Conscience professionnelle
J'aime mon travail. A tel point que, fortement impliqué et plutôt consciencieux, je n'épuise pas mon stock de congés annuels. À la longue je dispose d'un nombre de jours à prendre assez considérable, dépassant le double du quota annuel ! Qu'à cela ne tienne, me direz-vous : tu n'as qu'à les prendre ! Sauf que... personne ne me remplace lorsque je ne suis pas là. Je dois donc anticiper chacune de mes absences et les caser judicieusement pour que les rouages ne se grippent pas.
Début mai je me serais bien octroyé une ou deux semaines de vacances : la saison est idéale, avec de belles périodes de beau temps et encore peu de monde. Malheureusement la charge de travail était importante et j'ai donc reporté. De semaine en semaine les reports successifs m'ont amené... mi-juin. Bientôt la période des vacances scolaires, synonymes de surfréquentation de tout lieu un tant soit peu touristique. L'horreur, pour un solitaire comme moi ! J'ai donc profité d'un relatif répit pour me mettre en congé la semaine prochaine. Hop, je boucle une dernière affaire urgente et importante et je pars. J'aurais bien pris deux semaines mais...
Pour augmenter un peu cette courte durée j'y adjoins un jour de récupération. Ce qui fait qu'hier j'étais déjà "en vacances".
Théoriquement.
Sauf que les affaires en cours ne se suspendent pas illico, surtout quand elles ont un caractère "urgent et important" [tout cela étant évidemment relatif]. Dans la matinée je vois l'appel d'un client sur mon téléphone pro. La première fois je ne réponds pas : je suis en congé ! Quand je vois qu'il me rappelle, une heure plus tard, je décroche : je sais que c'est peut-être le déclenchement de l'affaire que je viens de boucler et qui devra alors être traitée dans l'urgence. Paf ! il s'agit bien de cela... et je n'ai pas laissé assez de consignes à mes collaborateurs pour qu'ils puissent s'en saisir correctement.
Le hasard veut que ce même jour mon fils soit de passage dans la ville ou se trouve on bureau. Je devais donc m'y rendre de toutes façons pour le rejoindre, ainsi que sa soeur. Nous avons passé un bon moment ensemble dans un restaurant, puis à faire divers achats utiles. En milieu d'après-midi, lorsque nous nous sommes quittés, je me suis rendu... à mon bureau, juste à côté. Surprise de mes collaborateurs ! Le temps de donner les explications manquantes sur la fameuse affaire, d'ouvrir l'ordinateur pour imprimer quelques documents, de regarder s'il n'y avait pas d'autres urgences... et hop, voila une heure et demie de passé ! Et comme d'habitude j'ai quitté le bureau le dernier. Mais au moins l'affaire peut être suivie et je pars l'esprit tranquille.
À ceux qui se sont étonnés de me voir dans les couloirs j'ai répondu « c'est ça le service public ! ». Or je ne travaille absolument pas dans un service public. Par contre le client est une collectivité publique...
Il est certain que je prends mon travail à coeur. Peut-être un peu trop, parfois, mais c'est aussi une question de conscience professionnelle. En même temps ça ne me dérangeait pas, cette fois-là, de bien organiser l'affaire pour que tout le monde soit gagnant : le client, mes collaborateurs, la structure qui nous emploie. J'aime que les choses se passent bien et que tout le monde soit satisfait. Même si je sais que cela me demande un investissement certain. C'est ma façon de "bien" faire mon travail, et de m'en sentir responsable. Et tant pis si pour cela je dois faire quelques entorses au respect strict des horaires de travail... ou des jours de congés.
Cela dit, maintenant je suis vraiment en vacances. Demain je pars... en espérant que la météo soit favorable, après une semaine de pluie.