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Alter et ego (Carnet)
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11 décembre 2016

Perplexité

Une amie-lectrice s'est inquiétée de mon silence. Je l'ai rassurée : nulle maladie ne me tient à l'écart. Je pourrais presque dire que tout va bien, si je ne m'en tenais qu'à moi. Mais il est vrai que, pour le microcosme blogosphérique qu'habituellement je fréquente, le mutisme dont je fais preuve en ce moment indique que je ne suis pas dans une phase de communication exacerbée. Je reconnais même volontiers me situer carrément en retrait du flux de socialisation numérique, le contenu de ce qui s'y échange m'apparaissant comme dérisoire par rapport à ce qui me préoccupe.

Car oui, je suis préoccupé. Et pour tout dire, un peu profondément inquiet.

Ce qui m'inquiète ? L'avenir. Pas le mien, mais le nôtre. Comme si je percevais le bruit sourd d'un tremblement de terre qui s'annonce, je redoute de nous voir aller vers des lendemains pas franchement réjouissants. Pourtant je ne crois pas être du genre bileux, et encore moins angoissé. Avec une devise telle que « on verra bien », je laisse généralement toute latitude aux éventualités les plus diverses de se produire. Je pourrais même dire que j'ai toujours eu confiance en l'avenir, fort de tous les possibles qu'il recèle, y compris les plus improbables. Mais peut-être avais-je une confiance un peu naïve en l'humanité, de laquelle je pensais que le meilleur finirait forcément par triompher un jour... Or là, je doute. J'ai pris un grand coup de réalité derrière les oreilles, qui me laisse sonné. Je me demande s'il n'est pas plus fort que que ce que j'ai ressenti lors des exactions, guerres, massacres, génocides et autres attentats desquels j'ai déjà été le contemporain atterré. D'une certaine façon je m'étais "habitué" à savoir des groupes belliqueux opprimer ou occire leurs frères humains en masse, perpétuant ainsi la violence intrinsèque dont notre histoire humaine témoigne. Tout au plus pouvais-je espérer que peu à peu celle-ci diminue, tout en sachant que de mon vivant il n'y avait aucune chance que je la voie disparaître. Plus urgent, plus important me semblait-il, je considérais qu'il nous fallait concentrer nos efforts sur notre avenir commun. Question de priorités. De pragmatisme. La prise de conscience tardait à venir, certes, mais je l'espérais à l'approche. Las ! En voyant, éberlué, la plus grande puissance mondiale se doter d'un représentant des pires exploiteurs, n'ayant pour objectif que les valeurs du profit en privilégiant le status quo, j'ai compris que le monde était encore loin d'entreprendre son salutaire virage.

Or chaque jour qui passe nous enfonce un peu plus dans l'impasse de la catastrophe environnementale globale qui nous est promise. Chaque jour voit s'accentuer le désastre écologique, avec des conséquences irrémédiables : destruction de milieux d'équilibre millénaires, disparition d'espèces à grande échelle, érosion massive de la biodiversité, pollutions à très long terme. Cela m'effraie, m'attriste, me révulse.

Ça, c'est pour la nature. Mais il y a aussi ce qui concerne nos sociétés de dilapideurs qui, en continuant comme si de rien n'était, se destinent, très probablement, à s'affronter bientôt dans des luttes fratricides pour s'arracher jusqu'aux dernières miettes d'une redoutable liberté précaire : celle de consommer sans limites. Et j'y participe, pris dans un système global qui tarde à se réformer en profondeur. Malaise.

Ai-je tort de m'inquiéter ? Fais-je preuve d'un pessimisme outrancier ? d'irréalisme ? d'alarmisme ? voire de catastrophisme ? Pourtant, ceux qui n'en tirent aucun profit sont formels : nous devons changer de paradigme au plus tôt. J'ai davantage tendance à les croire que ceux qui ont tout intérêt à ce que rien ne change...

Comment rester insouciant avec la menace qui gronde en bruit de fond ? Je ne sais pas. Je m'interroge. Que faire ? Alors oui, perplexe, cela me rend parfois muet. Et grave.

 

 

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Commentaires
U
Bonsoir...j'ai lu attentivement vos commentaires fort enrichissants...Merci pour cette lecture et ces idées développées.
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C
Ton plaidoyer me fait penser à ça :<br /> <br /> "Il faut allier le pessimisme de l'intelligence et l'optimisme de la volonté" Antonio Gramsci
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A
Il ne me semble pas que l'inquiétude puisse être un moteur de changement.<br /> <br /> On dit parfois que le médecin qui se montre ouvertement inquiet pour son patient précipite la fin de ce dernier…<br /> <br /> Je comprends bien les sentiments que tu exposes dans ce billet. Personnellement, je ne suis pas dans ce type de disposition.<br /> <br /> Mais on peut se poser la question des influences néfastes des médias et des réseaux sociaux sur un certain « état d'esprit défaitiste » pour ne pas dire démobilisateur : « de toute façon tout est foutu ! ».<br /> <br /> L'être humain a besoin de relations vivifiantes entre les personnes, c'est-à-dire qui cultivent la vie concrètement dans un collectif. Les actions solitaires sont généralement de peu d'effet. <br /> <br /> Peut-être ai-je eu, et ai-je encore cette chance ? Nul ne peut me faire désespérer de l'avancée inexorable de l'humanité vers plus d'humanisation. Ce qui ne veut pas dire que bien des phénomènes ponctuels d'entraves, pouvant durer des années, ne viennent retarder cette marche qui dure depuis des milliers d'années. <br /> <br /> Les humains continuent de se faire la guerre entre-eux, faute de mutations génétiques suffisantes pour qu'il puisse encore en être autrement.<br /> <br /> <br /> <br /> Mon positionnement est d'essayer de tenir les deux bouts : l'aspect totalement éphémère et dérisoire de mon existence, et la Grande Aventure humaine qui a commencé aux frontières du passage de l'animalité à l'humain.<br /> <br /> Et des humains qui œuvrent concrètement à cette aventure d'humanisation, j'en connais un nombre certain dans mon entourage. En les fréquentant, je n'ai pas d'inquiétude, d'autant que j'apporte ma part, à ma mesure. Qui plus est, cela donne un sens à ma vie et est source d'une certaine Paix.<br /> <br /> Cela n'enlève rien aux constats de la réalité déplorable de ce qui peut traverser le temps et chaque époque.
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M
JE te rejoins sur ton état des lieux si pessimiste mais j'aime croire à l'optimiste de Célestine.... Sinon c'est trop triste...
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K
Il est bien difficile de se déplacer dans le noir là où les obstacles peuvent être autant imaginaires que réels. C'est cela le problème... dans le noir on peut ressentir qu'un danger fonce directement sur nous mais sans en connaître l'ampleur ni de quel coté il nous attaquera. C'est pourquoi il faut en premier lieu faire la lumière, se questionner profondément et sur les causes,... et complexe ou pas, remonter concrètement, pas à pas, à la source des turbulences. Devant toute maladie... en premier... un diagnostic clair. Sinon, oui il ne nous restera que le désespoir.
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F
Tu ne peux savoir combien je suis attristée chaque fois que je vois des hommes s'entretuer, se faire la guerre, profiter des plus faibles, etc., alors que nous avons cette chance de vivre sur une Terre si belle et si généreuse. Les hommes ne s'en émerveillent même pas, trop occupés à vouloir détenir le pouvoir, à vouloir amasser de l'argent, quitte à ce que d'autres meurent de faim. Toujours le pouvoir, l'argent. Ils n'ont rien compris. Tu as raison, ce que nous vivons n'est pas réjouissant du tout, Pierre. Pourtant, et je rejoins Célestine, il faut continuer à croire que tout peut changer. Ce que nous ferons, même à petite échelle, sera toujours du bon pour la planète et aussi pour les générations suivantes. Tout ce que nous pourrons envoyer de positif, ne sera jamais vain, et j'y crois fortement. <br /> <br /> Bonne fin de journée, Pierre.
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C
Changer de paradigme, c'est chaque jour faire un pas de fourmi vers ce changement. <br /> <br /> J'ai écrit à mes enfants pour leur dire que je ne voulais pas de cadeau juste "parce que c'est noël" je suis pour fêter les non-anniversaires, et faire des cadeaux quand j'en ai envie, et pas parce que c'est dicté par une mode ou des impératifs économiques. C'est une goutte d'eau mais elle m'a fait du bien. <br /> <br /> On ne peut faire que ça, de toutes façons, des pas de fourmis. Un pas de fourmi, c'est mieux que de rester immobile en disant que ça ne sert à rien. <br /> <br /> Alexandre Jardin propose une politique basée sur la bienveillance. Je ne lui ris pas au nez. Il a raison, je vote pour lui, son programme est nettement plus à la hauteur que ceux des autres, et en tous cas pas plus ridicule...Lui aussi croit aux gouttes d'eau.<br /> <br /> Je continue à ramasser les papiers qui traînent dans la rue quand j'en vois un, je me réjouis des belles choses, je sème des graines. Je descends ma chaudière à 20 degrés au lieu de 21 et je mets un pull. <br /> <br /> Je suis aussi perplexe que toi. Aussi attristée de voir la hideur de l'appartement de Trump, qui pète dans le marbre et les dorures kitsch, et qui croit que c'est là le bonheur et le fait croire aux simples d'esprit. Je ne mange presque plus de viande, et en tout cas pas de l'industrielle, je suis persuadée que les changements se feront, on a quand même progressé. Il y a quand même une volonté en haut lieu de paralyser les bonnes volontés, c'est dingue ! <br /> <br /> Quant aux guerres, c'est une connerie sans nom, Prévert a encore raison en 2016, je ne trouve pas que ce soitt être "nanti" que de vivre simplement dans un pays en paix, c'est juste un îlot de raison dans un monde mené par la folie et les passions suicidaires des hommes.<br /> <br /> Il reste l'amour, l'amitié, les enfants, l'espoir, la musique et la poésie, les valeurs humanistes comme les flammes fragiles qui aident les prisonniers au fond de leur geôle. Allez, Pierre, si tu flanches, ça ne fera pas aller mieux notre pauvre monde si beau pourtant...<br /> <br /> Bisous d'espoir<br /> <br /> ¸¸.•*¨*• ☆
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N
Bonjour Pierre,<br /> <br /> <br /> <br /> je partage ton constat. Le psychisme social a besoin de la guerre pour retourner à la conscience. C'est l'infernal cycle de l'humain et nos générations de nantis se sont trop habitués à l'absence de conflits armés, confondant le confort acquis au prix de la Nature avec l'immense potentiel de la paix. Trois générations sans guerre, c'est ce que notre Continent nous a offert pour la première fois dans l'histoire de l'Homme. Mais les bruits de bottes sont là, dans la rue, dans les coeurs et les regards de fiel.<br /> <br /> Que faire? Nous sommes minuscules... Rester en paix avec soi-même.<br /> <br /> Si cela t'intéresse, l'hindouisme associe cette époque à la fin du Kali Yuga, l'âge métallique auquel devrait succéder une ère de sagesse... <br /> <br /> <br /> <br /> Bien à toi.<br /> <br /> <br /> <br /> Nat
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