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Alter et ego (Carnet)
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29 juin 2013

Le parfum des envies

Quand j'entends une personne dire "je dois..." ou "il faut que...", je pense immédiatement à son envie. Si je m'y sens autorisé il m'arrive alors de lui suggérer : et ton envie, où se situe t-elle là dedans ? De quoi as-tu envie, toi ?

En cela j'applique un réflexe tardivement développé : écouter mes envies. Éduqué bien davantage sous le signe des devoirs que celui des envies, j'ai été peu sensibilisé à cette écoute. Soumis aux "fais ceci, ne fais pas ça...", j'ai d'abord appris à marcher droit. Cela pouvait évidemment se justifier, en matière de principes éducatifs de socialisation, mais il manquait un contrepoids dans le domaine de la liberté personnelle. Vous savez, cette confiance que des parents peuvent donner à leurs enfants en étant attentifs à ce qui émane d'eux. À leur décharge je dirais que mes parents ont fait selon ce qui leur paraissait être "le mieux" et en fonction de leur propre capacité à entendre leurs envies [et je n'ai pas forcément fait mieux avec mes enfants...].

Lorsque je suis sorti de la tutelle parentale les "il faut que..." se sont transformés en "tu devrais..." et "si j'étais à ta place...". Moins directifs mais tout autant incitatifs, ils m'ont été répétés jusqu'à ce que je me rebelle ouvertement contre cette persistance. C'est arrivé fort tardivement, vers l'âge de 30 ans, lorsque j'ai créé mon entreprise dans un domaine où mes parents n'avaient aucune compétence. Il m'avait fallu tout ce temps pour en venir à ne plus supporter les "conseils" un peu trop généreusement distribués. Ces injonctions inhibantes, plus ou moins habilement introduites, perturbaient ma réflexion en obérant systématiquement un épanouissement qui cherchait à éclore. Auparavant j'avais bien manifesté de diverses façons mon insoumission mais, faute d'avoir perçu l'origine exacte de ma révolte, c'était resté sans effet. 

 

Aujourd'hui je sais que je fonctionne à l'envie. C'est mon énergie, mon carburant, ma lumière, ma récompense, mon sourire, mon éclat. Avec elle j'avance, je pétille, je me donne, je m'investis, je me consacre, je m'ouvre. Sans elle je renacle, je traîne, je laisse passer, je procrastine, je stationne, je m'étiole.

L'envie me guide, m'oriente vers un chemin dont j'ignore la finalité mais dont je capte les fragrances. Comme une piste à flairer.

Les effluves de l'envie sont changeantes. Un parfum peut me plaire longtemps puis perdre de son attrait en se combinant avec des senteurs jusque-là inconnues mais plus attirantes. Plus proches de ce qu'intuitivement je cherche. J'infléchirai alors mon parcours, hésitant, humant dans l'air ce mystère qui fait vibrer mes sens. Tout cela est subtil. Le chemin n'est pas tracé. Il ne suit pas les panneaux indiquant les chemins les plus parcourus. Mes envies ne correspondent pas nécessairement à celles des autres. 

Je suis donc seul à pouvoir trouver ma piste, tout en restant attentif à ce que les autres disent de leur parcours. Surtout s'il est singulier et visiblement épanouissant, donc potentiellement attirant. Comment en parlent-ils ? qu'en ont-il compris ? qu'en font-ils ? J'ai forcément à apprendre des autres et de leurs expériences. Je les vois, les écoute, les observe et cela touche en moi quelque chose de sensible. Je ressens de quelle façon leur lumière intérieure se diffuse et si je peux en faire bon usage. D'une certaine façon les autres me transfèrent une part de leur énergie.

Mais ceux que je côtoie peuvent aussi absorber la mienne, si je n'y prends garde. En sabrant mes initiatives, en me demandant d'agir contre mes convictions, en critiquant mes choix, en attendant de moi que je donne quelque chose que je n'ai pas ou qui ne me convient pas. La menace existe principalement dans deux champs distincts : professionnel et relationnel. Dans le domaine professionnel les éléments sur lesquels j'appuie mon argumentaire, basés sur mes solides convictions, les alliances que je tisse, auxquels s'ajoute ma persévérance, devraient permettre que se mette en place ce en quoi je crois. Ce n'est qu'une question de temps. Il n'en va pas de même dans le champ relationnel, dont le face à face est finalement bien moins maîtrisable...

 

C'est pour doser mon énergie vitale que je tiens à rester libre, donc seul. J'ai encore besoin de me ressourcer longuement dans la solitude. Je le ressens comme une impérieuse nécessité. Mon équilibre en dépend. Mais une telle exigence a une contrepartie : elle restreint l'accès à certains plaisirs dont j'ai connu l'infinie douceur. Je ne bénéficie plus du précaire privilège que constitue la sensation d'être "en couple", avec tout ce que cette notion ajoute à la perception des partages, quels qu'ils soient. Solitaire sur mon chemin je peux bien sûr partager dans de multiples dimensions, échanger librement au gré des rencontres, vivre mes envies... mais il me manque probablement quelque chose d'indéfinissable. Quelque chose qui aurait un lien avec l'idée de confiance. En moi et en l'autre. En voulant garantir ma liberté je garde le contrôle sur l'ajustement de la proximité mais, du même coup, me prive d'une forme d'abandon. Et peut-être de curiosité...

Mes envies sont mon énergie, mais quel parfum ont mes envies ?

 

 

IMGP5906-001

 

 

 

 

Commentaires
C
Elle arriva chez lui <br /> <br /> avec deux grandes valises<br /> <br /> remplies de beaux cadeaux légers<br /> <br /> mais lourdes des espoirs pesants.<br /> <br /> À la fin, ces maudites valises,<br /> <br /> fermées pour de bon,<br /> <br /> furent complètement vidées<br /> <br /> de ses contenus,<br /> <br /> sauf pour <br /> <br /> un cœur fragile,<br /> <br /> irréparablement<br /> <br /> brisé en vol.
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S
Me suis mal exprimée c'est vrai.....je dis "seul" en opposition à "en couple" ..les 2 options phares qui nous sont généralement proposées dans le registre des étiquettes restrictives<br /> <br /> <br /> <br /> "poser ses valises" pour dire qu'au bout d'un moment (donnée variable et relative)... au fil des épreuves et expériences ..si on se débrouille pas trop comme un manche :)) si on a "envie".....on tend à s'alléger de quelques souffrances puis à envisager de "défaire ses valises" pour passer à autre chose ..<br /> <br /> ....un petit sac à dos rempli de plumes d'oie me va bien )
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S
je rajouterai qu'il ne s'agit pas de cadrer ou /et de correspondre à des schémas quels qu'ils soient ni m^me de se fier à une majorité bien pensante ....peu importe ...l'important est d'être ok avec soi-m^me que l'on soit seul ou en couple ...peu importe ...de faire ce qui est "bon" pour soi et d'acquérir une auto-bienveillance ...de m^me que seul ou en couple ...là où ça pique ..là où l'on se ferme comme une huitre ...c'est là qu'il faut s'interroger sans relâche et laisser passer la lumière<br /> <br /> <br /> <br /> je n'ai pas de mode d'emploi à distribuer mais je dirais que quand on atteint une certaine "fluidité" existentielle .....on peut commencer à poser les valises :)<br /> <br /> <br /> <br /> - puis je rajouterai.....que j'aime bien tes photos
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S
certes ...rêver à l'amour quand on est seul c'est pas drôle....:( bouh :(<br /> <br /> mais rêver à l'amour quand on est en couple... c'est encore moins drôle<br /> <br /> et théoriquement ça s'appelle un cauchemar :))<br /> <br /> <br /> <br /> être adulte commence aussi par assumer pleinement ses envies ...ds ts les sens du terme<br /> <br /> sinon ça s'appelle : "jouer à cache-cache"<br /> <br /> <br /> <br /> en sachant que les parties de cache-cache ne s'éternisent jamais longtemps ...bah nan ! nan nan ...<br /> <br /> <br /> <br /> allez soyons fous .....ayons confiance ! et gardons en nos coeurs que ce qui nous arrive est la plupart du temps bon pour nous..à plus ou moins longue échéance ...<br /> <br /> <br /> <br /> et comme disait mon père quand il traversait une épreuve :<br /> <br /> "c'est un mal pour mon bien "
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C
Je me dis parfois que c'est peut-être une question de rencontres : un jour, malgré toute la satisfaction ressentie dans la solitude, il peut arriver qu'on ait envie de passer du temps avec une personne. Tout comme ceux qui vivent à deux ne parviennent pas à s'imaginer seuls, ou le redoutent, les célibataires peuvent découvrir que ce n'est finalement pas si difficile d'être "accompagné".<br /> <br /> <br /> <br /> Bah oui... on l'a déjà vécu, ce n'est donc pas impossible ;)
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E
Le célibat accompagné comme tu dis...c'est tout à fait ce que vivent les jeunes qui ne se sentent pas prêts à une vie à deux. <br /> <br /> Vivant seule depuis si longtemps, je doute beaucoup de ma capacité à vivre à deux. Rien que l'idée que l'autre est présent, à côté tous les jours...je finirai par être tentée d'aménager une pièce de vie dont moi seule y aies accès et aussi durablement que je le voudrai, mon petit monde dans ma solitude...vi-scérale :)
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C
Le célibat est rarement un choix volontaire, je veux dire par là que les personnes qui vivent seules que j'ai rencontrées, même si elles le disent haut et fort, subissent plutôt ce choix de vie. Inconsciemment ou pas. De peur d'être mal accompagnées, de peur de perdre une certaine liberté et de rendre des "comptes", de peur d'être déçues par l'autre ou soi. Je pense que nous somme faits pour les interactions, vivre en compagnie de...seulement les expériences passées nous rendent parfois méfiants, prudents, protecteurs excessivement. Cela nécessite une petite dose d'adaptation, de compromis qu'il n'est pas toujours facile de mettre en place soi même. En quelque sorte, il faut faire un peu de place pour accueillir et ouvrir son coeur. Pas toujours aisé. En fait, c'est surtout la peur de nous même qui nous entraîne dans une protection de l'autre. Et puis, trouver la "bonne" personne à l'ère de la communication numérique à tout va n'est pas évidente. A vingt ans, nous sommes prêts à toutes les expériences, à trente ans on veut bâtir pour la plupart et ensuite, et bien, l'idée de couple, d'envies, de besoins personnels se précisent et ça se complique. le chemin vers soi n'est pas forcément compatible avec le chemin qui mène aux autres ou plus précisément à un autre. Cet autre différent qui nous bousculera forcément un peu parce que nous sommes fait d'émotions, d'expériences antérieures, de principes, de valeurs et de choix de vie, de capacités à comprendre ou à accepter différents.<br /> <br /> Mon avis est que vivre seul n'est pas si épanouissant que cela, mais a-t-on vraiment le choix réellement? Choisir entre la peste et le choléra, je choisis la peste (solitude) mais incontestablement, mon premier choix sera l'amour à deux! s'il faut rêver...;)
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Z
Oh que oui: l'envie du célibat en guise de protection, est-ce une véritable envie ou le choix entre la peste et le choléra ? Il est vrai que j'ai très bien vécu cette période dorée du célibat par choix, mais dès que je me suis à nouveau laissée tenter par la relation que je croyais "de confiance" (donc d'amour), je me suis à nouveau brûlée les ailes, et comme Icare, la chute fut rude, mais elle ne m'a pas encore tuée. Je me relève doucement, en boitant, me demandant si je persiste dans l'envie de refaire confiance (ce que je préfère), ou le choix délibéré et frustrant de revivre dans la solitude que j'ai, pourtant, appréciée durant un bon moment...<br /> <br /> Alors, envie, choix, prudence, confiance, nos envies ne sont pas toujours satisfaisantes, et n'arrivent pas toujours à nous rendre heureux comme nous l'espérions.
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C
Un bien beau message dans lequel je me retrouve.<br /> <br /> J'ai besoin de solitude, de silence pour me retrouver, pour me ré-énergiser, pour ne pas sortir du chemin...
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C
"Aujourd'hui je sais que je fonctionne à l'envie. C'est mon énergie, mon carburant, ma lumière, ma récompense, mon sourire, mon éclat. Avec elle j'avance, je pétille, je me donne, je m'investis, je me consacre, je m'ouvre. Sans elle je renacle, je traîne, je laisse passer, je procrastine, je stationne, je m'étiole."<br /> <br /> Ce paragraphe est extraordinaire! Comme tout ton billet, d'ailleurs, qui exprime si bien la nécessité vitale de vivre sa vie comme on l'entend, sans se soucier du "qu'en dira-t-on". Mais écouter vraiment ses désirs n'est pas si facile. Cela demande une véritable introspection, une investigation parfois douloureuse. On a du mal à faire le tri des émotions. On se laisse berner par des éléments parasites qui peuvent troubler notre réflexion. On se met des barrières. Dans la prison qu'on se construit, on est souvent son propre geôlier, car rien, en vérité, ne nous oblige a supporter certaines choses que l'on s'impose, davantage par habitude ou par fatalisme que par réelle nécessité. <br /> <br /> Le paragraphe sur l'éducation a coup de "il faut" et " il ne faut pas" m'interpelle évidemment. Car en tant que professionnelle de l'éducation ( même si ma spécialité reste quand même l'enseignement il ne faudrait pas l'oublier) je suis obligée de brandir des interdits toute la journée, pour le bien de tous. Le règlement de l'école est quelque chose d'incontournable, au même titre que le code de la route. Alors brime-t-on les envies des enfants en les obligeant a de comporter en citoyens respectueux des lois? Je pense que non, évidemment, tout l'enjeu réside alors à former le jugement des chères têtes blondes pour qu'elles soient capables un jour de faire le tri entre les règles imposées de façon inique, et celles qui contribuent au bien-être général. <br /> <br /> Ensuite, que des parents abusent de leur rôle en continuant à "téléguider " leur progéniture jusqu'à trente ans, cela se voit encore trop souvent, et c'est regrettable. Quant aux " bons amis" qui se mêlent de prendre le contrôle de notre vie en se prenant pour des gourous, je les fuis comme la peste. Car comme le dit Myosotis dans son excellent billet, en fait ne nous leurrons pas: dans la vie, on est toujours seul à prendre ses décisions...même en couple.<br /> <br /> http://tatinic.typepad.fr/myosottises/2013/06/seul.html
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