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Alter et ego (Carnet)
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9 juin 2007

Ouverture et dépendance

Salle d'attente de Madame Psy, ce matin. Je suis en train de me dire que je n'ai rien à raconter, tout en faisant confiance à ce qui viendra dans le face à face. Mes yeux se baladent sur les murs. Cette fois ce n'est pas la reproduction poussiéreuse d'une toile de Kandinsky qui retient mon regard, mais une affiche collée sur le mur en face de moi: « Drogue, dépendance », avec je ne sais quel numéro de téléphone d'aide. Drogue, dépendance... je ne peux que faire le rapprochement avec ce que j'écrivais hier ici, et tout un passage que j'ai supprimé parce que rendant trop flagrante au regard des lecteurs ma "dépendance"...

Devant Madame Psy j'ai mon amorce, et le fil se déroulera tout seul avec cette question formulée à voix haute, résultant de pensées en mouvement depuis plusieurs jours : « qu'est-ce que je recherche sur internet ?».

Des échanges. De la découverte. Des pensées humaines. Je suis passionné par ce qui se joue dans les rapports humains, et tout spécialement dans les rapports de couple. Je cherche donc ce qui peut m'enrichir à ce sujet. Les pensées des autres, leur regard sur eux-même et l'altérité. Je cherche la confrontation d'idées, les surprises, les chocs de la pensée inattendue.

Madame Psy me glisse quelques mots, profitant du lien que j'ai fait avec la dépendance. « Qu'est-ce que cherchent les personnes qui font usage de Cannabis ? Et je dis bien cannabis, et pas héroïne ». Bien qu'absolument non spécialiste du sujet (jamais touché à ces choses là...) je glisse l'idée d'évasion, de convivialité, de moments agréable. Elle confirme bien la différence entre des pratiques de groupe et celle, solitaire, du camé à l'héro.

Oui, convivialité, refaire le monde, imaginer, s'évader un peu du quotidien et de la matérialité des choses peu enthousiasmantes. Consommer, aussi.

Je recherche sur internet quelque chose qui me fait ressentir des émotions, qui m'enrichit l'esprit, qui me fait vivre des bons moments. Mais sans être jamais durablement rassasié.

« Une fuite ? » essaie Madame Psy. Non, je ne le ressens pas comme ça. Je ne fuis pas la réalité, mais je cherche ce qui la rend plus agréable. J'aime la richesse des échanges, je m'y épanouis, j'évolue, je grandis. Je vibre et vis. La vie quotidienne est parfois peu exaltante, presque fade. Je m'évade d'une façon similaire lorsque je marche dans la nature. Ou que je regarde un film, lis un roman. Sensations "hors la vie", mais transposées de la vie.

Et puis je peux fort bien me passer d'internet. Il suffit que je sois occupé ailleurs et que ça me plaise. Je n'ai pas besoin de ma "dose". Je ne suis pas "accro en manque". Le désir ne vient que lorsque je me trouve confronté à une réalité dont l'éclat me paraît moindre.

Je ne cherche pas à fuir la réalité, appréciant beaucoup les occasions de rencontrer en face à face le cercle de connaissances de ma blogobulle. Bien que... cette mise en face de nos réalités ne soit pas sans effets post-rencontre. Il se passe quelque chose de fort à ces moments-là. Quelque chose qui pourrait avoir des effets tels que ce recul décrit dans mon dernier texte. Je ne sais pas encore très bien...

Mais cette "évasion" par internet dans un monde idéalisé n'est pas que ça. Elle construit aussi quelque chose. Grâce à cette autre réalité, grâce à ces échanges immatériels, je ne suis plus le même. J'ai beaucoup amélioré mon rapport aux autres grâce à la confrontation des différences. J'ai trouvé une place. Je me suis trouvé. Je me sens exister, ce qui n'était pas le cas il y a quelques années. J'ai maintenant une aisance que j'étais loin d'avoir auparavant. J'ai beaucoup moins cette peur des autres et de leur regard supposé. Par le biais des échanges sur internet je me suis enrichi et ouvert l'esprit.

Voila les deux faces de mon rapport à internet : ouverture et dépendance. Le premier terme est positif, le second me perturbe. Je crois que depuis des années je cherche le moyen de bénéficier des avantages tout en me préservant des inconvénients. Internet est un merveilleux outil de communication, à condition de savoir s'en passer. Il améliore les échanges d'idées, mais ne doit pas faire oublier que c'est dans l'action que se réalise l'accomplissement. Or la facilité d'accès à ce qui ressemble au monde, dans l'instant, est un fameux piège. Il est infiniment plus facile d'ouvrir d'un simple clic la porte d'un monde connu que de pousser celle qui mène vers un groupe inconnu de personnes en chair et en os. Internet n'est évidemment qu'un moyen de progression, mais dont les bénéfices ne pourront exister que dans la concrétisation et les actes.

Je le sais fort bien... il ne me suffit que d'oser aller plus loin. Choisir la voie un peu plus difficile, celle qui permet l'ascension. Je sais que ces années internet ne sont pour moi qu'une étape temporaire. Un passage qui durera le temps nécessaire. Comme ma thérapie d'ailleurs... C'est un moyen d'avancer en mode accéléré, de hâter un peu l'excessive lenteur des changements de la conscience. Je sais depuis longtemps que je me livre à un "travail" thérapeutique en exposant mes idées et mes pensées intimes en public. Certains jours je suis fatigué de ce "travail" qui me met face à mes contradictions et paradoxes. Mais comme le souligne un commentaire du texte précédent : les contradictions sont le meilleur moyen d'avancer et de conforter de nouvelles idées.

Pas surprenant, donc, que régulièrement je m'interroge sur mon rapport à internet, alternant phases de loghorrée et périodes de silence.

Commentaires
M
thérapie.........<br /> se retrouver soi......<br /> communiquer, partager, echanger .... en maintenant une protection pour nous meme.....<br /> on se retrouve souvent dans les billets de divers blogs, comme si chacun vivait en somme une histoire similaire..... ou peut etre simplement se retrouve face aux meme angoisses....<br /> félicitations pour ton blog...
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P
Entièrement d'accord avec toi, Charlotte : « ce n'est qu'ainsi, en commençant par soi, qu'on comprend mieux les autres. » Ça implique qu'il faille bien souvent vivre quelque chose pour comprendre ceux qui l'ont vécu. D'où les limites de l'intellectualisation lorsquelle anticipe, et l'intérêt de celle-ci lorsqu'elle analyse a postériori.
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C
Internet: une évasion riche de découvertes, de nouvelles connaissances à portée d'un clic...<br /> des liens pour du meilleur? sans le pire ?<br /> Mais quels liens? liens virtuels ,liens réels?<br /> Il y a prendre et à laisser...tomber.<br /> Les blogs intimes sont un miroir dans lequel on se reconnaît souvent.<br /> Car finalement la personne qui nous intéresse le plus ici sur terre c'est soi même.<br /> Il n'y a pas de mal à cela.<br /> Connais toi toi- même.Socrate savait ce qu'il disait :ce n'est qu'ainsi, en commençant par soi, qu'on comprend mieux les autres.<br /> Alors moi je te dis merci pour ce que tu écris, cela me fait réfléchir.
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