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Alter et ego (Carnet)
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10 août 2022

Tracer la mémoire du présent

À l'unisson de la population française, je me suis mis en mode "vacances" : en août, je ne travaille que trois jours par semaine. Cela me permet d'augmenter notablement mon temps de liberté et, de là, d'ouvrir des espaces propices à la réflexion. Je renoue ainsi avec une pensée flottante, vers laquelle, par nature, je suis volontiers attiré. Ma vie habituelle ne laisse que peu de place à cette errance mentale.

Le temps libre me permet aussi de me livrer à des activités sans cesse repoussées. J'ai entrepris, par exemple, d'actualiser l'inventaire des arbres que j'ai plantés et vois grandir depuis près de trente ans. Approximativement un millier, peut-être davantage. S'agissant d'espèces peu communes, je suis le seul à pouvoir les identifier facilement. Il serait donc dommage de perdre ce savoir le jour où je ne pourrai plus le transmettre.

Ce faisant, j'anticipe les conséquences de ma disparition. Je fais aussi un pari sur l'avenir : supposer que lesdits arbres me survivent. Ce qui, auparavant, du fait de leur longévité naturelle, aurait tenu de l'évidence, n'est évidemment plus du tout certain. La grande sécheresse qui sévit actuellement dans tout le pays me le rappelle sans ménagement. Les conséquences du changement climatique deviennent clairement perceptibles. Il se pourrait donc que l'inventaire d'un patrimoine vivant devienne la future liste des disparus. Déjà certains arbres, pourtant vigoureux et prometteurs, n'ont pas résisté aux trois années sèches consécutives de 2018-2019-2020. Auparavant d'autres étaient morts durant l'épisode mémorable de 2003. Rayés de ma liste, j'en ai néanmoins conservé la trace. La sécheresse actuelle fera t-elle encore de nouvelles victimes ?

Cet inventaire je peux l'enrichir car je dispose des données concernant l'histoire de la plupart des arbres : l'origine des graines, l'année de germination, la date de plantation. Il me faut simplement - euphémisme - rapprocher des fichiers numériques distincts pour les mettre en concordance. Tâche fastidieuse et chronophage s'il en est, reportée depuis des années pour cette raison. En outre, pour quelques arbres singuliers, j'ai depuis plusieurs années effectué des mesures de croissance : diamètre du tronc et hauteur. Ainsi je pourrais, potentiellement, fournir une base d'observations assez complète... pour qui s'interesserait, éventuellement, à cette collection dendrologique (du grec "Dendron", "arbre").

 

IMGP4839

Inventaire papier sur fond de feuilles sèches

 

Pourquoi m'astreindre à cette fastidieuse compilation de données ? Cela tient propablement de la même logique que l'écriture diaristique : faire oeuvre de mémoire. Relier dans une chronologie les constats du présent. Conserver la trace d'une évolution, d'un parcours. La photographie, en partie, joue aussi ce rôle mémoriel. Il en va de même pour les correspondances.

Voila le genre de travaux (in)utiles auxquels je peux me livrer lorsque je dispose de temps. Les idées de manquent pas et, l'âge de la retraite approchant, cela m'ouvre une belle perspective pour me consacrer à ce qui m'importe. 

La retraite ? Ouais, j'y pense forcément. Mais j'hésite encore : m'y mettre dès que possible... ou continuer à travailler tant que je trouve satisfaction dans ce que je fais ? Indéniablement j'apprécie une partie de ma vie professionnelle, qui tient du défi continuel. Chargé de piloter une activité en croissance, mon rôle consiste à tenir la barre sous une double contrainte : sociale et économique. C'est stimulant, jamais ennuyeux. Par contre il manque une troisième contrainte - écologique - dont l'insuffisante prise en compte me frustre. Je ne sens pas autour de moi une dynamique à même de faire évoluer les choses en ce sens. Du moins pas assez rapidement et pas avec l'ampleur nécessaire. Cela rend mon investissement professionnel bancal.

Mais le milieu professionnel a un avantage : il me permet un travail collaboratif, donc relationnel. Il représente une grande part de ma vie sociale. C'est important, pour un solitaire comme moi, de bénéficier de telles interactions. Une fois retraité, je risque de me complaire dans la solitude et de me priver ainsi d'échanges. Certes, tant que je suis engagé dans la politique locale je serai encore amené à interagir...

Le temps dilaté dont je disposerai à la retraite, qui me donnera une liberté à laquelle j'aspire, me pose vaguement question : la vie en solo ne va t-elle pas manquer de partage ? Mais en fait cela ne m'inquiète pas vraiment : il sera toujours temps de m'ouvrir à de nouvelles explorations !

Si, toutefois, les conditions d'existence le permettent, mais ça c'est un autre sujet...

 

[pour l'occasion j'inaugure un nouveau "tag" : le mot "retraite"]

Commentaires
G
c'est vrai qu'à la retraite le temps se dilate...et se restreint aussi car c'est le temps que l'on met pour les démarches qui se dilate. sans compter les activités associatives et ce qu'on s'était toujours promis de faire. regrouper auparavant sur 3 jours semble une bonne idée pour un tremplin, si on tient le rythme<br /> <br /> Bravo pour ce relevé bien indexé de vos activités de planteur.<br /> <br /> Je suis cependant étonnée car il me semblait que les espèces aimaient être plantés en colonie pour communiquer et se soutenir en cas de désagrément.<br /> <br /> Se rapprocher d'associations locales ou nationales (dans la région toulousaine nous avons Solagro, ou arbres et paysages d'autan) peut vous permettre à la fois une activité plus écologique et collaborative ?
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J
>m'y mettre dès que possible... ou continuer à travailler tant que je trouve satisfaction dans ce que je fais ?<br /> <br /> <br /> <br /> Très très bonne question, carrément existentielle. Comme pour toi mon taff est une ressource intellectuelle avant tout, de réflexion, d'invention, de création, et sociale avec les collègues, les alternants, les personnes en prod avec qui on travaille. En ceci le confinement de 2020 a été révélateur : j'ai flippé de me retrouver, certes à la campagne dans des conditions idéales, mais seul et isolé. La retraite ne POURRA PAS être ça.<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai professionnalisé mon studio d'enregistrement (qui était un home-studio depuis 20 ans), je donne des cours de musique, je vends mes prestas musicales, tout ça dans le but de préparer "la suite", 4-5 ans avant le grand saut. Est-ce suffisant ? Sûrement pas. <br /> <br /> <br /> <br /> Clairement je ne suis pas prêt et je ne comprends pas mes collègues qui apprennent du jour au lendemain que dans 3 mois ils peuvent partir avec le plan machin de préretraite ou de gestion des compétences (lol !), ils paient une fortune pour acheter des trimestres et partent, comme ça, d'un coup, trop contents.<br /> <br /> <br /> <br /> Bof.
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C
Pierre, <br /> <br /> l'âge de ta retraite n'a pas encore sonné, je vais te dire une chose, je pense que tu n'es pas prêt ^^.<br /> <br /> Pour moi, j'y travaille et c'est complexe, j'aimerais la prendre dés l'an prochain, mais l'administration est têtue, une fois c'est possible, une fois ça ne l'est plus et pour trouver un(e) interlocuteur(trice), c'est quasi impossible de mon bled, même par téléphone.<br /> <br /> <br /> <br /> je m'étais faite à cette idée car j'ai un projet (pas très en adéquation avec la décroissance...) de voyage en van aménagé sur les routes de l'Europe et plus si affinités et pour cela, il faut être libre de tout travail et en bonne santé...<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai envie de découverte à mon rythme, en autonomie le plus possible...seule l'utilisation de carburant me pose problème, l'énergie peut être solaire, l'eau utilisée avec parcimonie, mais j'aurai besoin de dérivé du pétrole pour avancer...<br /> <br /> <br /> <br /> C'est mon rêve, est-ce qu'il se réalisera...je n'en sais rien. <br /> <br /> Tant de choses évoluent, le climat, les ressources, les conflits, la société, je regarde parfois tout cela avec effarement.<br /> <br /> <br /> <br /> Toujours, tu poses ici la question du célibat, en concluant à chaque fois que la solitude te convient, et chaque fois, ça me fait sourire cette obsession !<br /> <br /> <br /> <br /> Je vis en solitaire moi aussi mais j'avoue que ça me pèse de plus en plus souvent, je subis plus que je choisis et en même temps je ne fais rien pour que cela change, c'est l'incohérence de la situation. Je ne crois pas pouvoir supporter quelqu'un à demeure près de moi depuis le temps que je me suis habituée à un rythme individuel.<br /> <br /> Faire des rencontres ? je n'en ai pas la force, l'envie ni l'énergie...il faudrait que cet homme tombe "du ciel" et avec toutes les qualités requises, dur dur ^^.<br /> <br /> <br /> <br /> Pourtant, la phrase de "Into the wild" que tu as citée il y a quelques semaines a une résonance particulière en moi (même si je n'ai pas commenté). Je crois que lorsqu'on vieillit, le partage et la tendresse deviennent indispensables.<br /> <br /> <br /> <br /> Questions ! <br /> <br /> A quoi serviront toutes tes données de mesure sur ce millier d'arbres pour ta descendance ? <br /> <br /> est ce cela l'important ? <br /> <br /> les voir grandir, les apprécier pour leurs beautés, leurs fragilités, leurs blessures, leurs sagesses et en quelques sortes leurs témoignages ne suffiront pas ?<br /> <br /> <br /> <br /> Je ne suis pas une spécialiste...hélas<br /> <br /> <br /> <br /> Je te souhaite de bonnes vacances au ralenti Pierre
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J
Un millier d'arbres ??? <br /> <br /> Suis admirative, Pierre, tu es un hêtre comblé ;) <br /> <br /> Cette interminable canicule doit bien te causer des soucis... Comme à tout le mode d'ailleurs. <br /> <br /> <br /> <br /> HS :D <br /> <br /> Quelle liberté entraverait pour toi le fait de vivre en couple ?<br /> <br /> Personnellement, je constate que l'avancement dans l'âge conditionne pas mal mes libertés :)<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce beau billet chlorophyllé ; j'aime bien quand tu te dévoiles un peu :P<br /> <br /> Bonne soirée, bises.
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