Hommes et femmes
J'ai envie d'aborder un de mes sujets de prédilection, pourtant peu exploré dans ce blog. Je veux parler de la distinction hommes/femmes.
Je suis... extrêmement circonspect dès que je vois apparaître cette différenciation, pour ne pas dire méfiant... S'il y a bien des différences comportementales (oui, physiques aussi...), je crois qu'elles sont très fortement accentuées par la société et la culture. Et bien souvent je vois une tendance marquée à se fier à des observations pour en tirer des conclusions hâtives.
Exemple: je suis en formation, et nous explorons l'adolescence. Il y est beaucoup question de différences comportementales entre garçons et filles, et certaines de mes "collègues" de formation, se lâchent quelquefois pour villipender le comportement "des hommes", comme s'ils étaient une masse homogène bien distincte des femmes sensibles-intuitives-attentives-expressives-émotives... bref ce que j'appelle des clichés. En tant que seul homme je me permets d'apporter une autre version des faits, qui bouscule parfois quelques certitudes. On me répond alors en plaisantant un « oui, mais toi t'es spécial... ». Je ne rentre pas dans le cadre "homme", alors on m'en sort, comme si j'étais un cas à part. C'est quand même bizarre... Plutôt que de se dire « tiens, ça ne colle pas avec l'étiquette que je colle sur les hommes », il semble plus facile de la laisser en place et de me considérer comme un spécimen isolé, un peu bizarre.
C'est assez intéressant à observer (et je dois dire que je me régale...). D'une part parce que ce sont les femmes les plus "militantes" et revendicatrices de la condition féminine qui caricaturent ainsi les hommes. D'autre part parce qu'en accentuant cette distinction, ces femmes ne font que renforcer et entretenir le système qu'elles prétendent combattre. En considérant qu'un homme est trop balourd pour comprendre certaines subtilités, trop aveugle pour comprendre ses enfants, trop incapable de bien effectuer certaines tâches domestiques elles s'aproprient de fait certains domaines qu'elles réservent au féminin. Elles excluent les hommes du féminin. Je me retrouve donc à avoir des propos plus féministes que des femmes qui se plaignent de l'inégalité des rapports homme-femme ! A noter aussi que ces femmes-là sont très sûres de leurs certitudes ! Et même si mon insistance à vouloir gommer ces fausses différences est confirmée par une formatrice, psychologue, je vois une moue dubitative sur mon interlocutrice signifiant clairement qu'elle n'est pas convaincue par nos arguments. Je me régale d'autant plus qu'il y a quelques années je faisais partie de ceux qui surévaluais nombre de différences comportementales en les attribuant à des différences quasi-génétiques. Que de bêtises on affirme à coup de « mais c'est évident ! », ponctués d'exemples observés dont il est aisé de tirer des généralisations.
Je pense à des bouquins du genre "Les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus" qui colportent et entretiennent ces différences comportementales, enfermant un peu plus chaque sexe dans un rôle prédéfini dont il ne pourrait pas s'extraire. Ce déterminisme me sidère ! Car même si le rôle explicatif de ce genre de bouquin est utile (mieux comprendre l'autre), circonscrire les individus dans un cadre me semble non seulement stupide, mais en plus sclérosant. Et au détriment de qui ? Des femmes ! Entretenir cet ordre "naturel" (avec gros guillemets) encourage à l'immobilisme, donc au maintien des inégalités. C'est vraiment le genre de bouquin à double tranchant, qui fait autant de mal que de bien. Et le pire... c'est que c'est devenu toute une collection de best-sellers... Affligeant !
Certes il existe des différences comportementales entre sexes, et Freud en a largement expliqué les fondements, ancrés dans la sexualité. C'est d'ailleurs assez passionnant de comprendre comment tout cela se met en place et conditionne tout notre psychisme. C'est bien cette différence, cette altérité sexuée qui fait que nous nous "recherchons", masculin et féminin, mais elle est bien moindre que celle est qui mise en avant. Et surtout dûe à une reproduction des modèles parentaux et sociétaux.
En tant qu'homme, pourtant bien masculin, je ne correspond pas vraiment à diverses étiquettes, telles que « les hommes ne se posent pas de questions psychologiques ». Et si je sais avoir une tendance à beaucoup intellectualiser, rationnaliser, je constate aussi que je me prive ainsi de toute ma part émotionnelle. Si j'agis de cette façon, ce n'est pas parce que je suis homme, mais parce que j'ai intégré un certain modèle masculin (dont j'ai bien du mal à me défaire...). Je pense avec ma raison parce qu'on m'a appris que c'est ainsi que je devais penser. Toute la part émotionnelle est longtemps restée en friche, voire niée, et ce langage là ne me "parlait" pas. Je ressentais une part émotionnelle, qui influait, mais elle n'avait aucun sens parce que je ne savais pas la décoder.
Si les femmes sont plus intuitives dans certains domaines (fait observable), ce n'est pas parce qu'elles sont femmes, mais parce qu'elle ont très tôt appris à sentir et reproduire l'intuition dite "féminine" de leur mère, ou de tout autre modèle féminin.
Plus j'avance dans la connaissance de nos comportements respectifs et de leur origine, et plus je me rends compte que nos différences intrinsèques sont réduites. Infiniment moindres que les représentations culturelles que l'on en a. A se demander si, hormis notre anatomie et tout ce que cela implique, nous serions vraiment différents...