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Alter et ego (Carnet)
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15 décembre 2017

Même pas peur

Ami·e lectrice et lecteur,

À toi qui me lis avec fidélité je veux faire part d'une évolution concernant ce blog. Mes sujets de prédilection évoluent et varient selon mes lubies du moment, ça, tu t'en es forcément aperçu. Les échos de lecteurs fluctuent en conséquence et c'est bien normal. Mais tu ne t'es peut-être pas rendu compte qu'une partie des échanges qui ont suivi mes deux précédents billets m'a quelque peu déconcerté. J'ai perçu un clivage, avec l'impression de "forcer" quelque chose. En mon for intérieur une réflexion quant à l'orientation de mes écrits ici, flottante depuis plusieurs mois, s'est alors ravivée. En fait, je te l'avoue, j'ai constaté de longue date qu'aborder certains sujets pouvait susciter du trouble. En soi ce n'est pas un problème, sauf que cela m'est de plus en plus inconfortable. Mes derniers billets ont confirmé ce que je pressentais. Désormais je suis convaincu de devoir changer quelque chose dans ma pratique si je veux préserver mon équilibre.

Oh, la grande affaire, pourrais-tu penser !

Laisse-moi te raconter. 

Il y a quelques années je partageais sur ce blog le cheminement de mes réflexions autour de... l'amour et des variations qui peuvent s'y rattacher. Rien de scabreux, je te rassure ! Et bien figure-toi que mes prises de position ont parfois heurté des convictions, notamment quand il était question de non-exclusivité amoureuse et de sexualité. Il en a résulté des échanges parfois tendus, assortis de quelques jugements dont je suis sorti meurtri. Des rapports de confiance en ont été endommagés. Comprenant alors que le lieu ne s'y prétait pas, j'ai progressivement cessé d'aborder ce thème.

Aujourd'hui, dans un tout autre genre, je constate qu'évoquer ma perception du devenir de l'humanité peut aussi toucher des sensibilités profondes. Au vu de l'enjeu, je peux fort bien le comprendre. À nouveau j'en déduis que ce blog, qui se veut être espace d'échange amical, pacifique et bienveillant, n'est pas le lieu qui me convient pour en parler. En fait je devrais plutôt dire que je n'ai pas su trouver une façon satisfaisante de le faire. Je n'ai ni la légereté, ni l'humour qui pourraient atténuer la gravité sérieuse de mon propos. Ma démarche pourrait même être contre-productive, en rebutant une partie du lectorat ! Par conséquent, après mûre réflexion, j'ai pris la résolution de ne plus aborder ici cette thématique sous son angle le plus effrayant. Depuis quelques temps je m'y préparais et cet épisode m'a permis de franchir le pas.

Il n'en demeure pas moins que le sujet s'est largement installé dans mes pensées et que je me sens généralement plus inspiré pour parler de ce qui me préoccupe que de ce qui, dans mon existence ou dans le monde, relève de l'ordinaire. C'est peut-être dommage mais, pour le moment, c'est ainsi. Il se pourrait donc que je ne me manifeste guère pendant quelques temps. N'en sois pas inquiet·e, ami·e lectrice et lecteur :)

 

__________

 

Ça, c'était pour la version courte.
Je ne l'ai pas publiée illico, le 27 novembre, jour de sa rédaction. 

Je ne me voyais pas en rester là. Tu me connais : il n'est pas dans mes habitudes d'éviter la réflexion, l'analyse et l'introspection. J'ai donc tenté de décrire ce qui s'était passé en moi pour que j'en arrive à prendre une telle décision, qui n'est autre que fermeture et auto-censure. Avec un peu de recul et grâce à quelques solides discussions, passé le temps de la perplexité et du doute, j'ai remis en question quelques unes de mes idées en termes de communication. Une prise de conscience nouvelle a émergé et m'a travaillé. J'ai réfléchi...

Et là, quand j'ai entrepris de rédiger la suite... j'ai constaté combien il m'était difficile d'ordonnner mes idées et de mettre en mots ce qui me traversait. Beaucoup de pistes entrecroisées se sont ouvertes, sans que je sache lesquelles convergeaient ou divergeaient. Qui cherchais-je à protéger : moi ou autrui ? Un vrai sac de noeuds !

Démêlons.

 

En recherche de convergence

Tout est parti d'un sujet que j'occultais depuis quelques mois et sur lequel j'aurais pu éviter de revenir. Connaissant le potentiel anxiogène dont il est porteur, je prenais des risques non négligeables ! En fait je me suis simplement laissé aller, une nouvelle fois, et sans bien y réfléchir, à tenter de trouver une résonance dont je pense avoir besoin. Je le sais maintenant, j'ai besoin d'exprimer ce qui me trouble et m'inquiète. Dire mes craintes pour les désamorcer, les relativiser, les apprivoiser. J'ai besoin de regarder en face ce que les données dont je dispose provoquent en moi comme émotions afin d'en diminuer la charge. Et puis sans doute ai-je besoin de sentir que d'autres les ressentent aussi (à plusieurs on se sent moins seul).

Sauf que je ne peux veux pas m'exprimer sans prendre de précautions. Ni ici, ni ailleurs.
J'ai donc fini par comprendre que je ne peux pas afficher
mes peurs sans me soucier des éventuelles conséquences sur celui qui les reçoit. C'est une leçon de vie, qui va finalement bien au delà de ce que j'évoque ici. Imposer à l'autre d'être confronté à ce qu'il ne souhaite pas voir/entendre est une forme de... violence.

Voila qui me pose un léger problème !

Alors que j'apprécie - et recherche - le débat d'idées, je n'aime pas heurter les convictions des personnes qui me font le plaisir de me lire et de commenter - ou de discuter avec moi. Mais je n'aime pas non plus voir minimisé ce qui revêt une grande importance à mes yeux. Or, je le constate, certains sujets "dérangeants" - en ce sens qu'ils touchent à des valeurs et croyances intimes - peuvent venir bousculer chacun dans ces domaines sensibles, voire mettre en évidence des divergences fortes.

Certes, on pourrait me rétorquer que ce n'est pas bien grave, que chacun est adulte et responsable, donc capable de lire - écouter - et faire le tri. Et puis qu'ici c'est mon espace d'expression et qu'il est important que je m'y sente libre. C'est exact... mais cela ne me suffit pas quand il s'agit de personnes avec qui s'est établi un rapport de confiance, de proximité, ou envers qui j'ai considération et respect.

Car ce blog est un lieu particulier, sans réel équivalent dans la "vraie vie". Alors que dans cette dernière je suis habituellement extrêmement discret, ici j'ai tendance à déposer assez librement ce qui m'émeut. Que ce soit ce qui me plaît ou me déplaît, me révolte, m'attriste, me met en joie, me touche. Pas tout, bien sûr. Seulement ce qui dépasse un peu trop. Je relate aussi ce qui me pose question ou me turlupine, me fait douter. Dans ce cas, partager me permet de donner du sens, de comprendre, de prendre conscience, de franchir des pas, d'aller plus loin. Et pour cela le retour de lecteurs m'est utile, en plus d'être un réel plaisir. Il me permet d'avancer... mais aussi d'entretenir du lien social, et même affectif. Ce lien distant est important pour le solitaire-social que je suis. Aussi est-il indispensable que je fasse en sorte que se maintiennent des conditions favorables afin que chacun se sente suffisamment à l'aise pour entretenir le fragile équilibre du donner-reçevoir. Faire en sorte qu'un rapport de confiance demeure.

En moi cet équilibre a parfois été assez délicat à maintenir. D'ailleurs à certaines périodes il s'est rompu et j'ai vacillé. À la suite de quoi je me suis temporairement tû, ou ai abandonné certains thèmes sensibles, comme mentionné plus haut. Je veille donc à ne pas me retrouver en position inconfortable :)

Voila pourquoi je prends garde à ne pas trop bousculer mon lectorat.

 

Les limites du consensuel

D'un autre côté, si je devais me limiter au consensuel, l'écriture perdrait l'interêt que je lui accorde. Dilemme, donc. Jusqu'où rester "vrai" ? Une limite m'est peut-être indiquée lorsque je me sens en difficulté, hésitant sur la suite à donner...

Je crois que c'est ce qui s'est passé avec l'expression de mes légitimes craintes face à l'avenir de nos conditions d'existence.

Inquiétude, crainte, peur, angoisse... l'échelle des gradations varie mais elles s'inscrivent dans le registre de la peur, plus ou moins consciente et maîtrisable. La peur fait partie des émotions fondamentales (avec la joie, la tristesse, la colère...). Or une émotion est un jaillissement spontané sur lequel la raison n'a pas directement prise. Une émotion doit d'abord être conscientisée, voire être exprimée et entendue, avant que la raison puisse éventuellement retrouver un potentiel d'action. J'ai donc, comme tout un chacun, besoin d'extérioriser mes inquiétudes lorsqu'elles dépassent ma capacité à y faire face sereinement. Sauf que beaucoup d'émotions ont la particularité d'être "contagieuses" et la peur, puisqu'il s'agit principalement d'elle ici [mais la tristesse aussi], n'y échappe pas. Dire ma peur c'est donc prendre le risque de "stimuler" des peurs plus ou moins semblables ou opposées chez autrui. Par conséquent le risque existe de réveiller inopinément chez l'autre des peurs profondément enfouies ou volontairement occultées.

Problème, là encore.

D'abord parce que je ne veux "forcer" personne à regarder en face ce qui est évité ; ensuite parce que les réactions protectrices qui contrent ces peurs mettent en évidence un net clivage. D'un côté - en caricaturant - il y aurait le choix d'une attitude s'assimilant à un « je préfère regarder ailleurs » (ou « je sais mais ne veux pas voir », ou encore « je préfère regarder les jolies choses ») afin de rester optimiste ; de l'autre celui d'un pragmatisme qui se veut "réaliste et lucide"... mais assurément moins optimiste. Voire carrément déprimant ! Rien de vraiment rédhibitoire entre les deux approches... et pourtant un décalage certain. L'axe de vision est différent et je ne crois pas que le choix de ce dernier tienne du hasard. Je pense que celui-ci répond à une nécessité intérieure, donc à un besoin profond qui n'est pas nécessairement choisi consciemment. Dans le contexte planétaire dont il est question, parce qu'il est grave, mon choix est d'être lucide. Alors que la plupart du temps, pour tout le reste, je fais celui de l'optimisme !

Face à notre avenir commun je suis donc moi-même clivé, entre une insouciance naturelle et la préconscience de ce qui pourrait advenir. J'entrevois une conjonction de menaces multiples et sérieuses dont la liste s'allonge sans cesse, suscitant autant de raisons objectives d'être inquiet. Bien plus de raisons que ce que j'imaginais initialement, en fait. La connaissance accroît ma conscience, qui conforte mes craintes, me poussant à m'informer davantage... et mesurer l'étroitesse des issues de secours.

Or je suis ainsi fait que j'ai besoin d'aller au contact de la peur afin de la rendre tangible. Et peut-être même, tout spécialement, d'expérimenter cette émotion que je connais mal parce que je ne suis habituellement pas un angoissé, que ma tendance naturelle est à l'insouciance, plutôt portée à l'optimisme. J'aurais donc besoin d'approcher la peur, et même la prendre à bras le corps, pour me mettre en marche dans l'affaire qui nous concerne... tant qu'il est encore temps. J'ai donc besoin que mes craintes ne soit pas atténuées, qu'on ne tente pas de les raisonner pour tenter de les réduire. Quitte à me rendre compte tout seul qu'elles sont exagérées ou que des solutions existent pour que ce qui les suscite n'advienne pas.

D'une certaine façon, tout cela confirme que je ne peux évoquer mes craintes qu'avec ceux qui les partagent. Je n'ai pas à "envahir" l'espace vital de qui n'est pas prêt à m'entendre.

 

À l'écoute des émotions

En rédigeant - laborieusement - ce texte analytico-explicatif il m'est revenu à l'esprit un souvenir, sans doute déterminant, dont je ne suis pas fier : un jour qu'une amie me parlait de ses peurs face à notre monde brutal et cynique, qu'elle voulait voir avec la plus crue lucidité possible, je n'ai pas su l'écouter ni la comprendre. Tandis qu'elle tentait d'énumérer les calamités et injustices qui la bouleversaient, je lui ai opposé mon désir d'optimisme, insistant sur le regard positif que je voulais avoir sur le monde, lui reprochant de se focaliser sur la noirceur. Ce jour-là, implicitement, j'ai été dans la négation de ses peurs et de ses émotions. Il en a résulté, de sa part, une réaction violente, à la hauteur du sentiment d'incompréhension ressenti. La confiance était atteinte. À tel point qu'elle n'a plus voulu m'adresser la parole durant des mois.

Je garde donc, outre l'amertume, le souvenir pénible et gênant de n'avoir pas su entendre une émotion qui avait besoin de l'être. D'avoir privilégié ma façon de voir les choses, considérant qu'elle était "meilleure" (!!) parce que tournée vers une vision heureuse de l'existence. Grande leçon d'humilité dont je n'ai compris le sens que bien plus tard. Et en l'occurrence bien trop tard...

Voilà pourquoi je ne souhaite plus évoquer ici ce qui pourrait générer des oppositions fondamentales :)

Mais comme j'ai quand même besoin d'en parler, je me résouds à fragmenter mes lieux d'expression. Ce sera ailleurs. Tout comme je compartimente dans la vie réelle : je ne parle pas de tout ce qui me préoccupe avec mon entourage.

 

 J'adresse mes remerciements aux quelques personnes qui, de près ou de loin, m'ont permis d'entreprendre cette nécessaire et salutaire réflexion

 

 

Commentaires
D
Bonjour Pierre. Je ne viens pas depuis très longtemps ici. Alors je ne peux pas juger tous les articles que tu as publiés depuis des années. Ce que je peux dire concernant ce billet-ci. Je crois que dans une société démocratique, chaque être humain a le droit d'exprimer quelque chose. On appelle cela la liberté d'expression. Et je trouve que c'est quelque chose de précieux dans nos sociétés. Nos blogs sont le résultats de cela. Chacun écrit ce qui lui tient à coeur, montre les photos qu'il aime, tout cela dans un souci de partage. Si on doit commencer à se censurer pour faire plaisir à un certain lectorat, pour moi c'est la liberté d'expression qui en prend un coup. Et c'est bien dommage. <br /> <br /> <br /> <br /> Tu as exprimé des choses ici qui m'ont fait réfléchir, qui m'ont remuée c'est vrai mais ce n'est pas pour cela que je ne viendrai plus te rendre visite. Je trouve important que chacun puisse exprimer ce qu'il pense en toute intelligence. Et chacun est libre de lire ou pas. De commenter ou pas. Alors non, pas de censure, pas de politiquement correct pour ne pas heurter. Seulement toujours l'intelligence, le respect, dans une grande intelligence de coeur afin que chacun y trouve son compte et puisse échanger sans peur. <br /> <br /> <br /> <br /> Voilà ma petite réflexion. Sur ces bonnes paroles ou ces bons "écrits", je te souhaite une très belle journée et merci pour ce partage dense mais nécessaire.
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C
et bien je te dirai bien franchement, que les sujets que tu abordes avec maints détails à l'appui m'ont effrayée<br /> <br /> Je me suis dit que cela suffisait que je ne viendrais plus te lire...<br /> <br /> Mais je reviens toujours quand je vois que tu as écrit un nouveau billet: je ne veux pas m'éloigner d'un des plus anciens blogueurs, de ceux que j'ai connus tout au début de cette aventure...<br /> <br /> Ma lutte aujourd'hui est très personnelle hélas: j'ai besoin de garder toutes mes forces pour l'affronter et en sortir: elle concerne ma santé comme tu le sais sans doute... raison pour laquelle je ne veux pas "m'encombrer" (m'effrayer surtout) des problèmes dont tu parles... j'en sais le minimum, je ne veux pas en savoir plus; Je ne veux pas en savoir jusqu'à en souffrir. Je suis devenue hyper sensible!<br /> <br /> L'attitude de l'autruche? oui sans doute. mais je ne PEUX pas faire plus<br /> <br /> Quand les nuages de ma santé déficiente s'éloigneront, je pourrai peut-être m'en préoccuper davantage<br /> <br /> Bonne chance à toi
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L
J'ai relu ton texte avec attention, ainsi que les commentaires et tes réponses. Je vais essayer de ne pas paraphraser (pas si facile, parce que je me retrouve un peu ici et là). <br /> <br /> <br /> <br /> Je pense à La Peste, de Camus. Le combat que mène les hommes contre le mal. Combat absurde, sans espoir, auxquels ils ne renoncent pourtant pas, et c'est ce qui les rend admirables, ce qui fait leur grandeur, "leur force et leur innocence". La peste peut avoir tous les visages, celui des extrêmes (de droite ou de gauche), le terrorisme, l'effondrement de la civilisation industrielle... Sans doute convient-il de se battre, même si le combat est perdu d'avance. Dans n'importe quel domaine, il n'y aura jamais de victoire définitive, nous dit Camus. Et doivent veiller et se battre, jusqu'à l'absurde, inlassablement "tous les hommes qui, ne pouvant être des saints et refusant d'admettre les fléaux, s'efforcent cependant d'être des médecins."<br /> <br /> <br /> <br /> Sois donc "médecin", ici ou dans un autre espace, mais reste toi-même, avec tes doutes, tes certitudes, tes craintes, tes déchirements, ton désir de les partager, même si ce partage n'est pas toujours reçu comme tu l'espérais. C'est l'action qui importe, du moins c'est ce qu'il me semble, et quand il s'agit de parole, de diffusion de la parole, le virtuel ne l'est pas tant que ça, les récents événements nous l'ont amplement démontré.<br /> <br /> <br /> <br /> Nous nous connaissons peu, toi et moi, et surtout depuis peu. Nous nous exprimons différemment et nos phrases ont des reflets très dissemblables. Pourtant je crois que sur bien des points nous nous rejoignons. Je montre plus souvent la lumière et toi l'ombre, mais nos désirs et notre volonté sont les mêmes, seul le chemin diffère. Et, comme toutes celles qui m'ont précédée ici dans les commentaires, ton chemin m'interpelle, me fait réfléchir autrement. C'est précieux.<br /> <br /> <br /> <br /> Evidemment, la lecture de ton dernier paragraphe m'amène à remettre en question ma propre façon de recevoir tes messages. J'ai sans doute, pour ma part, un peu facilement "pirouetté", en brandissant ma vision positive comme une solution à tout. Crois-moi, je sais "que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu'il peut rester pendant des dizaines d'années endormi dans les meubles et le linge, qu'il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses, et que, peut-être, le jour viendrait où, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrait mourir dans une cité heureuse."<br /> <br /> Désenchantée, je ne fuis pas. Je sais que toi non plus.<br /> <br /> <br /> <br /> Je t'embrasse.
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C
Ah, Ju'Lyn, tu mets bien en évidence le délicat problème de la responsabilité dans la transmission de la peur. Mon souhait est d'informer... et en même temps je me rends compte que cela peut effrayer ! Dilemme...<br /> <br /> <br /> <br /> Faut-il dire ? Faut-il ne rien forcer ? Puis-je ne pas dire ce dont je suis informé et qui me semble bien plus grave que ce dont "les gens" (la majorité) semblent avoir conscience ? Je ne sais pas... <br /> <br /> <br /> <br /> Vraiment je me suis posé beaucoup de questions autour de tout ça. <br /> <br /> <br /> <br /> C'est vrai, pour moi-même c'est le terme "peur" qui a fini par s'imposer, alors que je lui préfère celui de "craintes", un peu moins effrayant. Pour autant j'ai quelques réticences à parler de peur parce que, comme le rappelait Célestine, la peur suscite des réactions immédiates (fuite, action, immobilisme) alors que la mienne s'étire dans le temps long.<br /> <br /> <br /> <br /> Je suis tout à fait d'accord avec toi quand tu dis que mettre un sens sur une émotion c'est apprendre à composer avec elle. On pourrait aussi dire que c'est l'apprivoiser.<br /> <br /> <br /> <br /> Oui, le rapport aux lecteurs peut être assez complexe. Il l'est parfois pour moi, c'est certain, et ce depuis l'origine. Malgré cela je continue :)<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce dont tu témoignes, en particulier sur cette PEUUUUUR qui t'a parcourue :)
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J
Bonjour Pierre,<br /> <br /> <br /> <br /> Pour ma part, je n'ai pas la même capacité de réflexion, mais en ce qui concerne tes derniers articles... <br /> <br /> Oui j'ai eu PEUUUUUUUUUUR ! <br /> <br /> Je te l'ai dis, je l'ai ressenti et pourtant... Je ne te dirai jamais que tu as dépassé les limites. <br /> <br /> Je plussois calamityjane et kéa, si j'en viens à te lire et si je suis fidèle à tes écrits, c'est bien parce que quelque part, cela fait écho en moi... <br /> <br /> <br /> <br /> Je suis une personne de nature angoissée, anxieuse, ou du moins je l'étais... Ton article sur les collapsologues, m'a retourné le bide... et pourtant, tu m'as ouvert une porte que je ne connaissais pas... Certes, elle est flippante, mais en même temps, je crois en l'humanité. <br /> <br /> <br /> <br /> Je ne suis pas sûre de voir les choses comme tu les vois, et n'ai pas non plus l'impression de faire l'autruche pour avoir moins peur... Juste parce que je reste persuadée que quoiqu'il arrive, l'élan du coeur me semble toujours plus fort... <br /> <br /> <br /> <br /> Je comprends également ce que tu exprimes, ici dans ton article. Et pour te dire, je ne ressentais pas forcément de la peur chez toi, bien que tu veuilles la prendre dans tes bras. Parce que justement, tu tentes de lui donner du sens, tu mets des mots dessus. Cette peur ne me paraissait donc pas, à la lecture de tes articles si brute... car de son jaillissement tu tentes déjà d'y mettre un sens... <br /> <br /> <br /> <br /> Mettre un sens au jaillissement d'une émotion, c'est aussi apprendre à composer avec elle n'est-il pas ? <br /> <br /> <br /> <br /> C'est certainement ce que j'apprécie dans ton écriture... <br /> <br /> <br /> <br /> Nous avons toutes et tous une façon d'accueillir ou de nous projeter dans tes articles, peut-être que tu n'y trouves pas forcément ce que tu recherches en terme d'équilibre, et même si j'apprécie chaque article de réflexion que tu nous offres, ce qui compte avant tout c'est que tu puisses y trouver ton équilibre... <br /> <br /> <br /> <br /> C'est un rapport assez complexe que nous pouvons entretenir avec nos lecteurs... Ecrivons-nous pour nous ou écrivons nous pour nos lecteurs ? <br /> <br /> Mais si j'écris pour moi mais que cela choque mon lecteur, puis-je me permettre de continuer de le faire ? <br /> <br /> Ecrivons-nous pour être entendu.e ? ou le faisons-nous pour que le lecteur se projette avec son histoire ? <br /> <br /> Il est vrai que cet équilibre-là n'est pas toujours évident à trouver.<br /> <br /> <br /> <br /> Néanmoins, merci. <br /> <br /> <br /> <br /> Ju'
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C
Ton « billet court » du 27 novembre met en relief une de tes constantes : le fait de tenir compte des avis de tes lecteurs, au risque de te sentir blessé par moment, et déjà, rien que cela me parle énormément. Parce que, comme tu le sais, j’ai un parcours assez semblable vis-à-vis de mon lectorat. Une sensibilité au-dessus de la moyenne qui m’a bien souvent joué des tours. Cependant, je crois qu’il est possible de trouver des ajustements entre « arrêter complètement un sujet » et « persévérer dans une forme de discours et de dialogue non satisfaisante »<br /> <br /> Et en cela, le billet d’aujourd’hui est en effet un ajustement de ta pratique.<br /> <br /> Autocensure et fermeture, par leur côté expéditif et/ou définitif, ne sont pas forcément les façons les plus judicieuses de traiter un problème. Tu as donc bien fait de chercher à démêler le «sac de nœuds »<br /> <br /> Ce qui me vient à l’esprit, en lisant le paragraphe « recherche de convergence » c’est qu’en exposant tes peurs très légitimes, tu n’as jamais clairement exprimé ce besoin de te trouver moins seul.<br /> <br /> J’ai pourtant pensé, à chaque fois que je t’ai répondu, que le meilleur à faire devant quelqu’un qui exprime de la peur, c’est de le rassurer en lui montrant les possibles pistes aptes à désactiver cette peur, ou du moins à la resituer dans un contexte. L’action (même infime, même de « colibri ») me semblait être une réponse à la paralysie de la peur. Selon le principe exposé clairement dans « mon oncle d’Amérique » selon lequel un être soumis à un stress n’a que trois façons de réagir : la fuite, la lutte ou la paralysie. Cette troisième solution étant vraiment la dernière à envisager quand fuir et se battre ne sont plus possible.<br /> <br /> Bon je sais bien que nous ne sommes pas des rats de labo (quoique) mais ces principes d’éthologie sont toujours valables.<br /> <br /> Je comprends donc ton souci de ne pas heurter les lecteurs avec qui tu as établi une relation de confiance. Mais je ne puis que te répondre ce que tu supposes que nous te répondrons : «chacun est adulte et responsable, donc capable de lire - écouter - et faire le tri. Et puis qu'ici c'est ton espace d'expression et qu'il est important que tu t’y sentes libre.»<br /> <br /> Et puisque tu en es à parler de confiance et de partage, cela fait résonner en moi mes propres comportements qui n’ont pas toujours été adultes et trop « à fleur de peau » et en ce sens, tes réactions peuvent être induites par les réactions trop impulsives ou émotives de certain(e)s. Je m’inclus dans le lot. J’ai trop souvent réagi d’une façon qui, je le réalise aujourd’hui, ne pouvait que te mettre mal à l’aise, te bousculer et même te faire vaciller. Et c’est vrai que c’est inconfortable.<br /> <br /> C’est d’ailleurs ce que ton paragraphe « les limites du consensuel » développe fort bien. Nous sommes des êtres de chair et de sang (tu parles même du « sang qui irrigue ce blog » nous réagissons sur des sujets qui tiennent à la vie, à la mort, et l’émotion prime.<br /> <br /> Mais il importe que tu gardes ta ligne de conduite, celle de ce blog qui est avant tout un espace de réflexion. Ligne qui est de ne pas laisser l’émotion primer et d’utiliser la raison pour analyser, étudier, comparer, de manière rationnelle (si j’ose dire) les problèmes qui touchent à l’humain et qui concernent chacun.<br /> <br /> Jusqu’où rester vrai, demandes-tu ? Je répondrais d’une boutade : jusqu’au bout. En exprimant ce que tu as envie d’exprimer, tout en acceptant que cela allume en d’autres des choses qui les fasse réagir de manière inconfortable pour toi. Et sans t’inquiéter outre mesure : car personne n’est masochiste au point de supporter de revenir ici s’il n’y trouve rien d’intéressant ou si ça le fait souffrir. <br /> <br /> En poussant le raisonnement à l’absurde : si, pour ne pas blesser tes lecteurs et qu’ils ne partent pas ailleurs, tu gardes le silence, ils partiront quand même ailleurs puisqu’il n’y aura plus rien à lire… ;-)<br /> <br /> En ce qui concerne la fin de ton exposé, deux choses m’interpellent. D’abord ta peur pour l’avenir de l’humanité : crois-tu que parce que l’on ne l’exprime pas, on en soit exempt ? Crois-tu que les gens qui viennent ici, attirés par ta façon bien personnelle et riche de parler de ce sujet extrêmement crucial, ne soient pas conscients que ce monde court à la catastrophe ? Personnellement la peur de l’embrasement géopolitique aurait tendance à me faire encore plus peur que le réchauffement climatique, peut-être parce que l’on a de nombreux exemples de ce que la folie humaine entraîne au niveau des guerres, des dictatures, des populations otages…mais pas d’exemple encore de ce que cette folie est en train de préparer au niveau écologique.<br /> <br /> Alors oui, j’ai extrêmement peur, pour moi, pour les gens que j’aime, peur d’un retour à des temps obscurs, peur en tant que femme, peur de vieillir et d’être obligée de vivre dans la rue, peur d’avoir faim, d’avoir froid, d’être coupée des miens, d’une dictature islamique ou autre, peur de ne plus pouvoir me soigner, de ne plus pouvoir communiquer, de perdre ma maison, mes souvenirs, les objets auxquels je tiens…<br /> <br /> La peur est tangible quand on y va au contact, c’est certain. J’arrête parce que je commence à trembler comme une feuille de toutes ces projections mentales.<br /> <br /> Je terminerai ce commentaire-fleuve par la révélation que tu fais tout à la fin : je me suis vue nettement à ta place et je crains d’avoir fait comme toi avec cette amie dont tu parles : d’avoir « minimisé ce que tu ressens », de n’avoir pas su « ni t’écouter ni te comprendre » d’avoir été implicitement « dans la négation de tes peurs et de tes émotions »<br /> <br /> Et au final, d’avoir « atteint ta confiance » et de t’avoir amené à croire que ma façon de voir « était la meilleure » (loin de moi cette idée saugrenue pourtant !)<br /> <br /> De là à ce que tu ne veuilles plus « m'adresser la paroles pendant des mois »...lol<br /> <br /> Je prends donc la leçon d’humilité que tu as pris toi-même il y a quelques années. Et je te prie de me pardonner d’avoir contribué (dans une certaine mesure, car je n’ai pas la prétention d’être la seule) à ce malaise qui t'amène à l'analyse d'aujourd'hui.<br /> <br /> Je ne suis pas sûre, du coup d’être admise à fréquenter ton «nouveau lieu » mais si c’est mieux pour toi, je saurai le comprendre.<br /> <br /> Bien amicalement<br /> <br /> célestine<br /> <br /> ¸¸.•*¨*• ☆
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L
J'ai besoin d'y penser en profondeur également... mais je peux d'ores et déjà t'assurer que, même si je n'adhère pas totalement à ta façon de voir, elle ne me choque en rien. Globalement je rejoins assez Calamity et Kéa... Avec des nuances et des précisions que je veux prendre le temps de t'exprimer aussi clairement, et sereinement que possible.<br /> <br /> Je t'embrasse, cher sensitif :-)
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K
Je n'ai pas le temps de lire tout ton texte présentement, je suis rendue aux "limites du consensuel" mais je veux faire tout de suite un commentaire. Je sais que mes commentaires ne sont pas très réfléchis la plupart du temps, assez impulsifs souvent. Là, maintenant, j'ai le goût de dire que pour ce qui est de tes inquiétudes au sujet de ce qui s'en vient pour l'humanité, je ne suis pas du tout heurté par ce que tu dis étant donné que je vois les choses pas mal de la même façon. Ce qui diffère entre nous par contre ce sont nos perceptions concernant la nature profonde de l'être humain. Je développe un peu plus tard,... si ça t'intéresse évidemment, et de cela je ne suis pas vraiment certaine, peut être pas assez en mesure de m'exprimer clairement et intelligemment. Malgré tout ce que dit Calamityjane me rejoint : "si nous te suivons toujours c'est bien que quelque chose en nous fait écho dans nos propres ressentis."
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C
Ton texte mérite une réponse circonstanciée que je n'ai pas le temps d'approfondir ce soir.<br /> <br /> Mais veuille croire que ton message a déclenché des choses en moi !<br /> <br /> ¸¸.•*¨*• ☆
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C
Bah dis donc Pierre, sacré morceau là ;)<br /> <br /> Bon, tu es un peu torturé sur la façon de t'exprimer et sur la forme.<br /> <br /> Tu nous dis tes craintes, sur l'avenir, sur la peur de blesser, la peur d'entraîner des failles de confiance en ton lectorat. <br /> <br /> J'entends ton questionnement, néanmoins, il me semble (même si je me suis peu manifestée depuis longtemps) que tu prends soin des lecteurs, tu écoutes, tu es même patient voire très (ça c'est mon avis ;)).<br /> <br /> <br /> <br /> Quel autre chemin vas tu prendre? comment te suivre même silencieusement?<br /> <br /> <br /> <br /> J'avoue j'ai toujours eu un peu de mal avec cette manière de craindre pour les autres...surtout le public de lecteurs du net parce que si l'on vient voir tes écrits, on le choisit, non? sinon on passe son chemin, que ce soit pour l'avenir du monde, des relations amoureuses, ou autres...<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai compris au fil du temps que c'est ta personnalité que tu nous exposes là avec ses doutes, son passé, ses amorces positives ou négatives et je me dis que si nous te suivons toujours c'est bien que quelque chose en nous fait écho dans nos propres ressentis.<br /> <br /> <br /> <br /> Et voilà l'idée du partage, but de ces pages et de cette interaction régulière ou pas, je crois, je devrais même dire j'y crois.<br /> <br /> <br /> <br /> Alors Pierre, qu'en est il de l'avenir?<br /> <br /> <br /> <br /> Bises en cette fin 2017
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