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Alter et ego (Carnet)
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13 juillet 2009

Dans le silence des rencontres

Hmmmm ! deux jours de solitude. Complète.
Enfin !

Je les attendais ces jours, après avoir passé deux semaines non-stop en contact avec autrui sous diverses formes : relations d'amitiés, de séduction, enfants de passage, réunions municipales... Sans oublier mes journées de travail. Les rares soirées où j'étais libre j'étais tellement épuisé que je m'endormais dès que je me posais.

Vie très occupée finalement. Un peu trop à mon goût. Du coup je profite de ce week-end prolongé pour prendre mon temps. Lire, écrire, me promener, glandouiller...

Parmi les rencontres notables il y a eu une soirée passée avec Charlotte, mon ex-femme [oui, ça y est, je parviens à écrire ce terme...]. Elle était venue ramasser cassis et framboises dans "notre" jardin. Je ne l'avais pas vue ni n'avais eu d'échange avec elle depuis l'entrevue du film « Je l'aimais » [qu'elle m'a avoué avoir choisi par erreur, pleurant toute la séance...]. Après avoir bavardé de choses et d'autres nous en sommes venus, comme souvent et à son invitation, sur nos vies sentimentales. Succinctement, discrètement. Juste histoire de savoir comment l'autre vit sa vie, sans entrer dans les détails. Je n'ai pas évoqué mes relations plurielles, considérant qu'il était trop compliqué d'expliquer en quoi elles consistaient. Charlotte ne m'a pas vraiment posé de questions. En revanche elle m'a fait part, une nouvelle fois, de ce que j'ai ressenti comme une certaine déception : elle ne trouve pas de relation satisfaisante avec des hommes. Elle m'a parlé de ce qu'elle appréciait chez moi. Nos dialogues, l'ouverture que je lui apportais avec mes réflexions. Comme diraient les québecois : « ça m'a fait un petit velours » d'entendre cela.

Autres rencontres, sur lesquelles je ne m'apensantirai pas [pour éviter les commentaires maladroits] : les moments passés avec mes... euh... comment les nommer... "amitiés tendres". Sauf pour dire que, précisément, je cherche un terme non équivoque. Pas encore trouvé. J'ai cependant réalisé que je me laissais entraîner vers une implication excessive, subissant la pression de demandes trop fréquentes de rencontre. Je me suis donc recentré sur mes désirs réels : vivre des amitiés de confidences où l'expression du désir n'est pas contrainte. Des relations de partage qui laissent une place importante au désir et au sensuel, au sexuel, mais qui ne soient pas asservies aux sentiments, et surtout pas à la dépendance et aux demandes pressantes qui en découlent. Bon... ça c'est ma posture. Les ajustements sont en cours avec mes partenaires. Pour le moment ça va plutôt bien...

Autre rencontre importante : les Journées de l'autobiographie à Ambérieu-en-Bugey. L'ami Valclair, que j'ai reçu pour l'occasion, en a donné sa version et j'avoue que ça m'arrange bien : me voila dispensé d'en faire un compte-rendu exhaustif ! Pour autant je ne resterai pas muet à ce sujet. Comme lui j'ai ressenti un moindre investissement personnel que les années précédentes, probablement parce que la part d'inconnu et de nouveauté s'est forcément tarie, emportant avec elle l'enthousiasme de la découverte. Peut-être aussi, et surtout, parce que biographie, autobiographie et journal, sont des pratiques qui diffèrent notablement de celle des écrits en direct et en public, comme c'est le cas sur nos blogs. Cette instantanéité de la lecture apporte vraiment une dimension singulière, unique. Peu partageable avec ceux qui n'en connaissent pas les spécificités. Je me sens toujours un peu à part au milieu des participants à ces journées. Tout comme je sens à part les participants qui cherchent absolument à vendre les mérites de leur livre publié, avides de reconnaissance et de lecteurs, se rehaussant immodestement au statut d'écrivain... Rien ne me rebute davantage que celui ou celle qui croit être l'auteur d'une oeuvre passionnante, digne d'intéresser tout interlocuteur [oui, je sais, je suis un peu méchant...]. Hum... probablement parce que j'y retrouve un peu de mon propre orgueil, que je voudrais réduire à néant.

Durant ces journées j'ai particulièrement apprécié l'intervention d'Alexandre Bergamini, qui a eu l'audace de partir en errance sur un cargo pourri durant des mois, entre mer du Nord et Océan Indien. J'ai été marqué par la place qu'il laissait à la lenteur, tant au niveau de ce voyage que pour répondre aux questions qui lui étaient posé. Le silence avait toute sa place. C'est un homme qui sait donner de l'espace au temps. Il a parlé du trajet en cargo, « temps de se libérer de soi avant de parvenir à destination ». J'ai aimé l'entendre dire qu' « il se passe autre chose que soi dans l'autobiographie ». Écrivant au cours d'une tempête déchaînée il en retire qu' « écrire c'est combattre les furies, pas écouter les sirènes ». Je retrouve bien là cette exigence envers soi, contre soi, cette lutte qui libère alors que la complaisance entrave et fige dans l'immobilisme. Bergamini parle aussi de « l'approche silencieuse de l'écriture ». J'aime beaucoup cette opposition du silence et des mots. Le rapport au temps, aussi : « le temps est une notion intérieure ». Concernant son rapport aux autres il dit « il y a suffisamment de monde en moi pour ne pas chercher à rencontrer ». Il privilégie la solitude et le silence, affirmant « les autres sont ma limite ». L'auteur « essaie d'écrire depuis les espaces vacants qui se sont libérés après avoir parcouru (ses) errances ». Revendiquant son choix de solitude il dit : « les autres m'intéressent quand ils sont libérés d'eux-même. Quand ils n'ont rien à me dire. Je n'ai pas besoin d'un "partage" qui n'en est pas ». Il conclut en soulignant que « pour trouver le mouvement intérieur il faut se taire, faire silence ».

Il m'est difficile de restituer en quelques phrases la densité de ses propos et l'épaisseur de ses silences, mais j'ai été assez sensible à son approche. L'analogie entre voyage intérieur et voyage dans l'espace, leur rapport au temps, au silence, aux autres, à soi...

Bon... après ça mes mots me paraissent bien superflus, hé hé...
Je sais bien que je me perds autant que je me trouve en écrivant ainsi sur ce blog public et commentable.

Disons que je suis autant dans un désir de témoignage que dans une recherche personnelle, l'un et l'autre se nourrissant alternativement.

Rencontre au sein de ces rencontres, celle d'une blogueuse très discrète, un peu plus ancienne que moi dans ce monde des écrits en ligne. Amusant de pouvoir évoquer ensemble le souvenir des "pionniers", exhumant de nos mémoires, une décennie plus tard, les noms disparus des connaissances communes. Troublant et réjouissant de constater qu'une lecture au long cours, doublée d'une intuition féminine aiguisée, permet de deviner entre mes lignes ce que je ne dis pas. L'occasion de donner, dans la discrétion des confidences, quelques éclairages sur les lacunes volontaires de ce que je livre de moi en public. Eh oui, la transparence peut faire illusion en contournant l'essentiel. Entre ce que j'écris au grand jour et ce que je laisse dans l'ombre il peut y avoir un monde. Il en est de même pour beaucoup d'entre nous...

Nos échanges et nos silences ont apporté cette part manquante qui affecte nos écrits. Cette dimension supplémentaire que confère la présence, les intonations de voix, les hésitations palpables et le plaisir de céder dans la confiance des confidences.

Mais ce qui me restera de ces journées sera sans doute d'avoir partagé, certes superficiellement et en marge, un peu du quotidien de cette blogueuse mal voyante. J'ai pris conscience de l'aisance dont nous disposons, sans même y penser, avec la vision pleine et entière. Découverte d'un handicap que je ne connaissais pas, difficile à décrire, fluctuant, mais constatable dans chaque geste de la vie courante. Ne serait-ce que dans les déplacements et mouvements. Et pourtant, tout lui reste possible, au moins pour un temps, avec une aide adaptée. Nous avons même pû nous promener sur les chemins au relief chaotique des collines environnantes. J'ai aimé contribuer à cette aide, de temps en temps, devenant vigilant sur tout ce qui pouvait se révéler être obstacle et danger. J'ai retrouvé un peu de ce que j'apprends dans l'écoute : être présent, attentif, mais sans jamais orienter selon ma perception des choses. En quelque sorte aider l'autre à percevoir le monde, mais sans altérer son libre choix. Bel enseignement...

.

cargo

Avec lenteur le cargo s'imprègne des côtes qu'il longe...

(Canal de Panama, janvier 2009)

Commentaires
P
Annick, je ne pense pas que tu aies à être particulièrement "confuse" : tu as oublié quelque chose qui ne faisait pas partie de tes repères et de ton environnement habituel. Tu ne pouvais tout anticiper, par manque d'habitude, par manque de cette *perception* particulière dont tu n'es pas dotée parce que disposant de facultés qui t'en dispensent. Je ne crois pas que la personne handicapée doive être misr plus à part qu'elle n'est déjà en nous surculpabilisant pour nos oublis ou notre *handicap face au handicap*.<br /> <br /> Merci pour cet éclairage :o)
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A
"Un peu du quotidien de cette blogueuse mal voyante".<br /> <br /> J'ai partagé un peu du quotidien d'un blogueur "prince roulant" moi debout sur mes jambes, lui assis dans son "carrosse" électrique.<br /> Toute une vie organisée pour faire le moindre effort, pour éviter les gestes inutiles. Et les gens debout qui encombrent, qui encombrent, qui veulent trop bien faire.<br /> Il m'a dit qu'avec moi ça allait. Juste une fois j'ai oublié de remettre une chaise à sa place, une chaise qui l'a gêné. J'étais confuse.
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P
Bah... y'a pas forcément à commenter, Alainx ;o)<br /> <br /> De toutes façons relater quelque chose de ce genre est surtout destiné à transmettre des impressions, à incarner quelque peu l'abstraction, à "garder trace"...
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A
Pour une veille de 14 juillet, ce texte est un feu d'artifice d'impressions diversifiées, de registres de vie différenciés, qu'il est difficile de commenter, sans faire aussi long que toi !! *sourire*
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P
Camille, j'aimerais être beaucoup plus suggestif mais il semble que je reste un descriptif, un détailleur, un décortiqueur, un exhaustiviste ;o)<br /> <br /> Jane, il semble que ce soit un format duquel j'ai du mal à décrocher :o)
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J
y'en a quand même une looooooooongue page !!!
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C
.....de *tout dire* pour dire beaucoup ;-)<br /> <br /> c'est pourquoi j'aime ce billet-là<br /> bonne soirée, pierre :-)
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