prétentieux d'imaginer que mes écrits puissent avoir quelque importance au delà du strict cadre familial ?

La question se pose trivialement dès le départ : est-ce que je vise une édition très limitée (mes enfants, voire ma fratrie) ou potentiellement plus large (sans savoir qui pourrait être intéressé). Le choix des destinataires pourrait largement influer sur celui des textes retenus.

J'ai l'impression assez nette qu'il me revient de décider quel objectif de diffusion je vise avant d'entreprendre quoi que ce soit.

Photo du net

Comments

[Célestine]

La mise en forme de ces écrits m'a pris beaucoup de temps, et du coup, j'ai loupé ce billet ! Je voudrais te remercier pour ce discret hommage à mon travail, et te dire que je me tiens à ta disposition si tu as besoin de « tuyaux » supplémentaires sur les côtés pratiques de l'opération.

Sur le fond, je trouve intéressant de te poser les mêmes questions que moi au préalable. Il est toujours bon d'avoir un objectif bien défini avant de se lancer.

J'ai décidé de ne pas publier les commentaires, il y en avait beaucoup trop, et dans tous les sens, et ce faisant, le parti s'est pris tout seul : garder une trace de mes écrits, un témoignage pour ma descendance. Point barre. J'ai craint que les commentaires alourdissent considérablement l'ensemble.

Mais il est vrai que nous n'écrivons pas dans le même registre, et que tes textes trouvent souvent un éclat magnifique dans les dialogues qu'ils génèrent. J'espère que tu répondras à tes interrogations...



Je t'embrasse

•.¸¸.•*`*•.¸¸☆

[Ellinda]

Je ne peux que t'encourager à mettre en place ce projet .......

[calamityjane]

La réécriture de texte à posteriori m'interpelle...

L'émotion originelle ne serait-elle pas modifiée voire perdue avec le recul ?

Il s'agit en effet de définir le lectorat, parce que tes textes seront forcément différents si tu veux faire plaisir aux lecteurs ou si tu veux exposer tes ressentis réels à un moment donné de ta vie.

Toi seul sait ce que tu veux laisser à la postérité.

Ça demande réflexions et tergiversations, mais pas trop ;)

PS : tu es heureux de lire les écrits de ta maman, pourquoi tes enfants n'apprécieraient pas?

[Alainx]

L'objectif pourrait rassembler les deux branches : donner à lire des traces qui témoignent de toi tout en visant l'intérêt du lecteur.

Tu as tenu (tu tiens encore épisodiquement) un blog pour être lu et tu as été beaucoup lu parce que le lecteur (dont je fus) y trouvait de l'intérêt tant pour lui-même que dans le partage.

La publication d'un livre papier ne peut être la compilation de textes d'un blog. Il faut une mise en page spécifique et surtout un choix des textes avec parfois une nécessaire réécriture pour être lisible et compréhensible par tous, notamment les non-blogueurs.



C'est ce que j'ai fait avec une sélection de 120 textes sur 10 ans d'écriture et une réécriture partielle indispensable pour rendre à la fois plus compréhensible et un peu plus littéraire.

J'ai tiré de cette expérience beaucoup de satisfactions personnelles et mes lecteurs aussi. Je vois parfois que, çà et là, certains citent dans leurs écrits des passages du livre, à mon grand étonnement.

De même une publication nous échappe totalement. Le livre peut passer de main en main, c'est la liberté du lecteur. Via l'éditeur j'ai même reçu des écrits de personnes qui m'étaient totalement inconnues.

Si tu as le goût de faire cela, fais-le, c'est très instructif…

Mais si tu tergiverses trop dans des questions inutiles parce qu'on se les pose… inutilement… il y a de grandes chances que ça ne voit jamais le jour !