Abstention
Imaginez que vous soyez fâché avec quelqu'un de cher à votre coeur. C'est assez préoccupant...
Imaginez que vous teniez un blog... et que cette personne en connaisse l'adresse.
Vous feriez probablement comme moi: il devient impossible d'écrire sur ce qui vous préoccupe.
J'en suis là.
Ce n'est pas que j'ai des choses à cacher, puisque je suis un partisan de la sincérité et de la transparence. Mais... chaque sujet que je voudrais aborder risque de faire référence à cette relation en souffrance ["en souffrance", dans le sens de "en attente"]. D'autant plus que mon blog est précisément orienté vers les relations avec autrui.
Bref, me voila coincé !
D'autant plus coincé que... c'est précisément autour de nos visions respectives de la sincérité, la franchise, l'authenticité, que cette relation de grande complicité s'est peu à peu grippée. Si nos avis convergent bien vers le même but, ils se sont révélés divergeants sur la façon d'y parvenir. Et plus encore sur la façon de restaurer une confiance qui se dégradait.
Il faut quand même que je précise, pour ceux qui ne me connaissent que sur ce blog, que jusqu'à il y a peu de temps j'écrivais sous le regard singulier de cette personne qui m'est très chère. Et cela depuis que je dépose mes pensées sur internet, c'est à dire six ans. La relation que j'ai avec cette amie intime devenue amoureuse est née de nos écritures croisées (elle aussi écrit sur internet...) dans cet espace internautique qui mélange intime et public. Histoire privée racontée publiquement d'une très belle rencontre par les mots, puis dans le face à face, qui bouleversa le cours de mon existence (et, je crois, la sienne). Pour diverses raisons, que je n'expliquerai pas ici, il a fallu suspendre cette relation et ce fût très douloureux pour tous les deux. C'était il y a dix-huit mois.
A partir de ce moment-là nos avis ont divergé encore plus puisque mon amie considéra rapidement que notre relation était devenue impossible et que nous devions nous "oublier" dans un silence définitif. De mon côté je pensais le contraire et faisais tout mon possible pour maintenir le contact.
Un an et demi d'une situation ambiguë durant laquelle j'ai continué à écrire sous son regard, tandis que nos contacts directs étaient espacés, parsemés de sujets devenus tabous. Semi-silence et faux-semblants, demi-vérités et simili-secrets. Bien plus malsain que je n'aurais imaginé. Durant tout ce temps j'ai tenté de "communiquer" via cette écriture détournée, lue par mon amie. Jusqu'à il y a un mois, lorsqu'elle a décidé de renforcer le silence en le rendant total pendant six mois, ce qui m'a profondément révolté. Je lui ai alors demandé de ne plus me lire nulle part.
Il a résulté de cet épisode une très forte tension, publiquement exprimée. Ce qui fût à la fois regrettable (aspect public) et bénéfique (crever l'abcès).
Depuis... je ne trouve plus l'espace pour écrire librement. Je préfère m'abstenir d'évoquer des sujets qui concernent de près ou de loin cette relation, et veux surtout éviter une communication détournée. Car bien que je lui ai demandé de ne plus me lire... je sais que la curiosité peut être tentante.
Je ne souhaite pas davantage que puisse se perçevoir un règlement de comptes par blogs interposés (nous avons un lectorat partiellement commun...), alors que mon désir est celui de la pacification. Impossible, donc, d'évoquer quoi que ce soit qui puisse faire référence à nos différents. Ne pas jeter d'huile sur le feu...
Or cette relation, tant par ses côtés enrichissants que complexes nourrissait très largement mes réflexions sur la communication relationnelle, sujet principal de ce blog. De ce que je vivais je pouvais extrapoler une compréhension élargie et "universelle" qui m'était très utile. Désormais, si je veux éviter d'y faire référence, je ne vois pas comment faire autrement que bannir certains sujets. En même temps, aborder la communication, sujet principal de ce blog, sans évoquer ses limites (les silences, les non-dits, la sincérité, l'inconscient...) ça laisse vraiment peu à dire. Ce sont pourtant les sujets qui me préoccupent et me fascinent le plus.
Ça m'embête parce que je vois que mes réflexions intéressent du monde, vu l'audience croissante de ce site et les commentaires qui me sont faits ici ou par mail. Alors vraiment, je ne sais pas comment je vais pouvoir évoluer. Il va me falloir un peu de temps.
Voila, vous savez maintenant les raisons de mon "silence".
N.B.: je demande que les éventuels commentaires ne fassent aucune allusion personnelle à mon amie et ses choix, que je respecte... même si je suis en désaccord.