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Alter et ego (Carnet)
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16 janvier 2008

Quand le voile viole

Coumarine raconte une anecdote vue dans le métro, autour d'une jeune fille voilée.

Je ne saurais comment décrire ce que suscite en moi la vision des femmes voilées, et plus encore des jeunes filles. C'est quelque chose de très mitigé, mais dont je ne peux dire que cela m'indiffère. Toujours, je ressens un certain... malaise.

D'un côté je comprends tout à fait cette démarche personnelle, qui s'inscrit dans des convictions religieuse dont je respecte la liberté. Je peux même ressentir une certaine admiration pour les personnes qui vivent leur foi et leur identité culturelle avec autant de détermination et d'abnégation. J'y vois du courage et de la franchise. Loin de moi l'idée de juger ces comportements dont les motivations m'échappent.

Et pourtant... il y a malaise. Je me sens profondément, viscéralement en désaccord avec cette manière d'être. Mais je ressens la même chose face à des familles de bons-cathos-bourgeois, ou les images de juifs ultra-orthodoxes, ou lorsqu'un président étasunien termine ses discours avec un "God bless America". Je le ressens d'autant plus lorsque c'est en décalage avec notre société occidentale où la liberté de pensée et de conscience me semble être devenues des acquis [ce en quoi je me trompe...].

Ce qui me dérange, c'est l'affichage explicite ou implicite d'appartenance à une des religions du livre. Quels que soient ces affichages ostentatoires, excepté chez les religieux officiels, j'y vois tous les aspects les plus négativement traditionnels de la famille patriarcale. Ils dépassent et neutralisent, à mon avis, les aspects positivement humanistes, que je connais fort bien étant issu d'un milieu catholique convaincu et pratiquant.

En fait, ce que je n'aime pas, c'est l'idée de suivre une religion, et tout spécialement une des trois monothéistes. J'y vois un "prêt-à-penser", que je ressens comme une négation de... de l'esprit humain. Afficher sur soi, dans notre société, « je pense et vis comme ma religion me dit de penser et vivre », ça me révulse. Viscéralement. Quelque chose en moi n'accepte pas cela. Pour moi la pensée s'affirme dans la remise en question, pas dans le respect des traditions.

Bon... c'est évidemment plus subtil que ça. Car je sais aussi que l'effondrement de certains repères, et notamment avec l'atténuation des images du père et de la mère comme cadre de référence, font que notre société se sent parfois flottante, avec risque de dérive vers on ne sait où... J'ai bien conscience que ma vision des religions est certainement étriquée et épidermique. Mon rejet est fort et je sens bien que je friserais l'intolérance si je ne parvenais à faire la part des choses. Mais je dois prendre sur moi : je ressens presque ces rappels visuels de la religion comme une violence faite à ma conscience. Cela m'agresse.

Je devrais me demander ce qui est touché en moi, ce qui m'inquiète...

Je dois avouer que je ressens quelque chose de similaire face à d'autres forme de "prêt à penser" : médias, consumérisme et société mercantile...

Commentaires
P
Ce qui m'inquiète probablement, D&D, c'est que puisse se développer un système de pensée que je ressens comme liberticide et rétrograde. J'ai peur de me faire "manger" par ce qui semblent prendre de l'ampleur, quoique restant marginal à l'échelle de la population. Mon malaise vient des questions que je me pose autour de la tolérance : que peut-on tolérer en matière de libertés individuelles (quand elles sont discriminantes), et jusqu'où ?<br /> <br /> Est-ce qu'afficher ses idées, et notamment en tenant un blog, ne tiendrait pas du prosélitysme ? La question mérite d'être posée... Sauf qu'il ne s'agit pas de religion, ni même de système de pensée se ralliant à un courant de pensée définissable. Cela reste une expression individuelle, et une pensée relativement libre (c'est à dire ne se référant pas un texte fondateur considéré comme incontestable). Mais sur le fond tu as certainement raison : en considérant que mon mode de pensée est "meilleur" (parce que prônant l'ouverture d'esprit, la non-discrimination, la tolérance) j'aboutis à une certaine doctrine qui trouve ses limites dans ce qu'elle expose et qu'elle ne respecte pas.<br /> <br /> C'est bien là que se situe le malaise.
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D
Tiens, c'est "amusant" comme j'aurais "pu" écrire, presque mot pour mot, ce billet. Avec ce point culminant pour moi : "Cela m'agresse.<br /> Je devrais me demander ce qui est touché en moi, ce qui m'inquiète...".<br /> Et je ne sais toujours pas vraiment.<br /> Ou alors, et cela revient quelque part à un commentaire que je faisais chez Coumarine sur cette aventure, je me demande si ce n'est pas la question du prosélytisme qui est à l'oeuvre. Je veux dire que quelque part, je n'ai pas envie de les voir ces signes d'appartenance à ce que je ressens aussi comme du "prêt à penser". Ce qui n'a rien à voir avec la foi. Et je ne saurais non plus réduire une appartenance affichée à une religion comme une soumission à du "prêt à penser". Mais dans l'affichage, il peut y avoir le fait d'exposer "sa" ou "ses" vérités, et je crois, d'inviter à la/les partager, au moins à s'y pencher. <br /> Bref, je me demande si ce n'est pas cela qui m'agresse. <br /> Parce que.<br /> Peut-être cela me renvoie à une forme de prosélytisme que j'aurais... Pas de manière résolue, mais presque malgré moi. Ainsi : est-ce que tenir un blog, quand il relate ouvertement d'interrogations personnelles (et même ouvertes et prêtes au dialogue, et même ne semblant pas strictement intimes au prime abord), est-ce que tenir un blog, donc, c'est dénué de toute forme de prosélytisme ?... Euh... Comme un prosélytisme des Lumières (et je ne dis pas que j'en suis une :-) ).<br /> Bref, bref, bref : est-ce que ces confrontations ne m'agressent pas parce qu'elles me renverraient à ma propre intolérance ou à ses résidus ?...<br /> Je doute encore d'être assez clair. Je ne serais pas surpris qu'il y ait quelque chose par là. Au moins pour moi. <br /> Et vous, Pierre, cela vous parle ces élucubrations là ?
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P
« Comment comprendre l'autre à travers sa différence ? », dis-tu, Isis. C'est ce que j'essaie de faire, et ce n'est pas facile. Mais l'aventure est passionnante :o)
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I
dans le bahut que je gère, il y a des filles qui otent leur foulard au portail en entrant, et le remmettent en sortant.<br /> Malaise pour moi.<br /> il y a 7 ans dans le Sud Marocain, j'ai passé trois semaines à me baigner en maillot au milieu de femmes qui elles se baignaient toutes habillées.<br /> Malaise pour moi.<br /> pendant ces dernièrs vacances de Noel, j'ai observé dans le Nord Marocain(Rabat-Casa ) des jeunes filles et femmes se comporter cpommme se comportent les jeunes femmes ici, rire,s'amuser, faire du shopping, plaisanter evec des garçons; seule différence: le foulard qu'elles portaient , joliement agrafés avec des perles ou autres bijoux.<br /> Questionnement pour moi.<br /> <br /> comment comprendre l'autre à traveers sa différence?<br /> Isis
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E
Oui, je sais bien cette idée là se transforme vite en idée suicidaire, mais elle est plus forte que moi, elle nait de ma révolte envers ce genre de modèle...
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P
Etolane, c'est bien par rapport à la condition des femmes que je conteste le maintien du modèle patriarcal, lui même entretenu par les religions. Et pour ce qui est de se balader nue... je crains qu'on ne t'en laisse guère le temps ;o)
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E
Je ressens aussi ce malaise que tu décris, d'ailleurs lorsque j'y pense trop fort, l'envie subite d'aller me balader nue en Iran ou en Arabie Saoudite m'entraine l'esprit! Enfin, je crois que c'est en ma condition de femme que je me sens touchée plus que dans le coté religieux...
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