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Alter et ego (Carnet)
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1 mai 2019

Ne plus se mentir

Trois mois se sont écoulés depuis ma dernière publication. J'en oublie presque l'existence de ce blog en déshérence. Ancien compagnon de route, il a longtemps représenté un équivalent virtuel d'ami, ou de cercle d'amis, à la fois confident et répondant plus ou moins fiable. Un peu comme un miroir déformé aux reflets changeants. J'écrivais ce que j'avais besoin d'exprimer, l'écran me laissant d'abord seul face à moi-même [et à ma représentation du lectorat !], puis je lisais vos réactions de lecteurs après la mise en ligne. Une sorte de dialogue en différé, parfois débat d'idées ou confrontation de représentations, à la fois intime et public. La plupart du temps bienveillant mais pas toujours. S'exposer, c'est prendre le risque de recevoir autre chose que ce qu'on espère. Se sentir compris ou, au contraire, plus seul qu'on le croyait. Conforté ou déstabilisé. Réjoui ou attristé.

Les années passent et, à la longue, je crois que je me retrouve face à une forme de solitude en écriture. À tort ou à raison, je ne me suis plus senti "porté" par suffisamment de retours positifs. Ni négatifs, d'ailleurs. J'ai simplement constaté que mes préoccupations n'avaient pas beaucoup d'écho. Ou moins qu'auparavant. Ou pas autant que ce dont j'avais besoin, dans une période de mutation profonde de mes représentations. Et réciproquement, ce que je lisais chez les autres m'a de moins en moins touché.

Décalage, divergence, éloignement...

Là, en cet instant, je constate que l'inspiration me mène vers ce retour un peu triste [désenchanté ?]. Je n'avais aucune idée de vers quoi les mots me porteraient en commençant mon texte, si ce n'est ce constat d'éloignement : je suis loin. Vous êtes loin. Ce "vous" généralisant étant la perception globale et subjective que j'ai de mon lectorat, plus ou moins incarné, imaginé, fantasmé émotionnellement et spirituellement. Mais je m'empresse de dire que cette distance n'est pas propre à ce qui nous a "reliés" des années durant : je ressens la même chose avec toute personne qui n'exprime pas clairement son inquiétude... face aux bouleversements écologiques en cours et à venir. Car c'est bien de cela dont il s'agit. Tout mon rapport à l'existence, au monde, aux autres, est désormais teinté par cette inquiétude sourde : l'amélioration continue des conditions de vie ne durera pas. Nous persistons à outrepasser les limites planétaires et le monde tel que nous le connaissons actuellement est en sursis. Notre mode de vie, si confortable mais tellement destructeur du vivant, n'est pas soutenable.

Ayant cette conscience, il m'est de plus en plus difficile d'interagir avec celles et ceux qui ne s'en soucient guère ou préfèrent ne pas en parler. Ou qui considèrent que ce n'est qu'un sujet comme un autre. Ou qui s'imaginent que si chacun fait quelques efforts pas trop contraignants le problème disparaîtra. Ou pire : qui minimisent, voire nient l'ampleur du "problème".

Où que ce soit, je ne cherche à convaincre personne, tant cela touche à l'équilibre profond de chacun, mais je ne saurais faire semblant de ne pas savoir. "Ne plus se mentir", comme le clame le percutant opuscule de Jean-Marc Gancille.

Du coup mon cercle relationnel a évolué et se transforme. J'ai investi de nouveaux groupes, entrepris des actions, ne cesse de faire des rencontres. J'échange, je discute, j'élabore. J'écoute et lis beaucoup, participe à des conférences. En pleine reconfiguration de ma pensée ("décolonisation de l'imaginaire"), je m'informe inlassablement... et n'écris donc plus dans l'isolement. J'ai besoin de confronter sans cesse ma réflexion en mouvement à d'autres façons de voir.

Ce processus de pensée foisonnante est éminemment vivant, contrasté, émotionnellement soutenu, parfois presque euphorisant malgré le sujet... une fois que le même constat est partagé. Mais il est très mobilisateur en temps et en énergie, au détriment de modes de sociabilisation plus... insouciants.

 

ne-plus-se-mentir

« Ce livre est pour celles et ceux qui savent que la planète nous survivra quoi qu'il advienne et que l'humanité ne sera pas sauvée à coup de voeux pieux, de petits pas "qui vont dans le bon sens" et de petits gestes bien intentionnés au quotidien »

« Nous ne pouvons plus ignorer notre responsabilité individuelle dans le délabrement du monde. Toxicodépendants de la consommation, nous sommes de plus en plus conscients qu'elle nous conduit à notre perte mais perdurons à l'encourager pour le bien-être illusoire et le confort qu'elle procure. »

« Il nous faut mesurer et intégrer pleinement l'ampleur de la catastrophe et la gravité de l'écocide en cours afin d'apporter des réponses à la hauteur des enjeux. Les gestes symboliques, les initiatives anecdotiques, les issues qui n'en sont pas, la confiance dans le politique ou la responsabilité sociale des multinationales - en un mot l'écologie de réassurance - ne sont pas à la hauteur. »

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