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Alter et ego (Carnet)
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20 septembre 2006

De l'importance des certitudes

Je n'ai plus beaucoup le temps d'écrire en ce moment, mais je voulais poursuivre mon cycle sur le doute et l'incertitude, dans leur rapport avec la remise en question. Je n'ai pas pu prolonger ma réflexion plus en avant et je la livre telle qu'écrite il y a quelques jours.

En parlant de ses certitudes, Alainx à élargi le champ de mes réflexions. Comme à chaque fois que j'aborde un sujet qui gravite autour de deux tendance opposées, les développements possibles sont toujours très vastes...
Ben oui, parce que j'ai beau vanter les avantages de la remise en question, je pourrais tout aussi bien affirmer à quel point les certitudes sont importantes !

Mais il ne s'agit pas du même angle de vue. Je crois que les certitudes que j'ai sont intérieures, tandis que mes doutes concernent l'extérieur : mon rapport avec autrui. Seul avec moi-même je me sens bien, et si tout le monde fonctionnait... euh... comme moi [modestement], ça serait idéal ! [mais si, mais si...]. Mais non, chacun a des certitudes individuelles. Le doute n'apparait en moi que lorsque je rencontre l'altérité. Entre les certitudes d'autrui et les miennes, il y a un fossé. Différence dans les façons de penser, de se comporter, d'imaginer la société, d'appréhender l'humain.

Partant de ces différences existe la possibilité d'établir des ponts de reliance: par l'échange et la confrontation des idées, qui sont sources potentielles d'enrichissement personnel; en s'ouvrant à la pensée de l'autre, donc en acceptant de remettre en question la validité de mes vérités; en acceptant surtout, par principe, que ma réalité ne soit pas partagée et que nous ne soyons donc pas forcément d'accord. La rencontre de l'autre, si je la désire, oblige à la remise en question. Sinon elle n'aura pas lieu. Je dois m'ouvrir à son mode de pensée, tenter de comprendre quelle est sa vision des choses, ce qui lui importe.

Remettre en question mes croyances ce n'est pas y renoncer, ni ouvrir une brèche dans ma structure, mais m'offrir la possibilité de les faire évoluer. C'est prendre le risque d'être déstabilisé, et tenter la chance de trouver une stabilité plus aboutie. Car le seul risque de perdre mes certitudes, c'est de perdre une part de mon assurance. Ce qui est toujours inquiétant...

Par ailleurs, dans un commentaire ici, Alainx m'a interpellé à nouveau: « il ne te reste plus qu'à remettre en question le principe même de l'interet de remettre en question.... ». La question devient tordue... mais je vais essayer de relever le défi, d'une façon détournée, en laissant venir ce que ça m'a inspiré. J'inverse donc la problématique: le principe d'avoir des certitudes aurait-il un intérêt ?

Il me semble que le manque de certitudes rend sensible à celles des autres, parce qu'ils donnent une réponse rassurante. Auparavant je ne savais pas ce qui me constituait, quelles étaient mes valeurs, ce en quoi je croyais. Je le sentais sans doute confusément, mais sans réelle prise. Il aura fallu que mes croyances soient mises à l'épreuve, déclenchant parfois des peurs irraisonnées, réveillant des angoisses et une grande souffrance devant tant d'insécurité, pour que je me rende compte de la fragilité de certaines zones. Je ne me sentais pas rassuré et j'allais vers l'inconnu assailli de doutes à chaque pas. Mes certitudes n'étaient pas suffisamment étayées. Ce n'est qu'à la longue par tout un travail de remise en question, mais aussi de confiance en mes ressentis, que j'ai pu discerner ce qui était en moi, ce dont j'étais sûr, et ce qui n'était que croyances. Des doutes quant à mes choix de vie ont fait émerger mes certitudes. Et la plus importante d'entre elle concerne le sens que je donne à mon existence.

Je me remets en question pour affermir mes certitudes. Pour les éprouver et pour... moins douter. En doutant moins, je serais moins sensible aux certitudes des autres. Donc plus authentique. Et en même temps, en m'ouvrant aux autres par le doute, j'apprends d'eux, je connais mieux l'humain et moi-même et suis davantage capable d'énoncer mes certitudes, ou de vivre en accord avec moi-même sans suivre les autres. D'une certaine façon mes certitudes intérieures sont une forme de liberté.

Tout cela est un mélange de contradictions et de paradoxes et c'est ce qui fait que la vie ne correspond jamais à une recette, mais est une adaptation de chaque instant aux circonstances.

Commentaires
C
Pierre, nous sommes le 02/10 et plus de nouvelles. Rien de grave au moins ???
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P
Toute en accord avec Alauda :)<br /> <br /> comment ça, c'est pas nouveau ? ;)
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A
Passionnants ces échanges ! <br /> Il serait trop long de tout commenter .. et de toutes façons, je me sens très proche de tout ce que tu exprimes.. :)<br /> <br /> ...Juste une légère différence... :) lorsque tu dis :<br /> "Et c'est parce que j'ignore si la vie a un sens que j'en choisis un. Ainsi je donne un sens à ma vie "<br /> <br /> Pour ma part, j'aurais plutôt écrit : <br /> " C'est parce que j'ai la conviction que la vie a un sens que je ne cherche pas à lui en "donner" un mais à la laisser - ou ne pas l'empêcher - de prendre ce sens à travers moi"... <br /> Merci en tous cas pour cette entrée qui fait cogiter !
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P
Bonjour Mohamed<br /> <br /> Il y a quelque chose qui me plaît dans le rapprochement que tu fais entre "autrui" et "le semblable". Comme si "autrui", qui est davantage différent de moi que "le semblable", était moins à même de favoriser la remise en question du fait d'une trop grande différence. Comme s'il fallait quand même des ressemblances pour mieux comprendre la différence.<br /> <br /> J'aime bien l'idée de "penser contre soi-même", on est si prompt à l'indulgence envers soi...<br /> <br /> Quant à lutter contre les amalgames et généralisations, je crois qu'il faut être particulièrement vigilant sur ce point, car c'est de là que peuvent partir des glissements, auréolés d'une part de vérité... et nimbés de beaucoup de faux issu de l'ignorance. Ton billet d'aujourd'hui est tout à fait éloquent sur ce point.
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M
Bonjour Pierre,<br /> les différents commentaires postés suite à ton billet me poussent à réagir. Non pas sur la teneur de ces propos mais plus sur un passage de ton billet qui m'a interpellé. Je te cite: "chacun a des certitudes individuelles. Le doute n'apparait en moi que lorsque je rencontre l'altérité. Entre les certitudes d'autrui et les miennes, il y a un fossé. Différence dans les façons de penser, de se comporter, d'imaginer la société, d'appréhender l'humain."<br /> En ce qui me concerne, le doute n'apparaît en moi que lorsque je rencontre quelqu'un de semblable ou de similaire. Les certitudes de ceux qui sont censés penser comme moi m'effraient et me poussent à me remettre en question. Non pas que le fait de penser par soi-même soit néfaste, seulement je trouve plus d'intérêt à penser contre moi-même, contre mes idées reçues, mes névroses, mes envies ou mes angoisses. Ce n'est pas dans le regard de l'autre que mes certitudes s'ébranlent mais sûrement dans l'image que me renvoit mon inconscient lorsque je m'attarde sur moi-même. Mon éducation arabo-musulmane n'a pas favorisé l'émergence de la pensée de Descartes ou de Maine de Biran. Elle a au contraire encouragé ma croyance dans le destin, le inch'allah. Youssef chahine dans l'un de ses plus beaux film tenta de retracer la vie de ibn rush dit averroes. En voyant la première fois ce film, je me suis pris à rêver que ce questionnement légitime sur nos rapports à l'altérité puisse nous faire prendre conscience que pour certains l'altérité prend le plus souvent l'aspect du semblable et non de l'autrui d'où la nécessité d'apprendre plus souvent à penser contre soi-même. Je vous prie de croire qu'en ces périodes d'intolérances religieuses et d'amalgames généralisées, c'est loin d'être un combat facile. Amitiés mohamed.<br /> Ps: relisons averroes.
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P
Forestine... tu as l'art de poser des questions qui portent loin :o)<br /> <br /> Ma patience n'est nullement sollicitée et c'est avec plaisir que je tente d'y répondre. <br /> <br /> Ce que tu me demandes mériterait une réponse développée sur un ou plusieurs billets, mais je me contenterai, pour le moment, de cet espace de commentaires.<br /> <br /> Pour ce qui est des attitudes qui "ouvrent" ou "ferment", oui, c'est dans les rapports à autrui que je l'entendais. Selon moi l'ouverture est fécondante. De l'ouverture naît l'échange, l'évolution de la pensée, l'enrichissante confrontation à la différence. Et pour tout dire: l'intelligence (dans le sens étymologique: action de comprendre). Pour moi cette ouverture est le sens de la vie, celui de l'épanouissement.<br /> <br /> Les valeurs "universelles", dont je précise bien que c'est selon MA vision de l'universalité, sont celles qui vont dans ce sens de l'ouverture que je viens de décrire. Ces "valeurs", qui ont force de conviction, je les vois s'appliquer par un CHOIX VOLONTAIRE. C'est à dire qu'elles ne s'imposent pas à quiconque. On peut les enseigner, y éveiller, les transmettre, mais on ne peut pas contraindre à les adopter. Par contre, oui, je les vois applicables en toute circonstance... tout en sachant que selon les circonstances certaines valeurs "vitales" peuvent devenir dominantes. C'est bien en me fondant sur ces valeurs "universelles" que je gouverne ma vie et que j'y découvre une direction sûre.<br /> <br /> Quant à parler du beau, du bien, et du vrai... houla !... non, vraiment, ce n'est pas parce que moi je crois que suivre certaines valeurs y mène que j'oserais affirmer que seules ces valeurs sont "valables". Mais j'avoue ne pas voir quelles autres valeurs pourraient mener au beau, au bien, et au vrai... selon ce que j'appelle "beau, bien, vrai". Car c'est uniquement parce que je choisis un point de vue, donc une subjectivité, que je peux distinguer un "bien" et "mal". Sinon tout cela n'aurait aucun sens. La vie elle même n'aurait aucun sens et tout se vaudrait. Et c'est parce que j'ignore si la vie a un sens que j'en choisis un. Ainsi je donne un sens à ma vie :o)<br /> <br /> Mais j'entre là dans le domaine de la philosophie, voire de la spiritualité...
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F
Ta réponse, Pierre, m'a passionnée. Est-ce que tu veux bien préciser encore un peu?<br /> "Selon moi, d'après les choix que l'on fait, la vision que l'on a du monde, de la vie, de l'humain, selon que l'on donne ou non du sens à certaines choses, cela teinte fortement son rapport à autrui."<br /> Je suis tout à fait d'accord.<br /> " Je pense donc qu'il est des attitudes qui "ouvrent" et d'autres qui "ferment".<br /> Tu veux dire: qui ouvrent ou ferment à autrui?<br /> <br /> "Donc oui, dans ce sens, je pense qu'il y a des valeurs "universelles"... selon MES valeurs et MES croyances." : tu veux dire, des "valeurs" universelles au sens qu'elles s'appliquent à tout, un genre de "modèle" comme on parle de modèle mathématique, qui avec les paramètres que tu rentres (tes valeurs et croyances personnelles) , te fournissent un outil pour fonder et/ou gouverner ta vie?<br /> <br /> En fait, je pensais à des valeurs universelles, au sens de valeurs qui seraient universellement partagées, comme le beau, le bien, le vrai...<br /> <br /> Merci de ta patience ;-)
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P
Zel, j'aime bien ce que tu dis des incohérences entre "valeurs" et comportement. Effectivement on n'est pas toujours en accord avec soi...<br /> <br /> Tu dis aussi que nos valeurs universelles ne sont peut-être pas les mêmes, et ça me fait prendre conscience que je n'ai jamais vraiment cherché à identifier les miennes. J'en connais certaines, mais il y en a probablement bien d'autres.
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Z
Salut, c'est un post intéressant.<br /> <br /> En ce qui me concerne, je crois que ce n'est pas aussi simple que ça.<br /> <br /> J'ai certaine certitude, ou du moins, j'appelle ça des valeurs. Des valeurs très basiques que je n'ai pas besoin de relativiser.<br /> <br /> Après j'ai d'autres certitudes plus ou moins inconscientes qui viennent de mon éducation, de mon vécu et que je n'ai pas forcément remises ne question (et qui peuvent être contradictoires avec les valeurs que j'ai).<br /> <br /> Par dessus ça, j'ai des comportements et des habitudes qui sont également dû à mon vécu et qui peuvent être parfois contradictoire avec à la fois mes valeurs et mes propres certitudes. Ou souvent elles sont cohérentes.<br /> <br /> Ca dépend du recul qu'on a vis-à-vis de soi-même...<br /> <br /> Donc, pour moi, me remettre en question porte sur mon comportement et certaines des certitudes que je n'ai pas encore remise en question.<br /> <br /> Mais je pense qu'il est important de garder certaines valeurs de base sans quoi on n'aurait ni stabilité, ni d'intégrité, ni de repères pour se remettre en question.<br /> <br /> C'est, je crois, ce que tu appelles de valeurs universelles, Pierre.<br /> En ce qui me concerne, je leur ai trouvé un nom, je ne sais pas si ce sont les même que les tiennes (je me dis depuis une éternité que je devrais en faire quelques notes sur mon blog)...
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P
Forestine... oh la la... mais avec ces deux questions tu soulèves quelque chose qui va très loin !<br /> <br /> Oui, je pense, sans y avoir vraiment réfléchi, que nombre de mes certitudes correspondent à des "valeurs". Mais là encore, je dirais que ces valeurs n'excluent pas leur remise en question, quoique ce soit encore plus déstabilisant puisqu'elles sont fondatrices, axes de ma vie. Ces "valeurs" peuvent se modifier, s'effondrer, ou au contraire se renforcer face aux épreuves de l'existence. Celles qui s'effondrent n'étaient pas miennes, ou invalides, celles qui se renforcent deviennent des guides de vie, des lumières sûres, qui, je le crois, ne pourront que continuer à se renforcer avec le temps.<br /> <br /> <br /> Pour ce qui est de leur validité universelle... là j'entre certainement dans le domaine de la foi. Non pas la foi religieuse, mais l'acte de foi en ces valeurs auxquelles je crois. C'est à dire quelque chose qui, face aux incertitudes absolues et hors de portée de toute rationalisation, résulte d'un CHOIX. Certaines questions existentielles n'ont pas de réponse, et seulement deux alternatives: y croire ou pas. Avec une troisième voie: le "je ne sais pas". C'est souvent ce "non-choix" que je privilégie, tant qu'il est tenable, parce qu'il me permet de pousser la réflexion. Pourtant, bien que dans le doute, je fais en dernier ressort des choix qui ne tiennent pas du hasard, mais bien de valeurs profondes que je mets à l'épreuve jusqu'au plus loin qu'il m'est possible. L'idée, au delà du questionnement, c'est d'AGIR dans le sens que je crois le plus porteur de vie.<br /> <br /> Selon moi, d'après les choix que l'on fait, la vision que l'on a du monde, de la vie, de l'humain, selon que l'on donne ou non du sens à certaines choses, cela teinte fortement son rapport à autrui. Je pense donc qu'il est des attitudes qui "ouvrent" et d'autres qui "ferment". Donc oui, dans ce sens, je pense qu'il y a des valeurs "universelles"... selon MES valeurs et MES croyances. Tout en sachant que d'autres peuvent penser et agir différemment... et c'est ce qui me plonge dans la réflexion, parce que j'essaie de trouver ce qui, dans des comportements qui semblent opposés aux valeurs auxquelles je crois, pourrait les infirmer.<br /> <br /> Je ne sais pas si c'est très clair...<br /> <br /> Ça va évidemment bien plus loin que ce que je peux en dire en quelques lignes ;o)<br /> <br /> J'y reviendrai probablement dans quelques temps, lorsque j'aurais un peu plus de temps à y consacrer.
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