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Alter et ego (Carnet)
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8 mai 2006

Anesthésie

Allez... je me lance. Je sors de ma tanière. Ça ira mieux après.

En fait il y a plusieurs jours que je suis revenu, mais je suis resté silencieux. Il aura suffi que je m'écarte quelques jours du cybermonde pour qu'à mon retour je m'en sente lointain, sans désir de m' y insérer de nouveau. Et en plus il a fait beau et doux, dans une nature en pleine exubérance, et je n'ai guère eu envie de rester devant un ordinateur [bon, maintenant il pleut, alors je n'ai plus d'excuses].
La vraie raison c'est que j'avais besoin de me changer les idées. Oublier les questionnements des autres, qui peuvent réveiller les miens. Parfois il vaut mieux que je laisse dormir tout ça...

En rentrant de vacances j'ai hésité mais suis cependant venu lire un peu ce qui s'était écrit dans ma blogobulle durant mon absence. Ces quelques clics ouvrant ces extraits de vie disparates m'ont fait penser à un automatisme. Comme une routine... Hmmm, c'est pas bon la routine. Alors depuis je n'y étais pas revenu.

Pourtant j'aime bien suivre ces vies, lues depuis des mois, parfois des années. Ces affinités choisies sont un peu une seconde famille. Je ressens de la sympathie, ou de l'empathie pour les auteurs de ces parcours jalonnés par des écrits régulierement distillés. Même si, bien sûr, pour la plupart je ne les ai jamais rencontré(e)s. Mais bon... le débat virtuel/sensoriel ne fait plus partie de mes interrogations.

C'est plutôt mon relatif éloignement de cette forme d'expression-communication-relation (?) qui m'interpelle actuellement. Outre le fait que je suis devenu un peu méfiant, suite à diverses découvenues, j'ai parfois l'impression d'en avoir largement exploré l'étendue. Et touché de nombreuses limites. Mon enthousiasme se tarit et une forme de lassitude désabusée se développe. Peut-être parce que cette bulle est trop uniforme ? Toutes ces vies, bien que différentes, ont quelque chose de semblable dans les sujets abordés.
Hmmm... non, je suis injuste, il ne s'agit pas de ça. Les apparentes similitudes dissimulent certainement des différences fondamentales que je n'ai pas encore perçues. Il y a toujours une très large part d'insaisissable et c'est précisément ce qui m'intéresse. D'ailleurs, sur moi-même je pourrais bien écrire sans fin mes pensées... que je passerais encore à côté de tas de choses ! A côté de la vie, pour commencer. Le temps d'écrire la vie empiète sur le temps de vie. Quoique... écrire est aussi une façon de "vivre" plus en profondeur [ou est-ce une illusion ?]
Certes, je pourrais chercher à condenser, extraire le suc, le nectar du sens, pour ne dire que l'essentiel. Mais c'est quoi, l'essentiel ? Probablement le résultat d'un cheminement qui mène à l'abstraction des mots. Quand on est dans l'essentiel, on n'a plus besoin de mots pour le dire, non ? Ou alors on entre dans un autre registre que celui de la recherche de sens, plus esthétisant. Et puis le travail de concentration substantielle prend aussi du temps... Bref, il faudrait carrément ne plus écrire. Mais ce serait se priver de cet outil de compréhension, de cet exutoire, de ce plaisir des mots...

Ouais, je suis en pleine ambivalence.

Peut-être parce que je ressens de plus en plus mes écrits en décalage avec ma pensée. De ce que je sais, maintenant, il y a beaucoup de choses dont je ne ressens pas le besoin de parler. Je le vis. Je mesure à quel point les mots seraient limitants, sujets à interprétation erronnée. Ma renaissance se fait discrète. Il se passe de belles choses en moi [quand je vais bien...], mais je ne sais pas comment en parler publiquement. Ou bien je n'en ai pas envie. Ouais, c'est plutôt ça... C'est pas vraiment secret mais... intime et personnel. Me voila donc face à des écrits qui ne sont plus vraiment représentatifs de ce que je me sens être [l'ont-ils été un jour ?]. Quant à écrire à titre de "témoignage" mon parcours banal et singulier, j'en viens à me demander si cela ne contribue pas à installer une illusion chez le lecteur: on croit reconnaître en l'autre une part de soi, mais ce n'est que le reflet choisi de ce qu'on a besoin/envie de voir. Illusion semblable chez l'écrivant, qui peut se leurrer en déformant son existence: en accentuant ou minimisant ses pensées mises en mots.
Me voici devenu traqueur d'illusions.

Hum... je me trouve bien "réaliste" tout à coup...
Un peu pessimiste, même [faites pas attention, c'est conjoncturel].

Sans doute une certaine maturité/désillusion qui me fait voir sous de multiples facettes le décalage qui existe entre ce qu'on voudrait être, ce que l'on dit être, et ce que l'on est vraiment dans la réalité des actes. Les mots, tentatives de persuasion (ou d'auto-persuasion), peuvent aisément tromper. Pourquoi ce besoin de dire ce que l'on est si on en est convaincu ? Quête de réassurance ou auto-conviction ? J'ai pu en juger sur moi-même, mais je le constate aussi chez des personnes que j'avais crues avoir une connaissance suffisante d'elles-mêmes pour éviter ce travers. Il semble qu'il n'en soit rien. Et finalement je ne suis pas sûr qu'il existe des personnes qui se connaissent vraiment (mais beaucoup le croient...). D'un côté c'est rassurant: les autres sont tout autant faillibles et dupes d'eux-mêmes que je le suis. D'un autre côté... c'est un peu inquiétant: à qui peut-on se fier ? Je deviens méfiant...

Je crois que je me fie plus volontiers aux gens qui affirment n'être sûrs de rien. Ceux qui se cherchent, hésitent et tâtonnent. Les curieux d'eux-même. Au moins, il n'y a pas de surprise dans cette modestie lucide qui consiste à dire « je ne sais pas ». Il me semble que je garderai toujours une indulgence teintée de sympathie envers ceux qui doutent, prêts à la remise en question. Au fond, je crois que je n'aime pas l'arrogance des certitudes. Je ne m'aime pas lorsque je crois en avoir, car je sais que je me coupe de l'autre et de sa différence enrichissante. Pour moi chaque doute éclairci s'ouvre vers un autre doute à éclaircir, tandis que les certitudes sont autant de points d'appui... sur les portes qu'elles ferment ! Mais bon, en affirmant cela je garde encore un doute, hé hé... En fait, chacun a sa méthode pour avancer dans la vie, selon le degré de lucidité et d'approfondissement voulu...



Quel est le rapport avec mon petit séjour en Italie ? Aucun qui soit direct.

Tout s'est très bien passé. Même un incident mécanique qui aurait pu avoir des conséquences très fâcheuses (dévissage du bouchon de vidange de la voiture en pleine montagne, occasionnant la perte totale de l'huile du moteur !) s'est réglé de façon tout à fait providentielle et rapide par une suite de hasards et de chances.

La petite famille s'est trouvée réunie "comme autrefois". Voyage, repas, visites, rigolades... tout a été très bien. Flânerie dans les rues, sous les arcades, monumentales églises baroques, déambulation dans des jardins, quelques heures dans un musée. Et puis le simple plaisir d'être ailleurs, au milieu d'ambiances sonores étrangères sans se sentir trop dépaysé (le décryptage de la langue est un plaisir ludique). Nous étions hébergés chez la copine de mon fils aîné, étudiante là-bas pour un an. Dodo sur des matelas par terre, ce qui a évité la question du lit commun avec C., ma future-ex. Quelques bonnes discussions avec elle autour de nos vies en évolution, parfois autour de notre séparation, de notre passé, de nos avenirs inconnus. Aucune tension, toujours le même accord que celui qui s'est instauré depuis des mois. Relation simple, tendre, respectueuse, agréable, qui me convient tout à fait. Parfois nous marchions côte à côte en nous prenant la main, naturellement, sans nous poser davantage de questions. Mais c'est bien parce qu'elle me sait actuellement "seul" et l'est aussi, sinon elle refuserait. En fait, excepté la suppression de l'intimité sexuelle et la décohabitation, la nature de notre lien est peu modifiée. Nous avons trouvé la distance qui nous convient pour le moment. La confiance, un temps malmenée, est revenue. Mieux investie. Probablement mieux conscientisée aussi.

Mais son intuition reste efficiente: elle a senti que parfois j'étais "ailleurs", perdu dans mes pensées. « Tu penses à quelqu'un d'autre ? », m'a t-elle demandé sans détour. Je n'ai pas triché : oui, ce séjour dans une ville étrangère me ramenait dans le passé. La dernière fois que j'étais à l'étranger, c'était à Montréal, il y a un peu plus de deux ans. Avec une femme aimée qui me regardait avec les yeux du désir. C'est déjà loin dans le temps, mais encore proche dans les souvenirs. Réminiscences rendues aigres-douces par la chape de silence actuellement imposée. Trop frais, trop actuel pour que prenne place la douce nostalgie évoquée par Tristana.

Je sais bien que c'est au présent que l'ont vit, et je m'efforçais d'être entièrement "là", avec C. à vivre et engranger de nouveaux souvenirs. Mais je pensais aussi à l'autre histoire, amitié amoureuse dont la complicité magique a été perforée de part en part par les malentendus. Ces bombes à retardement que sont les mal-dits, les trop-dits, les non-dits, le péremptoire, le trop succinct ou le sybillin, les maudits silences du repli sur soi, ont pulvérisé la confiance. Lien rendu poreux et friable à l'excès, absurde de tant de vide. Intouchable, c'est à peine si j'ose encore l'évoquer...
D'être heureux de ce que je vis maintenant avec C. ne m'empêche pas de ressentir une confusion d'émotions contradictoires en songeant à ce que je vivais de beau avec une autre. L'incompréhensibilité du blocage, extrêmement difficile à admettre pour moi, gâche souvent mon plaisir de vivre l'instant présent. Ce passé irrésolu gène mon avancée vers l'avenir.

Et ça m'énerve grandement ! Je suis maintenant lassé lorsque ma vie redevient envahie par tant de questions sans réponses. J'en ai marre...
Envie d'oublier et d'en sortir.

Oups... ne pas se laisser aller à évoquer tout ça.
Zen, respire un bon coup et souris à la vie :o)

Voila. C'est ce qui me perturbe depuis ce petit voyage: en revenant inopinément à la surface, mes sentiments ont fait ressurgir des questionnements que j'avais choisi de refouler, faute de réponses à espérer. Une certaine confusion mobilise de nouveau mes pensées. Ça m'énèèèrve ! Le travail mental de désinvestissement affectif s'est montré moins performant que je le croyais et il me faut le reprendre afin de retrouver la paix bienfaisante de ces dernières semaines. Oh oui, la paix et la sérénité !
Pour bien vivre je dois renforcer la dose d'anesthésiant [ou d'euthanasiant ?]. Les sentiments n'ont plus leur place, mais le mental qui tente de les neutraliser ne peut pas tout, ou pas en permanence. Je ne suis pas un pur esprit, ni un surhomme. C'est aussi ça la vérité. Alors pour éviter la tristesse, le manque, ou la colère qu'induit la frustration, je préfère me maintenir à distance de ce genre d'émotions.

Allez, une bonne piqûre d'anesthésie locale. Là, tout près du coeur.

Et puis chuuuutttt...

Commentaires
I
Coumarine, les questions qui tracassent sont une forme de douleur certes, mais donc d'avancement. Parce que le besoin de s'approcher des réponses pousse à chercher des moyens de contourner les blocages. C'est très enrichissant, finalement.<br /> <br /> Tristana, oui, aucun doute (!) là dessus: les questions résolues en appellent de nouvelles.<br /> <br /> Mirae... oui, qui peut prétendre à l'objectivité ? Autant envers soi qu'envers autrui. Je ne sais pas ce qu'en dit la philosophie, mais je penserais volontiers que l'objectivité n'existe pas.<br /> Pour le "loin de yeux, loin du coeur", je ne le concois pas ainsi. Je dirais même que le coeur n'a pas besoin d'yeux, et que la distance ne se mesure pas en kilomètres. L'éloignement du coeur dépend d'autres facteurs...<br /> <br /> mcl38, pour apprécier "chez soi", je crois qu'il faut aussi savoir s'en éloigner pour mieux le retrouver, avec un regard rafraichi. Mes sentiments ont précisément été réveillés par un autre "chez moi", qui en l'occurence était un "ailleurs". Je ne sais pas si c'est clair ;o)<br /> <br /> Alainx, j'apprécie ta sagesse: ce n'est que par un travail en profondeur que l'on se "guérit" de ses douleurs. C'est précisément ce que je m'efforce de faire. Ce travail passe par la conscientisation, et les mots sont de précieux alliés pour cela. D'où ma grande frustration face à une communication "impossible"... qui me pousse à trouver d'autres sources de réponses, comme je le répondais à Coumarine plus haut.<br /> <br /> Oui, le soi est un tout, ombre et lumière, doutes et certitudes, courage et lâchetés. Et les autres sont faits de même.
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A
L'aménagement des situations ne résoud jamais nos problématiques internes. Tout au plus un beaume provisoire ?<br /> Finalement on se trimballe partout avec "tout" soi, le bon et le moins bon...<br /> <br /> Jz dirais bien "des choses" à propos du doute que tu évoques, mais... pas le courage... Si ce n'est que le doute n'existe... que par rapport à des certitudes... dont on doute...<br /> A tort ou à raison ?? THE question !!
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T
@ mcl38 > je crois qu'on peut dépayser sa tristesse, mais on emporte ses fantômes...
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M
Il m'arrive souvent de penser que loin de chez moi pendant quelques jours me feraient le plus grand bien et puis lorsque cela arrive je n'ai qu'une hâte c'est de rentrer. Pourquoi ? Ben fichtre si je le savais ! C'est un peu comme si notre chez nous faisait partie de notre moi intérieur, nos repères sont là aussi. Peut-être qu'en étant loin de chez toi, cela a réveillé tout les sentiments que tu avais enfouis lorsque tu étais chez toi...C'est peut-être un peu brouillon ce que je dis mais c'est souvent ce que je ressens lorsque je suis loin de chez moi, un peu comme si mes fantômes me manquaient ;-).
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M
Quand j'étais petite, et je crois encore aujourd'hui, je pensais qu'il nous manquait une partie à nous-même, une sorte de regard extérieur pour nous juger objectivement comme un miroir parlant, pour nous voir tel qu'on est vraiment.... Voilà ce que m'inspire la première partie de ta note.<br /> Pour la deuxième partie, bien que je ne te connaisse absolument pas, j'ai envie de dire "loin des yeux, loin du coeur" parce qu'à te lire il me semble que tes sentiments se réveillent et se dispersent au contact de ta future-ex, mais j'ignore quelles sont vos relations ne t'ayant jusqu'à présent jamais lu. Nous subissons de toute façon nos sentiments qui parfois nous perdent.
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T
J'en viens même à penser qu'au fur et à mesure qu'on croit avoir trouvé des réponses, de nouvelles questions surgissent... Serions nous tous un peu Sisyphe ?
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C
Heureuse de te savoir revenu<br /> Un peu inquiète de te voir avec tant de questions qui te tracassent...<br /> Pas le temps maintenant de t'écrire davantage.<br /> Je reviendrai et prendrai contact avec toi, dès que je le peux
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